Collection DIBICA Classique
Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.Sikufinde, Léonard
(Voir l’introduction historique ci-dessous)
Le 30 août 1985, les Évêques d’Angola annonçaient: “Le 14 dernier, l’abbé Léonard Sikufinde, membre du clergé du diocèse de Lubango, Sœur Luzia Kautidia (baptisée sous le nom de Celina), de la Congrégation du Saint-Sauveur et cinq autres personnes, ont été assassinés.” Ils étaient en route vers l’hôpital missionnaire de Chiulu.
L’accident s’est produit entre Mongwa et Xangongo, à 20 km de la vieille prison. Les deux missionnaires accompagnaient à l’hôpital une jeune femme en travail, dans l’espoir de lui sauver la vie. Parmi les autres voyageurs, il y avait aussi le mari de cette femme. Alertés par la fusillade, les soldats de Mongwa se sont rendus sur le lieu de l’embuscade, où ils ont trouvé le véhicule brûlé et quatre corps allongés par terre. Celui de l’abbé Leonardo, du côté droit, et trois du côté gauche: la jeune femme, sa mère et son mari, criblés de plusieurs balles. A l’intérieur du véhicule, les corps calcinés de Sr Luzia et de deux autres personnes. Les militaires transportèrent les corps de l’abbé et des trois autres qui se trouvaient sur la route jusqu’à la mission de Mongwa. Les corps de Sr Luzia et des deux autres passagers furent transportés et enterrés à Chiulo le 16 août 1985.[1] Deux passagers, un garçon et une fille, avaient réussi à s’échapper. Leur témoignage a confirmé que le massacre était prémédité. En effet, les tueurs avaient pu vérifier ll’identité des passagers. L’abbé les avait salués avec un signe de paix et Sr Luzia avait fait de même. En vain.
L’abbé Sikufinde était né à Ombadja-Ondjiva, archidiocèse de Lubango, le 1 janvier 1940, de Daniel Neunda et de Maria Mukwanaiuma. Études de philosophie et de théologie au séminaire Christ Roi d’Huambo. Ordonné le 9 juillet 1971. On lui confia, successivement, plusieurs tâches: Vicaire général d’Ondjiva, Chancelier de l’archidiocèse de Lu¬bango, chargé des vocations et directeur spirituel des novices des Sœurs de la Charité du Sacré Cœur. “C’était un prêtre ex-cellent, pour la sérénité et la force de sa foi, pour sa compréhension et son esprit de réconciliation.”[2]
Ses activités n’étaient pas appréciées par les autorités politiques. Il fut emprisonné durant presque deux ans. Sa santé en souffrit sérieusement. Au début du mois de septembre 1981, il partit à Rome, où en juin 1984 il obtint la licence en Philosophie (Université Pont. Urbanienne), avec la thèse: “Les racines philosophiques et sociales du Marxisme”. De retour en Angola, il fut nommé professeur de philosophie au Grand Séminaire Christ-Roi.
Il eut aussi la charge de fonder le Petit Séminaire de Lubango et d’animer l’Académie Newman, fréquentée par des jeunes universitaires. C’est sans doute à cause de son ministère parmi les jeunes, que son nom figurait sur la liste des gens à éliminer. P. J. Verchuur, recteur du collège St Pierre Apôtre, où logeait l’abbé Leonardo durant ses études à Rome, a témoigné: “Il était estimé et aimé. Ses amis l’avaient surnommé “Peuple de Dieu”, car il répétait souvent cette expression du Concile Vatican II. Là où il exerçait son ministère pendant les vacances, il était très apprécié soit par les prêtres soit par les chrétiens. Il était un grand communicateur, surtout avec les jeunes. Un bon travailleur, zélé, sérieux et en même temps jovial, pieux et simple dans sa manière de vivre.”
P. Neno Contran et Abbé Gilbert Kadjemenje
Introduction historique:
La signature des accords en mai 1991, entre le gouvernement angolais et l’Union Nationale pour l’Indépendance Totale de l’Angola (UNITA), sembla mettre le mot fin à la guerre civile éclatée l’année même de l’indépendance (1975). Avec le cessez-le-feu et le départ des derniers cubains, l’Angola faisait le bilan: environ 300.000 morts, 1.100.000 déplacés.
Dans leur appel pour la paix en 1985, les Évêques catholiques angolais déclaraient: “Nous avons vécu l’indépendance avec les armes en main. Nous sommes physiquement et moralement détruits. Presque cent prêtres et religieux (Angolais et expatriés) ont été kidnappés ou tués au cours de ces années».
Notes:
- Communiqué de Fernando Guimaraes Kavanu et N. V. Mbula, Lubango, 16.08.85.
- A.I.F., 21.08.85.
Cet article est reproduit de Cibles: 235 prêtres africains tués (copyright © 2002), avec la permission des éditeurs et de P. Neno Contran et de l’Abbé Gilbert Kadjemenje (Afriquespoir, B.P. 724 Limete - Kinshasa, RDC). Tous droits réservés.