Collection DIBICA Classique

Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.

Lubuimi Nsung’Ampay, Denis

1932-2005
Église du Christ au Congo (Cbco)
République Démocratique du Congo

Denis Lubuimi Nsung’Ampay [1] est né le 22 mars 1932 à Mayoko Saka-Saka, dans le secteur Dwe, territoire de Bulungu, dans l’actuelle province de Bandundu en République Démocratique du Congo. Il était l’aîné d’une famille de six enfants dont trois garçons et trois filles. Son père Salomon Mawa et sa mère Rachel Kiongokoto étaient tous deux membres de l’American Baptist Foreign Mission Society [Société américaine baptiste des missions étrangères].

À dix-sept ans, il a reçu Jésus-Christ comme Seigneur et Sauveur. Il s’est fait baptiser à Vanga deux ans plus tard, le 21 octobre 1952.

Le 15 décembre 1956, il a épousé Mademoiselle Denise Nanama Lupere. De leur union sont nés neuf enfants dont cinq filles. Jean Philippe, l’un des jumeaux, est mort quelques temps après sa naissance des suites d’un accouchement difficile.

Lubuimi avait commencé ses études primaires à Kimputu en 1943 qu’il a achevées à Vanga en 1950. Il a ensuite étudié à l’Ecole Moyenne et à l’Ecole d’Apprentissage Pédagogique de Vanga entre 1950 et 1953. De 1957 à 1962, il a commencé les études théologiques à l’Ecole Pastorale de Kikongo sur Wamba et les a complétées à l’Ecole de Théologie Evangélique de Kinshasa de 1966 à 1970. De septembre 1976 à février 1977, il a effectué un voyage d’études à l’Institut Œcuménique de Recherches Théologiques de Tantur en Israël.

Il parlait couramment l’iyansi, sa langue maternelle, les deux formes du kikongo utilisées dans le Bandundu et le Bas-Congo, et le français. Il possédait aussi un niveau d’anglais rudimentaire.

Il a commencé sa carrière en 1953 comme enseignant à l’école primaire, oeuvrant tour à tour à Vanga et à Pukulu. De 1963 à 1966, il est devenu le premier pasteur à la paroisse de l’actuelle Communauté Baptiste du Congo (CBCO) à Kikwit. De 1970 à 1971, il a été nommé pasteur responsable [2] des paroisses de Kikongo. De 1971 à 1978, il a œuvré comme enseignant et directeur adjoint à l’Ecole Pastorale de Kikongo.

Il a été ordonné au ministère pastoral le 25 mai 1975 à Kikongo. Il avait adhéré à la foi protestante tôt dans sa vie et il a servi Dieu comme enseignant et pasteur au sein de la Communauté Baptiste du Congo.

De 1978 à 1983, il a été élu secrétaire général et représentant légal de cette communauté. Au cours de ce mandat, il a aussi été élu 2e vice-modérateur du Synode National de l’Eglise du Christ au Zaïre [3], vice-président du conseil d’administration de la Faculté de Théologie Protestante au Zaïre et président du conseil d’administration du Centre Evangélique de Coopération et de l’Institut Médical Evangélique de Kimpese. Au terme dudit mandat, une Assemblée Générale s’est réunie à Vanga qui a élu son successeur, le Rév. Lusakweno Vangu Kinkela, dont le mandat n’a pas été validé par le ministère de la justice. Ainsi, le nom de Lubuimi est resté dans les archives de ce ministère jusqu’à l’élection du Rév. Muzau Kitangwa à l’Assemblée Extraordinaire du Lycée Dr. Shaumba en 1991 où il a été décidé que la prime de représentation entre 1983 et 1991 devait lui être payée pour avoir sauvé l’intégrité de la communauté. Pour n’avoir pas été affecté à un poste entre 1983 et 1985, un salaire régulier devait également lui être payé. Malheureusement, ces deux décisions n’ont jamais été exécutées.

En 1985, il a été nommé pasteur responsable des paroisses de Masina, puis de Kintambo et de Kinshasa. Lors d’une carrière qui aura duré cinquante-deux ans [4], il a passé quarante-et-un ans comme pasteur, et onze ans comme enseignant.

Comme l’indique son surnom (voir note 1), Lubuimi a préservé l’unité de la communauté contre les velléités de scission pendant sa longue carrière. Son élection avait donné lieu à une intense correspondance, assortie de menaces de scission, entre les “doyens” du Bandundu et du Bas-Congo, qui s’accusaient mutuellement d’injustice et de trahison parce que cette élection n’était pas conforme à leur entente.

Il convient alors de mentionner la tenue de l’Assemblée Générale Extraordinaire de 1979 au Centre Catholique Nganda à Kinshasa. Lors de cette assemblée, le système rotatif dans le vote aux fonctions à mandat à été ajouté au principe de quota régional (provincial) dans l’attribution des bourses d’études théologiques adopté par l’Assemblée Générale Restreinte de 1976.[5]

Sa modeste contribution à la vie sociale a été sanctionnée par son élévation à la dignité de l’Ordre National de Léopard (17 mai 1981) et l’obtention de trois médailles de mérite civique (de bronze, d’argent et d’or) le 24 novembre 1979. Il a participé à la production de la littérature d’affermissement éditée par le Département de l’Education Chrétienne et de la Littérature, sous la direction du Révérend Willard Scofield, notamment le dépliant “ La joie de donner à Dieu “ (Kinshasa : Cedi, 1990).

Il s’est fait remarquer par son sens d’organisation administrative et par sa ponctualité. En effet, il a été l’un des rares Chefs de District Ecclésiastique de la Communauté Baptiste du Congo à avoir laissé des archives : dossiers de pasteurs, de laïcs, d’acquisition de terrain des paroisses de son ressort, rapports des différentes structures du district, procès-verbaux des réunions et des assemblées, tenue de caisse et rapports financiers mensuels, trimestriels, semestriels et annuels.

Au sujet de la ponctualité, il n’hésitait pas à réprimander publiquement ceux de ses collaborateurs et administrés qui ne respectaient pas l’heure des rendez-vous. Aussi demandait-il : “À quoi sert une montre ? Ce n’est certainement pas un objet d’ornement.”

À partir du 30 décembre 2004 il a souffert du malaria. Le 7 janvier 2005, il s’est fait examiner par son médecin traitant. En début de soirée, je lui ai rendu visite à la maison et son épouse, ma belle-mère, nous a servi du maïs frais. Une coupure du courant électrique nous a obligés à sortir du salon et à prendre place au balcon à la façade d’entrée. Il s’est excusé pour se rendre aux toilettes, mais quelques instants après, son épouse qui l’y avait suivi, est vite ressortie pour m’appeler au secours. Il était au sol, dans la salle de bain, inanimé. Nous l’avons conduit au service des urgences de la clinique Ngaliema. A 20h, le médecin de garde nous a annoncé son décès des suites d’un arrêt cardiaque.

Il est donc mort le 7 janvier 2005 à l’âge de soixante-treize ans, sans retraite professionnelle, sans que ce malheur ne se fasse pressentir. Conformément à son testament, c’est à Mayoko Saka-Saka, son village natal, qu’il a été enterré, à l’endroit qu’il avait pris soin d’indiquer, chaque fois qu’il y séjournait.

Fidèle Kwasi Ugira


Notes:

  1. Nsung’Ampay est le surnom porté par Lubuimi en 1971 après la suppression des prénoms chrétiens dans le cadre du recours à l’authenticité. En iyansi, nsung est l’impératif, 2e personne singulier, du verbe utsuung qui veut dire “délivrer, libérer”. Mpay signifie “peine, douleur, difficulté, misère”. Nsung’Ampay désigne donc “Celui qui délivre de la peine, la douleur, la difficulté, et la misère.”

  2. Les fonctions de pasteur responsable équivalent à celles du chef de district ecclésiastique dans les nouveaux statuts de la Communauté Baptiste du Congo, adoptés par l’Assemblée Communautaire de mars 2004 et publiés dans le Journal Officiel de la République Démocratique du Congo, n° 18 du 15 septembre 2004, pp. 84-94.

  3. Eglise du Christ au Zaïre, Procès-Verbal du Synode National de 1983, Kinshasa, CEDI, 1983, p. 9.

  4. La retraite des pasteurs en Afrique demeure une question fondamentale. Elle a fait l’objet d’une étude en commission et, au terme de deux ans d’analyse, deux documents importants ont été produits: le contrat de travail et le Règlement Intérieur de la Caisse de Retraite des Pasteurs (CAREPAS), adoptés par l’Assemblée Communautaire de 1995, (voir Procès-verbal de l’Assemblée Communautaire tenue à Kinshasa du 1er au 6 juillet 1995, p.10, vote AC 95. 015, inédit). La CAREPAS a démarré avec la mise en place du bureau de son Assemblée Générale (Professeurs François KITIKILA Dimonika, président, et Fidèle KWASI Ugira, vice-président) et l’élection de son administrateur, le Professeur Jean MASAMBA ma Mpolo, (voir Procès-Verbal de l’Assemblée de la CAREPAS tenue à Kinshasa les 13 et 14 janvier 1994, pp. 3 et 9 ; A.G. CAREPAS/023.94), inédit. Malheureusement, seulement un an après, la CAREPAS a fait faillite.

  5. Les assises de l’Assemblée Communautaire sont semestrielles. Pendant l’intersession, le comité exécutif communautaire, siégeant au moins trois fois par an, assure l’exécution des décisions de l’assemblée. Les difficultés financières n’ont pas permis à l’assemblée de tenir sa réunion en 1976. Aussi une Assemblée Générale Restreinte a eu lieu, adoptant entre autres, le principe de quota régional dans l’octroi des bourses d’études théologiques (voir CE.76.045, Procès-Verbal de l’Assemblée Générale Restreinte tenue à Kinshasa du 9 au 11 juin 1976, AGR.76.013). Ainsi, certains ont vu leurs candidatures rejetées sous le prétexte que le quota alloué à leur région était atteint. D’autre part, le système rotatif stipule que pour les élections aux fonctions à mandat au niveau communautaire, seules les provinces du Bas-Congo et de Bandundu peuvent proposer des candidatures à soumettre au vote (voir Procès-Verbal de l’Assemblée Extraordinaire de Nganda, du 26 au 29 novembre 1979, art. 2, 11, 15, 16,18).

Exclure ainsi les ressortissants des autres provinces qui ont pourtant décidé de vivre leur foi dans les paroisses de la CBCO est une injustice flagrante. Il faut du courage que seule la foi en Jésus-Christ donne pour dénoncer cette flagrance. Espérons que les nouveaux statuts permettront de soutenir cette dénonciation et conduire à la réparation.


Bibliographie

Communauté Baptiste du Zaïre Ouest, Procès-verbal de l’Assemblée Communautaire tenue à Kinshasa du 1er au 6 juillet 1995, inédit.

——–, Procès-Verbal de l’Assemblée de la CAREPAS tenue à Kinshasa les 13 et 14 janvier 1994, inédit.

——–, Procès-Verbal de l’Assemblée Extraordinaire de Nganda, du 26 au 29 novembre 1979, inédit.

——–, Procès-Verbal de l’Assemblée Générale Restreinte tenue à Kinshasa du 9 au 11 juin 1976, inédit.

Église du Christ au Zaïre, Procès-Verbal du Synode National (Kinshasa : CEDI, 1983).

Journal Officiel de la République Démocratique du Congo, n° 18, du 15 septembre 2004.


Cet article, reçu en 2007, est le fruit des recherches de Fidèle Kwasi Ugira, pasteur et vice-modérateur de l’Assemblée de la Communauté Baptiste au Congo. Détenteur d’un doctorat en théologie de la Faculté Universitaire de Théologie Protestante de Bruxelles, il est doyen et enseignant de l’Ancien Testament et l’Ethique chrétienne à la Faculté de Théologie Evangélique, Université Chrétienne de Kinshasa.