Zongo, Yabré Michel
Zongo Yabré Michel, connu sous l’appellation Michel Bourou, est né en 1943 à Nandiala, quartier Gourcy, province du Boulkiemdé, région du Centre-Ouest, Burkina Faso. Il est fils de Zongo Pouinkomba et de Nana Pafandpanga. Il est le deuxième dans la lignée. Le nom Yabré, signifie qu’il est né chez ses oncles maternels. Quant à l’appellation Bourou, il provient du fait que l’on croit qu’il est originaire du village de Bourou. Il épousa Mademoiselle Nikièma Koudougou Marcelline, du village de Pitmoaga, département de Kokologho. Le nom Koudougou de son épouse signifie « forge ». Il a été père de neuf enfants, cinq garçons et quatre filles, 31 petits fils. Le deuxième garçon est décédé en 2006. Il n’a pas été recruté, et n’a fait l’objet d’aucune condamnation pénale ou civile. Il est de l’ethnie mossie et de nationalité burkinabé. Il a été pasteur, boulanger et agriculteur. Il n’a pas été scolarisé.
Son adolescence et sa conversion
A cette époque, tous les enfants, dès l’âge de neuf ans environ, devait garder le bétail en saison hivernale. C’est le moment aussi d’apprendre la lutte traditionnelle, le tir à l’arc, le langage des masques selon sa famille d’appartenance, les instruments de musique, de pratiquer la chasse, et de se faire circoncire–tout cela pour rentrer avec dignité dans la classe des adultes. En un mot, il fallait connaitre les coutumes. Zongo a suivi ces exigences sociales et, vers 1961, il se rendit en Côte d’Ivoire pour travailler dans les plantations en vue de se procurer de l’argent. Dans ce pays, il entendit la bonne nouvelle, donna sa vie au Seigneur Jésus, et devint chrétien.
Retour au village, intégration à l’église locale, opposition de sa famille, mariage
Zongo revint au village en 1963. L’Eglise des Assemblées de Dieu de Nandiala n’avait qu’une dizaine de chrétiens. Il apprit à lire le môoré avec Yaméogo Zomdé Jacques, un autre chrétien. Dès que les membres de sa famille apprirent qu’il était devenu chrétien, ils le bannirent. Selon eux, il était un égaré, qui avait renié ses coutumes, ses origines. La parole ne lui était adressée que pour le dénigrer, l’injurier et faire en sorte qu’il renonce à sa foi. Ils refusèrent de l’aider à se marier. Malgré toutes ces invectives et comportements hostiles, Zongo tint ferme dans sa foi.
Il fut baptisé en 1966, par Ouédraogo Landaogo, pasteur de Nandiala. Il décida de se trouver une épouse en 1969. Avec le soutien du pasteur et des chrétiens, il trouva Mademoiselle Nikièma Koudougou Marcelline, dans l’église de Pitmoaga, département de Kokologho. Le mariage fut célébré à l’église de Nandiala et, par la suite à la préfecture. Il demeura inoubliable car on n’avait jamais vu de mariage chrétien dans la région. Convaincu par la manifestation de l’amour des chrétiens, son petit frère Zongo Timbi Enoch se donna au Seigneur.
Son appel et son ministère
En 1970, sur sa demande, son pasteur le fit inscrire à l’école biblique de Nagbangré pour sa formation pastorale. Il y ressortit muni de son diplôme en 1973. Désigné par les membres du Conseil régional des Assemblées de Dieu de Koudougou, Zongo se rendit à Bourou et remplaça le pasteur Koanda Jacob. L’ancien bâtiment de vingt feuilles de tôles, devenu petit et vétuste, fut détruit et remplacé par un autre de cent tôles. Les sorties d’évangélisation alternaient avec les travaux champêtres et de construction. Afin de se consacrer mieux à l’œuvre de Dieu, il cessa le travail de la boulangerie, réduisit son champ, et confia les travaux à des ouvriers.
Des conversions se réalisèrent sous la puissance du Saint-Esprit. Un jour, on lui amena un fou agité. A quelques mètres de Zongo, il ordonna aux accompagnants de le détacher. Ceux-ci restèrent incrédules et ne voulurent pas obéir parce que le fou était connu pour sa violence. Sur l’insistance de Zongo, ils le délièrent. Le fou s’approcha de lui et s’assit. Zongo lui imposa les mains et pria. Immédiatement, le fou redevint normal. Une femme en pleurs vint voir Zongo et lui dit : « Après dix-sept ans de vie conjugale, mon mari m’a renvoyée parce que je n’ai pas d’enfant ». A l’issue de la prière de Zongo, un an plus tard cette femme revint lui présenter son bébé. Beaucoup de miracles se produisaient.
Les chrétiens, remplis du Saint Esprit, étaient solidaires. Mais l’ennemi suscita des épreuves. Des filles, victimes de mariage forcé, se réfugièrent chez le pasteur. Parmi leurs parents et maris, les uns demandèrent le départ du pasteur du village, tandis que les autres le convoquèrent chez l’autorité administrative. De tous les côtés, Zongo sortit victorieux. L’une des filles se maria à un pasteur et un de ses enfants devint pasteur.
Dans un buisson situé proche de la mission habitait un démon qui troublait le marché en incitant des bagarres. Zongo organisa une prière au cours de laquelle le démon s’enfuit. Il fut l’initiateur d’un regroupement de quatre églises, en vue d’offrir des enseignements et des prières. Cette organisation s’est amplifiée actuellement. Connu pour son honnêteté, sa fidélité, son humour et les divers dons qu’il mettait en pratique, l’évocation de son nom déterminait les indécis à participer à une réunion.
Au regard de sa notoriété, Zongo fut sollicité plusieurs fois en Côte d’Ivoire. Ses séjours duraient des semaines voire des mois. Mais pendant ces absences, ses adjoints prenaient la relève et les activités se poursuivaient bien. Il fut récompensé par un séjour d’une semaine en Israël.
Eprouvé par le décès de son deuxième fils en 2006, Zongo trouva le courage nécessaire pour exposer la Parole de Dieu à ceux qui venaient lui présenter leurs condoléances. Quant aux décès de son père et sa mère, il rendit grâce à Dieu pour leur vieillesse. Sa mère mourut dans la foi. Il en profita pour évangéliser la foule et des conversions furent enregistrées. Une fois, à bord de son véhicule, Zongo se rendait dans un village pour ses activités spirituelles. Le véhicule fut des tonneaux et il se retrouva coincé dans la cabine. Des paysans le secoururent et, dès qu’il fut sorti du véhicule, il dit : « Si j’étais mort, j’irais au paradis. Voilà la raison d’être chrétien. Vous qui m’avez aidé, je vous en remercie. Mais si vous devriez mourir à l’instant, où iraient vos âmes ? ». Son intervention amena quatre personnes au Seigneur. Son chant préféré était : « La force ne vient de nulle part si ce n’est de Dieu ».
Sa maladie, sa mort et ses obsèques
La mort de Zongo ne l’aurait pas surpris. Selon un de ses enfants, il aurait même bénéficié de deux ans d’augmentation. Le dimanche 24 mai 2020, Michel Bourou ne pouvait pas participer au culte, parce qu’il ne se sentait pas bien. Le jour suivant, il invita ses enfants à une réunion au cours de laquelle il leur révéla que son départ était proche. Il leur prodigua des conseils, leur demanda de mettre la Parole de Dieu en pratique dans leur vie, et les renvoya à leurs obligations. Sa maladie s’aggrava les jours suivants. Les diacres et ses enfants durent l’obliger à accepter son évacuation à Ouagadougou. Il fut interné à l’hôpital de Bogodogo et, le vendredi 29 mai 2020 vers six heures du matin, il s’endormit. A Bourou, où s’étaient déroulés ses 47 ans de ministère, animistes, musulmans, et chrétiens catholiques sont unanimes sur ses qualités humaines. Ce point de vue fut concrétisé à son inhumation. Comme sa famille biologique à Nandiala s’était déjà réconciliée avec lui, les chrétiens de la région Est de Koudougou réclamaient que son corps soit inhumé au village. Pendant ce temps, le chef du village de Bourou et ses notables suppliaient que son inhumation soit sur place. Cette demande constituant une reconnaissance de ses œuvres au village, la partie adverse capitula. Une file de véhicules accompagna le corps le dimanche 31 mai en direction de Bourou.
Dès 18 heures, le village était inondé de monde. Les chrétiens, ses parents, et ses sympathisants, sont venus de tous les horizons. Un culte pour rendre témoignage de ses œuvres fut organisé de 19 heures à 22 heures. A l’issue, à cause de la maladie du coronavirus, le protocole sollicita l’immense public à rentrer. Ce fut une peine perdue. Personne ne voulait se faire raconter le déroulement des obsèques de Zongo Yabré Michel Bourou. Les groupes d’adoration et de louange des églises se succédèrent, chantant et dansant jusqu’au matin. Le 1er juin 2020, voyant l’une de ses photographies, je constatai qu’il avait été décoré de la Médaille de chevalier de l’Ordre du Mérite Burkinabé.
L’oraison funèbre révéla l’ouverture de sept églises annexes et dix-huit pasteurs sortis de l’église mère. Les membres du conseil général de l’église des Assemblées de Dieu en tête, suivis de ceux du conseil régional et les autres serviteurs, s’inclinèrent sur son cercueil. De son domicile à l’église et de l’église à la tombe, son cercueil passait de mains en mains sans interruption même si seuls les pasteurs avaient le droit de porter son cercueil. De temps à autre, le cercueil était déposé et les chrétiens dansaient autour. Certaines personnes éclatèrent en sanglots lorsque le cercueil fut descendu et les dalles furent posées. Ainsi, Zongo Yabré Michel dit Michel Bourou retourna à Dieu.
Zongo Sibiri Samuel
Sources:
Yaméogo Zomdé Jacques, cultivateur, ami de Michel, interviewé par Zongo Sibiri Samuel, le 31 mars 2021, à Nandiala, département dudit, province du Boulkiemdé, région du Centre-Ouest, Burkina Faso.
Zongo Timbi Enoch, pasteur de l’église des A.D. de Nandiala /Règma, petit-frère de Michel, interviewé par Zongo Sibiri Samuel, le 31 mars 2021, à Nandiala Gourcy, département dudit, province du Boulkiemdé, région du Centre-Ouest, Burkina Faso.
Zongo Yinsiri Jean, pasteur de l’église des A.D. de Imassogo, petit-frère de Michel, interviewé par Zongo Sibiri Samuel, le 31 mars 2021 à Nandiala Gourcy, département dudit, province du Boulkiemdé, région du Centre-Ouest, Burkina Faso.
Zongo Guétawindé, pasteur de l’église des A.D. de Poédogo, Ouagadougou, un des fils de Michel, interviewé le 05 avril 2021 par Zongo Sibiri Samuel à Poédogo, sortie Ouest de Ouagadougou.
Nikièma Koudougou Marcelline, veuve de Zongo Y. Michel, interviewée par Zongo Sibiri Samuel, le 14 avril 2021 à Bourou, département de Sabou, province du Boulkiemdé, région du Centre-Ouest, Burkina Faso.
Koala Raaga Elie, ancien de l’église de Bourou, interviewé par Zongo Sibiri Samuel, le 14 avril 2021 à Bourou, département de Sabou, province du Boulkiemdé, région du Centre-Ouest, Burkina Faso.
Cet article reçu en 2021, est le produit des recherches de Zongo Sibiri Samuel, étudiant en licence à l’Université chrétienne LOGOS de Ouagadougou au Burkina Faso, sous la direction de Dre Anicka Fast.