Collection DIBICA Classique

Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.

Olang’, Habakkuk Festo

1914-2004
Communion Anglicane
Kenya

Festo Habakkuk Olang’ était le premier archevêque africain du Kenya ainsi que le premier évêque de Nairobi dans l’église anglicane du Kenya.

Festo Olang’ est né vers 1914, donc vers le début de la Première Guerre mondiale, dans le village d’Ebusakami Esabalu, Maseno, à Bunyore du sud, près de l’équateur, dans le district de Kakamega. Son père, Etarwa, avait quatre femmes. Sa mère, Emisiko Sambaya, était la femme aînée d’Etarwa, et la seule à avoir deux fils survivants.

Malgré le fait qu’il est né dans le district de Kakamega, Olang’ a passé la plupart de son enfance et la majeure partie de son adolescence à Kano, dans le district de Kisumu, et a ainsi appris à parler le Luo et le Luhyia couramment. Alors qu’il était encore jeune, ses parents sont allés à Kano, où il y avait beaucoup de pâturage pour les nombreuses têtes de bétail appartenant à son père. Ses parents se sont installés à Nyamasaria, à Kano, et ne sont jamais retournés à Maseno, Bunyore. La vie à Nyamasaria a continué comme avant à Maseno: chaque jour Olang’ et les autres garçons amenaient les animaux aux pâturages.

En 1925 il a commencé l’école primaire à Kisumu, qui s’appelait alors l’école de Komulo. En 1927 il a pris l’examen général d’entrée à l’école de Maseno, et il a été admis en 1928. Il y a fait ses études pendant trois ans, mais a trouvé que l’expérience était assez traumatique : il était loin de chez lui, et il fallait suivre les règlements de l’école ainsi que le code vestimentaire. Cependant, il a reçu beaucoup d’aide et a été très influencé par le proviseur de l’école de Maseno, le mathématicien célèbre M. Edward Carey Francis. La foi d’Olang’ en Jésus-Christ a grandi et a été raffermie grâce aux conseils de ce dernier, et, comme de nombreux autres parmi les 300 élèves de l’école, il enseignait dans les écoles du dimanche locales tous les dimanches, ayant appris comment faire la leçon sous le tutelage hebdomadaire de M. Francis. Olang’ enseignait aux groupes qui parlaient le Luyia, et on l’encourageait aussi à planter des arbres autour des églises dans les villages.

Alors qu’il était à Maseno, Olang’ a été préparé pour sa confirmation par l’archevêque Owen, et a été confirmé par l’évêque Heywood. C’était une expérience merveilleuse. Il a commencé à apprendre l’anglais alors qu’il était en CE2 et lors de sa troisième année à Maseno, en CM2, il recevait son instruction en anglais et s’en servait pour prendre ses examens.

Pendant tout ce temps il était toujours le seul chrétien dans sa famille et son père voyait l’influence qu’on avait sur son fils d’un œil suspect. Parmi les collègues d’Olang’, il y avait M. Apollo Ohanga, qui fut ministre du gouvernement colonial. Après l’école de Maseno, Olang’ a entamé ses études au Lycée Alliance à Kikuyu, en 1931, grâce à l’influence de Carey Francis, qui par la suite est devenu proviseur de ce lycée. C’est là qu’il a fait la connaissance de l’ancien ministre M. James Gichuru. Olang’ a donc été élève au lycée Alliance de 1931 jusqu’à 1935, et a reçu son éducation secondaire pendant les trois premières années. Pendant les deux dernières années il a fait des études pédagogiques car il pensait faire carrière dans l’éducation. Lors de ces années passées à Alliance il a acquis des capacités de leadership et a développé une appréciation particulièrement marquée pour les sports et pour la communication de l’évangile.

Après la formation qu’il a reçue pour l’enseignement, Olang’ est retourné enseigner à l’école de Maseno pendant quatre ans. En janvier 1940, il est allé s’installer à Butere, car la directrice de la nouvelle école pour filles de Butere, Mlle. Lee Appleby, l’a invité à y être enseignant.

Alors qu’il enseignait à Maseno, Olang’ avait décidé qu’il était temps de penser au mariage. Selon la coutume Luyia de l’époque, il a demandé à sa famille à Ebusakami de voir s’ils pouvaient lui trouver une femme convenable. Ils ont trouvé Eseri Twera, la fille de Josué Olume, qui avait grandi dans un foyer chrétien et qui avait appris à lire et à écrire à la mission de l’église de Dieu (Church of God) à Kima. A l’époque, l’éducation des filles se limitait à peu près à cela. Après avoir consulté sa famille, on lui a donné la permission de rencontrer Eseri et de faire sa connaissance. Il fallait qu’il décide si le choix de sa famille était bon avant de pouvoir confirmer les fiançailles. En effet, ils avaient bien choisi, et le 24 décembre 1937, il a épousé Eseri dans l’église de St. Paul à Maseno. Le Seigneur a béni le mariage d’Olang’ et d’Eseni, et ils ont eu douze enfants.

En 1943, alors qu’il enseignait à Butere, Olang’ a reçu une lettre de la part du révérend Martyn Capon, directeur de l’école de théologie de St. Paul à Limuru (qui s’appelle maintenant St. Paul’s United Theological College [Collège Théologique Uni de St. Paul]). Ce dernier lui demandait de considérer un programme de formation au ministère. En janvier 1944, après avoir prié et discuté de la question avec sa femme Eseri, il a arrêté d’enseigner et s’est inscrit à la faculté de théologie de St. Paul, où il a entamé un programme d’études amenant au ministère. A l’époque, sur l’ensemble du pays, on ne comptait que trente-six membres du clergé qui étaient africains, et dix-huit européens. Le révérend Obadiah Kariuki, qui était parmi les premiers évêques africains consacrés avec Olang’ par la suite, se trouvait parmi les tuteurs à Limuru.

Le 9 décembre 1945, Olang’ a été ordonné diacre par l’évêque Crabbe à l’église de St. Etienne, à Nairobi. Suite à l’ordination, il était affecté au pastorat de Ramula sous le doyen local de la région, le révérend Alf Stanway. Ce doyenné rural comprenait le territoire intégral de Seme et de Karateng’, et la moitié du territoire de Gem. Il a servi ce pastorat en 1946 et en 1947, deux années pendant lesquelles il a dirigé la paroisse, a fait de l’évangélisation, et a fortifié les chrétiens du lieu. Comme diacre, Olang’ a eu la grande joie et le grand privilège de devenir parrain de sa propre mère, lui donnant aussi l’instruction religieuse qui a amené à son baptême en 1946. Son père, qui était mort avant cela, avait aussi reçu le baptême grâce à l’influence d’Olang’. Après sa consécration, il a aussi pu confirmer sa mère.

En 1948, Olang’ est rentré à Limuru pour terminer la formation théologique amenant à l’ordination et la prêtrise. Vers la fin du deuxième trimestre en 1948, il a reçu une bourse du British Council (Concile Britannique) lui permettant d’aller à Wycliffe Hall, Oxford, en Angleterre, pour y passer une année académique. Le programme d’études était surtout concentré sur le Saint-Esprit et sur l’administration de l’église. Alors qu’il était en Angleterre, il était affilié à la paroisse de Holy Trinity, Bristol, où le vicaire était son ancien instituteur au lycée Alliance, le révérend Fred Buff.

En 1950, il est rentré au Kenya et a reçu la prêtrise dans l’église de St. Paul, à Maseno, de la part de l’évêque Crabbe. Olang’ est aussi devenu le proviseur de l’école biblique de Maseno, qui avait été crée très récemment. En 1952, il est devenu le premier doyen rural africain du Nyanza central, et vicaire de la paroisse de Bunyore, jusqu’à fin 1954.

Le 15 mai 1955, Olang’ et Obadiah Kariuki ont été consacrés dans la cathédrale de Namirembe, à Kampala, Ouganda, par l’archevêque de Canterbury, le très révérend docteur Geoffrey Fisher, comme premiers évêques assistants du Kenya. Olang’ présidait sur l’ensemble du Kenya occidental, et le révérend Kariuki s’occupait de la région centrale. Parmi ses nombreuses responsabilités on comptait les confirmations, les visites (à domicile), les conseils et la prédication, pour n’en citer que quelques unes.

En décembre 1960, il a été nommé archevêque de Maseno, et son territoire comprenait la province de Nyanza ainsi que la province occidentale. Il a été intronisé en 1960 par l’archevêque Beecher dans l’église de St. Etienne, à Kisumu, l’église qui est devenue sa pro-cathédrale par la suite. Une croissance phénoménale de l’église a amené à la partition du diocèse de Maseno en Maseno-nord et Maseno-sud. Olang’ a continué d’assumer la responsabilité de Maseno-nord, et l’évêque Evan Angola a présidé le Maseno-sud. De manière générale, le Maseno-nord servait la population Luyia, et le Maseno-sud servait les Luo.

Pendant qu’il était évêque de Maseno et de Maseno-nord, Olang’ était aussi président des comités Luo et Oluluyia pour la traduction de la Bible. Il parlait les deux langues couramment, et grâce à ses efforts, la Bible, le Recueil de Prière et les Recueils de Cantiques ont été traduits en Luyia et en Luo. Dans l’autobiographie de Festo Olang’, la diaconesse Appleby, qui était membre du comité, fait l’éloge du travail de traduction d’Olang’ ainsi : “Sa contribution particulière, par rapport à l’œuvre du comité, c’était sa capacité extraordinaire de voir tous les aspects du sens d’un mot ; d’habitude, c’était lui qui voyait les ambiguïtés potentielles là où les autres membres du comité pensaient qu’une interprétation était bonne.” (Olang’, p. 47).

En 1970, peu après la division du diocèse, l’archevêque Beecher a décidé de prendre sa retraite quelques mois avant d’atteindre à l’âge de soixante-cinq ans. A cause de la croissance rapide de l’église anglicane, la province de l’Afrique de l’est a été divisée en deux provinces : celle du Kenya et celle de la Tanzanie. Olang’ a été élu premier archevêque africain du Kenya et évêque de Nairobi. Il a été intronisé le 3 août 1970, dans la cathédrale de All Saints, Nairobi, par le très révérend L. J. Beecher.

En 1978, l’université du sud, Sewanee, aux Etats-Unis, confère à Olang’ un doctorat honoris causa. Comme archevêque du Kenya, Olang’ a fait un travail de pionnier par rapport à quelques changements dans l’église. Pour commencer, la constitution provinciale de l’église a été rédigée pour le Kenya uniquement. Ensuite, comme archevêque, il a participé à toutes les fonctions cérémoniales et administratives du gouvernement, y compris l’ouverture du Parlement et la prononciation de la prière lors des fonctions formelles de l’état. Il a aussi servi comme évêque ordinaire auprès des forces armées.

L’archevêque Olang’ a créé un tribunal ecclésiastique pour s’occuper de la discipline du clergé. Il a aussi renforcé les liens avec la communion anglicane mondiale par les visites personnelles ainsi que par les mesures administratives. Comme représentant de l’église anglicane, qui était désormais connue comme l’église de la province du Kenya [Church of the Province of Kenya, soit la CPK], il a pu se rendre dans de nombreux pays, y compris la Grande-Bretagne, l’Allemagne, le Canada, la Suisse, les Etats-Unis, l’Australie, et bien d’autres. Il a participé plusieurs fois aux croisades d’évangélisation de Billy Graham.

Il a animé le conseil consultatif anglican, tout en représentant l’église anglicane mondiale, à Limuru, en 1971. En 1974, il a organisé l’assemblée panafricaine chrétienne à Nairobi. En 1975, il a accueilli le congrès mondial d’archevêques anglicans à Trinity College, à Nairobi, et encore en 1975, il a aidé à recevoir la consultation du partenariat missionnaire, toujours à Nairobi. Comme il l’a noté ci-dessous, ces rencontres étaient très importantes pour la croissance de l’église.

Ces réunions, cependant, étaient plus que des spectacles permettant aux membres de l’église d’admirer les vêtements sacerdotaux et les cérémonies des différentes églises épiscopaliennes. Nous avons eu l’occasion de vraiment se consulter les uns les autres, de profiter de la sagesse de chacun, et, bien plus, de s’étonner de la communion fraternelle mondiale de l’église. J’ai été très heureux de pouvoir participer à tous ces événements et d’avoir pu en faciliter quelques uns. (Olang’, p.56)

En 1977, Olang’ a reçu tous les évêques africains à Nairobi et a formé le “Lambeth Africain,” qui a été inauguré comme Congrès des Provinces Anglicanes en Afrique [Conference of Anglican Provinces in Africa, soit CAPA], dont il a été fait président. Il a participé aux congrès œcuméniques interconfessionnels, dont le Conseil Mondial des Eglises [World Council of Churches, WCC], le Congrès des églises de l’Afrique [All Africa Conference of Churches, soit AACC], et le Congrès National des Eglises du Kenya, et il a, généralement parlant, encouragé l’œcuménisme. Il était aussi très engagé dans le mouvement du renouveau est Africain et dans l’unité de celle-ci, en dépit des désaccords qui survenaient parfois. C’est grâce au mouvement du renouveau qu’il a appris que “la repentance est la seule voie qui mène au Christ.” (Olang’ p. 35)

Olang’ était archevêque de 1971 jusqu’en 1980, l’année de sa retraite. On le respectait pour son humilité, et il ne participait pas aux luttes pour les différents postes dans l’église. Il prêchait la paix, l’amour, l’unité et l’humilité, et c’est ainsi qu’il a su garder l’unité dans l’église anglicane pendant la période de l’exercice de ses fonctions. Olang’ a initié de nombreux projets de développement (écoles, hôpitaux) dans l’église anglicane. Grâce à sa direction, de nombreuses paroisses et de nombreuses églises ont été créés et ont grandi rapidement. Quand il a pris sa retraite, l’église comptait 288 paroisses qui étaient répandues sur sept diocèses. Ces églises étaient desservies par 374 membres du clergé ordonnés. Il encourageait la transparence et la responsabilité parmi les membres du clergé et parmi les chrétiens en général. Il travaillait aussi de près avec les autorités civiles comme conseiller. Le souvenir de l’archevêque Olang’ restera longtemps dans la mémoire car il était humble et honnête, et il respectait la dignité humaine. C’était un homme de compétences extraordinaires.

Sa femme Eseri est morte en 1997, à l’âge de soixante-dix-huit ans. Son fils William est mort en 1986, et son fils David est mort en 2001.

Enfin, à l’âge de quatre-vingt quinze ans, Olang’, premier archevêque de l’église anglicane du Kenya, est mort le 3 février, 2004. Il a laissé huit filles et deux fils, quarante-cinq petits-enfants et vingt-quatre arrière-petits-enfants.

Alfred Sheunda Keyas


Sources:

Olang’, Festo H. Festo Olang’ : An Autobiography. Nairobi: Uzima Press, 1991.

“History of the Anglican Church of Kenya,” [Histoire de l’église anglicane du Kenya] au site [Our History](https://www.ackenya.org/mission-of-the-church/about-mission) [accès le 16 mars, 2005]

Rabai to Mumias: A Short History of the Church of the Province of Kenya, 1844-1994 [De Rabai à Mumias: précis de l’histoire de la province du Kenya, 1844-1944], (compilation par) Unité provinciale de recherches, église de la province du Kenya. Nairobi: Uzima Press, c. 1994.

“Bishop Olang”: End of an Illustrious Ministry” [L’évêque Olang’: la fin d’un ministère illustre], dans Daily Nation Newspaper (rapport spécial) Nairobi, mercredi 4 février, 2004.

“First Anglican Archbishop of Kenya Dies, “ [Le premier archevêque africain du Kenya meurt], dans Anglican Communion News Service (ACNS), publié par the Anglican Communion Office [Bureau de la communion anglicane], Londres, Angleterre, le 20 février, 2004. Adresse internet: http://www.anglicancommunion.org/acns/articles/.

Waimiri, Justus. “First African Archbishop of Kenya Dies,” [Le premier archevêque africain du Kenya meurt]. CAPA e-bulletin: An Online Publication of the Council of Anglican Provinces of Africa [bulletin internet de la CAPA: une publication internet du conseil des provinces Africaines anglicanes], (CAPA-040217-3). Numéro 010, le 17 février, 2004.


Ce récit, soumis en 2005, a été rédigé et recherché par le révérend Alfred Sheunda Keyas, prêtre dans l’église anglicane du Kenya (ACK - Anglican Church of Kenya), diocèse de Mumias, missionnaire à Mwingi, dans la province est du Kenya, et récipiendaire de la bourse du Projet Luc (2004-2005).