Collection DIBICA Classique

Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.

Darman, Paul

1925-2001
Eglise Évangélique Luthérienne du Cameroun
Cameroun

Darman Paul

Darman est né à Mboula vers 1925. Ses parents appartenaient au clan Gbaya Bougoui de Kombo-Laka. Sa naissance a eu lieu juste un an après l’arrivée des premiers missionnaires Américains qui ont choisi d’y élire domicile : Adolphus Eugène Gunderson, son épouse, et les deux diaconesses, Olette Berntsen et Anne Olsen. A l’époque, Mboula était un des grands centres florissants en pays Gbaya, même si ses fondateurs sont Mboum. En 1928 l’administration coloniale française créa un poste à Meiganga pour assurer le contrôle des populations.

Enfance

Darman a passé son enfance dans ce milieu multiculturel où le Mboum, le Gbaya, et le Peul se côtoient. La présence des missionnaires et de la colonisation française s’ajoutent à ce mélange de cultures. Le jeune Darman assimilera en partie chacune des cultures et langues présentes et optera pour la foi chrétienne–ce qui le privera de l’initiation Labi des jeunes Gbaya. Ses parents n’étaient pas du nombre de ceux qui avaient embrassé la foi chrétienne à l’arrivée des missionnaires. La mère de Darman a vécu à Garga jusqu’à sa mort en août 1984. Sa vie a été liée à celle de son jeune frère Yalla André qui était catéchiste et un des évangélistes respectables de la région de Meiganga, pépinière de la nouvelle génération des Gbaya influencés et façonnés par la vie des missionnaires, qui était dirigée par l’Evangile.

Une jeunesse sous l’égide des missionnaires

Dès leur arrivée à Mboula, les missionnaires ont opté pour le travail parmi les enfants afin d’atteindre la population et se faire des adeptes. Ils ont aussi réuni les adultes pour des séances publiques de prédication et d’enseignement en plus des contacts individuels. Ils soignent les malades. Leur amitié pour les enfants attire des foules de curieux qui deviennent la base de leur ministère. Darman est parmi ces enfants que les missionnaires enseignent et de ceux qui ont tourné le dos aux pratiques anti-évangéliques de leur culture. Sa vie est nourrie de chants, d’histoires bibliques, et de prière. Il est heureux de grandir dans la communauté chrétienne constituée par les premiers baptisés de 1932. Il est encouragé par l’expression de la foi de ces Gbaya qui vivent aux côtés des missionnaires. Très assidu aux rencontres, il apprend à lire et écrire en Gbaya selon le principe de l’éducation des indigènes adopté par les missionnaires. Les cours sont dispensés par la diaconesse Olette. Très tôt, elle dit à Ruth Christiansen que Darman était un enfant brillant qu’il fallait garder à l’école et surveiller de près.

Fidèle et travailleur, Darman devient un des plus proches collaborateurs des missionnaires, initialement comme garçon de course et cuisinier. Cette relation l’empêchera de suivre les cours de français à l’école. Malgré ces circonstances non favorables, il va se débrouiller sur le tas pour apprendre la langue de Molière. Mais son obéissance et ses services fructueux auprès des missionnaires lui ont constitué un capital sans faille au point où, à l’âge de vingt ans, il est envoyé à Bétaré-Oya pour créer et diriger une communauté. Dès lors, il bénéficiera de plusieurs formations–plus que ses camarades de service.

Evangéliste a Bétaré-Oya

Bétaré-Oya est la ville aurifère Gbaya située à plus de 200 kilomètres au sud de Meiganga sur la route de Bertoua. Elle est le centre de l’exploitation minière de l’or du Cameroun. Les Allemands y avaient créé un poste administratif que les Français ont réhabilité. Point de rencontre des populations du sud et du nord, la Mission Presbytérienne Américaine y avait commencé l’ouvre avec un catéchiste vers 1940. Pour une meilleure supervision du travail, elle trouva bon de transférer cette ouvre aux Luthériens Américains qui étaient installés à Garoua-Boulai, à 90 kilomètres au nord sur la route de Meiganga. Le problème de langue se posait pour les autochtones parce que le culte se faisait en Boulou et en français. Darman y fut affecté pour travailler en Gbaya afin d’assurer la transition. Malgré les difficultés et les épreuves Dieu bénit richement ses efforts.

Il faut noter que le ministère de Darman dans cette région coïncide avec la période de construction de la route Bertoua-Meiganga. Le pont du Lom était déjà construit en 1944 et beaucoup de villages furent ainsi désenclavés. Il n’y avait pas encore assez de véhicules pour circuler dans le pays. Il fallait marcher à pied sur cette route le plus souvent pour prêcher dans les villages. Ce n’est qu’après quelques années que la mission lui donna un vélo pour faciliter ses déplacements. Par conséquent, les communautés grandirent rapidement grâce à la fréquence de ses visites. Plus de dix villages furent atteints le long de la route et d’autres encore de l’autre côté de la rivière Lom dont la traversée se faisait en pirogue.

Un jour, revenant d’une visite d’évangélisation, Darman et plusieurs autres traversaient le Lom en pirogue. Tout d’un coup, en pleine rivière une forte tempête s’éleva qui les entraîna très loin en aval à plus de 300 mètres, près d’un endroit profond où, d’après les autochtones, toute embarcation était engloutie par les flots. Les occupants de la pirogue criaient, persuadés qu’ils allaient se noyer. Se rappelant le récit de la tempête apaisée par Jésus sur le lac de Génésareth, Darman pria et demanda à Dieu d’agir pour la gloire de sa parole. Immédiatement, un courant poussa la pirogue jusque sur la berge qu’ils voulaient atteindre, avant qu’elle n’arrive à l’endroit dangereux. Tous étaient joyeux d’être sauvés, mais surpris en même temps de la manière dont ils avaient été sauvés. Le témoignage de sa prière fortifia les croyants et en appela d’autres à la foi. La nouvelle se propagea partout.

Le travail amorcé par Darman dans cette région nécessita l’installation de deux stations missionnaires après lui, l’une à Bétaré-Oya et l’autre à Woumbou. Il faisait son travail avec joie et détermination. Ruth Christiansen décrit Darman comme l’un de leurs plus fidèles évangélistes : talentueux, très bon administrateur, écrivain et traducteur, maîtrisant plusieurs langues, le Français, le Boulou–un témoin magnifique dans leur station de Bétaré-Oya. [1]

Leader fondateur de l’EELC

Un adage populaire dit qu’aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas. Darman est de ces âmes à qui la valeur est attachée pour toute leur vie. Entre les lignes de son curriculum vitae on aperçoit une personne qui a reçu une bonne éducation pendant l’époque coloniale, au moment où les leaders politiques qui luttaient pour l’indépendance du pays n’avaient pas, pour la plupart, le même profile. En effet, l’administration coloniale ne les avait pas assez préparés pour diriger le pays après l’indépendance. Par contre les missions avaient toujours préparé leurs responsables. Ses qualifications et les différents postes de responsabilité qu’il a occupés au sein de l’EELC présageait qu’une personne d’une telle envergure avait des potentiels spirituels devant servir au delà de son église d’origine. Ce qu’il avait, il a donné.

Ayant démontré ses talents d’évangéliste et sa fidélité dans l’implantation des églises à Bétaré-Oya, on recommanda Darman pour une formation à l’École Biblique de Baboua de 1949 à 1950. Selon le témoignage des autres lauréats, cette formation consistait à mémoriser 150 versets de la Bible. Le candidat ayant satisfait à cette exigence rentrait qualifié pour être catéchiste. Ceux qui avaient eu le privilège d’accéder à cette formation étaient l’élite qui dirigeait les communautés chrétiennes dans les villages et avaient beaucoup d’estime. Plusieurs responsables d’églises Gbaya n’ont exercé leur ministère de prédicateur qu’avec cette formation et ce titre, grâce auxquels ils ont influencé des foules pour suivre la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ. D’autres ont pu avoir la promotion en accédant à la charge d’évangéliste et de pasteur à la longue. Darman allait au delà de ses camarades par sa prouesse, son intelligence, et sa fidélité.

Le besoin pressant de la langue Boulou poussa la mission à envoyer Darman étudier à Enongal (Ebolowa) à la Mission Presbytérienne Américaine au sud afin de pouvoir desservir ces usagers. Très vite il maîtrisa le parlé et l’écrit–sa quatrième langue nationale après le Gbaya, le Mboum et le Foufoulde. Il connaissait aussi bien le Sango parlé en République Centrafricaine et le français. Après son retour du sud, il n’a plus servi très longtemps parce qu’en 1952, la conférence missionnaire américaine (Sudan Mission) décide de former les tout premiers pasteurs camerounais. Les deux premières personnes choisies étaient André Garba et Paul Darman, tous deux originaires de Mboula. Dès 1953 ils devront suivre la formation auprès du Pasteur Allemand Walter Trobisch à Tchollire à 400 kilomètres au nord. Le choix du lieu est justifié par Ingrid Trobisch dans son livre En route avec joie du fait que les évangélistes devaient les aider dans l’évangélisation et l’enseignement. En retour Walter Trobisch les formait pour les préparer pour l’école qu’ils allaient y établir. L’accent est encore mis ici sur leur aptitude à communiquer la parole de Dieu. Darman n’y a passé que cette année et a rejoint les candidats de la Mission Norvégienne à Meng pendant les années 1954-1956. La raison était que ce cours était enseigné en français et était mieux structuré et plus complet que celui enseigné en Foufoulde à Tchollire. André Garba, qui n’avait pas fait l’école française, fut contraint d’y rester jusqu’a l’achèvement de ses études en 1956.

A Meng Darman a rencontré les responsables d’églises du pays Dii: Maidawa Thomas et Abdou Daniel; ceux de Yoko: Baba Pierre et Belinga Matthieu; puis ceux du pays Tikar: Houngue Othon et Ngoumbe Zacharie. Il a appris à les aimer et à les connaitre. L’affection qui les liait servirait de fondement pour la création de l’Eglise Evangélique Luthérienne du Cameroun (EELC).

A la fin de sa formation Darman est affecté comme aumônier à l’Hôpital Protestant de Ngaoundéré à cause de sa maîtrise de différentes langues principales. Il réussit à bien s’imposer dans ce milieu et à être le lien tangible des deux missions. Cette même année 1957, il voyage à Marangu au Tanganyika (l’actuelle Tanzanie) avec Houngue Othon, Sindjui Elie–le seul laïc–et Haldan Endresen, pour le premier colloque Luthérien panafricain qui réfléchissait sur la structure des jeunes églises. Tous rejetèrent l’épiscopat comme modèle de leadership à cause du contexte autoritaire des chefferies africaines qui risquerait de corrompre le ministère et de compromettre la croissance des églises.

Affecté à Meiganga, Darman est ordonné pasteur le 24 novembre 1958. Il y passera sept années en train de dynamiser l’ouvre de l’église locale et des villages alentour. Comme dans toute ouvre, ces années seront parsemées d’embûches et d’épreuves. Mais certaines de ces épreuves se transformeront en porte-étendard pour la gloire de Christ. Sa fermeté et sa fidélité dans la foi vont aussi être des marques pour son élévation. Darman a été le bouc émissaire de la transition du leadership des missionnaires aux Camerounais. Le processus n’a pas été facile tant du côté missionnaire que camerounais. De tous côtés des coups bas se multipliaient. Certains aînés de service et des collègues voulaient sa chute parce qu’ils souffraient de voir sa promotion se répéter. Darman raconte qu’il a souffert de ces persécutions plus que de la pratique du ministère.

Voici l’exemple d’un des scénarios qu’il vécut à Meiganga. Les chrétiens Gbaya avaient très vite compris l’enseignement de la responsabilité d’un chrétien quant aux offrandes. Ils donnaient assez chaque dimanche et aussi lors des dons de récolte pour soutenir l’ouvre de Dieu. Ceci était très proche de leurs coûtumes. Mais certains diacres détournaient une partie de cet argent. Quand l’affaire fut amené à la connaissance de Darman, les coupables furent frappés de discipline et écartés de service. Mais au lieu de réfléchir sur leurs actions, ils accusèrent Darman de les avoir exposés à la honte devant l’église. Ils s’entendirent pour tuer ce pasteur qui les avaient déshonorés et exclus du ministère. Ils s’initièrent à la sorcellerie pour pouvoir le tuer. La nuit, ils vinrent pour assommer Darman qui dormait paisiblement mais ils virent que sa maison était toute en flammes et ne se consumait pas. Ils ont vu Darman et les siens et quelqu’un habillé en blanc. Ils ne pouvaient s’approcher de peur de se brûler. Ils revinrent plusieurs fois et c’était la même scène qui se présentait. Une autre fois, lorsqu’ils arrivèrent, ils trouvèrent que la maison était entourée d’eau. Ils y mirent les pieds, voulant s’avancer vers la maison. Mais ils durent vite faire demi tour car cette eau était si froide que leurs pieds gelaient et ils pouvaient mourir de froid. Ils rentrèrent déçus sans avoir atteint leur but. Confus, ils ne savaient plus quoi faire.

Entretemps, ces malfaiteurs qui conspiraient contre le pasteur étaient toujours réguliers aux activités de l’église. Ils parlaient mal du pasteur et ne s’en approchaient pas, voilant ainsi leur plan belliqueux. Ils n’avaient pas du tout désarmé, mais cherchaient à trouver une ouverture pour l’abattre mystiquement. Ayant échoué à le tuer avec la sorcellerie, ils se dirent qu’il avait un fétiche très puissant qui le protégeait. Ils s’entendirent pour s’en approcher afin de le sonder pour prendre son fétiche et le maîtriser après. Ils mandatèrent l’un d’eux pour établir ce contact. Celui-ci alla vers Darman et implora sa pitié et son amitié tout en reconnaissant qu’il était coupable. Darman le reçut chaleureusement, mais avec beaucoup de réserve dans son cour. Ce représentant revint maintes fois auprès du pasteur pleurant son sort et celui de ses amis, expliquant leur déception d’être déshonorés et parlant de leur condition. Ils étaient en train de souffrir, mais ils aimaient encore le pasteur. Il voulait personnellement que le pasteur l’aide. Il était déstabilisé dans sa maison et il avait appris que le pasteur avait un remède puissant qui le protégeait contre les sorciers. Il voulait aussi cette protection. Darman lui rétorqua qu’il était étonné d’entendre une telle parole le concernant car il n’avait rien de pareil. L’homme s’excusa et lui demanda de penser à son besoin. D’ailleurs le propos restait entre eux deux. Il garda un bon contact avec le pasteur pour poursuivre sa négociation. Il revint à plusieurs reprises pour renouveler sa demande. Darman insista chaque fois que sa puissance n’était que sa foi en Jésus-Christ et rien d’autre.

Un soir au coucher du soleil cet homme vint chez Darman. Après avoir brièvement causé avec lui, il lui demanda de l’accompagner sur le chemin parce qu’il avait quelque chose à lui dire. Darman eut peur, pensant peut-être que les autres étaient cachés en brousse et qu’ils voulaient l’assassiner. Il demanda à l’homme de l’attendre à quelques pas de la maison pour qu’il se mette à l’aise et le rejoigne. Il entra dans sa chambre pour préparer sa défense au cas où il y aurait une aggression. Il prit son couteau et le mis sous son aisselle et referma le vêtement. Il demanda à son garçon de les suivre de loin sans se faire voir pour observer ce qui allait se passer et là où il allait. Ensuite il rejoignit l’homme et les deux marchèrent ensemble. A un point donné, l’homme se jeta par terre devant Darman, pleurant et confessant tout ce qu’il avait fait avec ses complices. Il affirmait en même temps qu’il voyait que Dieu était vraiment puissant et protégeait ceux qui croient en lui. Lui et ses complices reconnaissaient leur tort et étaient prêts à confesser devant l’église pour être pardonnés. Darman fut surpris devant cet événement. La confession publique eut lieu à l’église et le témoignage de la victoire de Darman contre la sorcellerie se propagea partout et fit se répandre la prédication de la Bonne Nouvelle. Cet événement renforça la foi de beaucoup de gens et en emmena plusieurs à la foi. La foi de Darman avait ainsi redirigé l’attention du peuple Gbaya vers Dieu.

L’église de Meiganga croissait en nombre et en maturité de la foi à travers l’enseignement. Le bâtiment de culte devint trop petit pour accommoder tous les fidèles les dimanches et les jours de fête. La communauté lança la construction d’une bâtisse digne de nom avec l’appui des missionnaires. Darman supervisait la collecte de l’argent et des matériaux du côté camerounais. Il devait mettre la main à la tache en allant à la carrière et à la briqueterie. En plein travaux il dut partir pour poursuivre ses études à Yaoundé à la Faculté de Théologie Protestante de 1966 à 1969. Darman était si humain qu’il partageait ses faiblesses tout en souriant. Il dit que la première semaine qu’il affronta le Grec, il avait demandé de rentrer car il ne pouvait pas le supporter. Pendant toute une semaine il n’avait pas d’appétit et cherchait même comment fuir– sans trouver d’issue. Il comprit alors pourquoi on disait que les études en faculté était dures.

Ayant obtenu la dérogation du Grec, il continua ses études jusqu’a la fin, tout en se faisant de nouveaux amis. A la fin de ses études à Yaoundé, Dr. Philip Noss, qui avait grandi à la station de Meiganga et dont les parents étaient missionnaires lui trouva une ouverture aux Etats-Unis pour aller enseigner le Sango à l’université de Wisconsin, Madison pendant six mois. Il passa trois autres mois à parler dans les églises au sujet du travail au Cameroun et à enseigner les coûtumes des Gbaya. C’est à ce moment-là qu’il a appris l’anglais qu’il maîtrisait si bien. Beaucoup d’argent fut collecté pour le travail au Cameroun. Homme avisé des retournements locaux, il ne prit jamais un sou avec lui, mais demanda que tout soit envoyé à partir de la direction de la mission. De retour au Cameroun, il engagea la construction de sa maison avec le revenu de son enseignement du Sango mais ses détracteurs d’antan crièrent au scandale, soutenus même par certains missionnaires qui disaient que Darman avait volé l’argent donné pour le travail de l’église pour s’enrichir–il ne travaillait plus pour l’Evangile, mais à ses propres fins ! Bien que l’argent des collectes pour l’ouvre de la construction arriva officiellement et justifia ses comptes, les rumeurs ne cessèrent point. Ses détracteurs complotèrent et firent en sorte qu’il soit affecté loin de chez lui à Poli pour y souffrir. Il y alla avec bonne foi et y resta de 1970 à 1972. Cette étape est importante parce que, pour la deuxième fois, il sortait de sa culture pour ouvrer comme missionnaire chez d’autres peuples. La vie parmi les Doayo lui valut leur sympathie et leur reconnaissance pour le reste de sa vie.

Darman fut réaffecté à Meiganga en 1972 au Centre de Traduction Gbaya pour s’occuper de la traduction de la Bible en sa langue. Il y a travaillé avec Dr. Noss jusqu’a sa brillante élection inattendue en 1977 comme président de l’EELC.

L’homme d’Eglise

Quelques années auparavant, en 1960, pendant l’assemblée constitutive de l’Eglise Evangélique Luthérienne du Cameroun (EELC) Paul Darman et Houngue Othon avaient été retenus comme candidats camerounais à la présidence de l Eglise naissante. Au résultat des élections, Haldan Endresen, un Norvégien, remporta le scrutin et Darman fut élu vice-président. Ensuite, au synode de 1962, Darman fut élu président. Il exerça ces fonctions cumulativement avec son ministère pastoral à Meiganga. Mais à cause de la présence missionnaire massive la constitution n’était pas encore favorable à ce qu’un indigène exerce tant d’influence sur les concessions qui appartenaient encore aux missionnaires. Darman a toujours affirmé très haut que ce premier mandat n’était qu’un temps d’apprentissage vu que les missionnaires avaient encore leurs mains sur tout. Il écourta ce mandat comme président pour aller en faculté à Yaoundé comme nous l’avons vu ci-dessus.

En 1977 par la force des choses et à la demande de son ami Dadi Gaston, Darman est allé l’aider à faire sa campagne parmi son peuple Gbaya car Dadi Gaston voulait se faire élire président au synode de Beka. Quelques heures avant les élections, Darman eut une discussion très chaude sur les contributions des districts à la caisse générale de l’EELC. Quand les églises contribuaient un certain montant elles avaient droit à des délégués votants. Les districts Gbaya, étant autonomes financièrement, avaient juste assez d’argent pour subvenir à leurs besoins mais pas assez pour contribuer la somme nécessaire à la caisse générale pour avoir un nombre représentatif de délégués votants. Le bureau du synode appliqua la constitution et demanda que les délégués des églises qui n’avaient pas payé le montant requis sortent, leur refusant ainsi le droit de représentation. Ceux qui décidaient ainsi étaient du côté norvégien où les districts recevaient une subvention suffisante pour payer aussi les contributions à la caisse générale. Les Gbaya étaient profondément blessés et Darman se leva comme porte-parole, annonçant qu’ils étaient pauvres et qu’ils s’en allaient, laissant les riches avec l’église qui avait de l’argent. Après ces paroles tous les Gbaya sortirent. Il fallut parlementer pour qu’il y ait réconciliation. Les Gbaya constituaient plus de la moitie des membres de toute l’EELC et ils comprirent qu’ils avaient besoin d’un représentant qui était un des leurs pour protéger leurs intérêts. À l’heure du vote les Gbaya présentèrent la candidature de Darman. Dès le premier tour, Darman, qui n’était pas délégué, fut plébiscité président à la grande surprise de son ami qui l’avait emmené. L’aura de Darman rayonna à nouveau avec merveille.

Quand on observe ses actions comme président pendant deux mandats entre 1977 et 1985, l’on découvre deux idées maîtresses qui se complètent: le partenariat entre les organismes et associations d’église et la formation des structures et des personnes. Il est vrai le partenariat existait déjà dans le cadre des missions fondatrices avec des organisations avec lesquelles elles collaboraient. Darman fit en sorte qu’il y ait une collaboration avec l’EELC, poursuivant le travail que son prédécesseur Joseph Medoukan avait commencé. Le partenariat fonctionne dans son vrai sens avec la Fédération Luthérienne Mondiale (FLM) basée à Genève, en Suisse, ainsi qu’avec la Fédération des Eglises et Missions Evangéliques du Cameroun (FEMEC)–aujourd’hui Conseil des Eglises Protestantes du Cameroun (CEPCA 2005).

Son souci de renforcer le partenariat et de planifier des projets pour l’EELC a amené Darman à voyager tant en France qu’en Norvège et aux Etats-Unis d’Amérique chez les partenaires. Mais son cadre privilégié a été la FLM avec qui il a resserré les liens pour donner l’identité à l’EELC qui semblait être la propriété des missions. Il a fait entendre plusieurs fois très haut que cette plateforme permettait l’égalité entre les camerounais, les missionnaires et les responsables des églises de leurs pays. Dans les rencontres de la FLM, tous les délégués étaient sur le même pied d’égalité. La FLM servait de ferment pour la décolonisation des indigènes des champs de mission, tout en leur reconnaissant leur dignité et leur autorité à égalité avec leurs collègues d’Europe et d’Amérique du Nord. C’est ainsi qu’il a conduit plusieurs délégations de l’EELC à des colloques internationaux comme, par exemple, la sixième Assemblée Générale de la FLM tenue en Tanzanie, où il fut élu membre du Comité de Développement Social (CDS). Pour la première fois quelqu’un de l’EELC accédait à un tel poste–un poste que Darman a gardé jusqu’en 1984.

Au sein de ce comité, Darman a eu la possibilité de poursuivre encore des études. Il a passé six mois au Centre Ocuménique de Bossey en Suisse en 1980. Quelques années après, il est allé perfectionner son anglais à Londres en compagnie de son épouse Jacqueline. C’est le seul voyage qu’il a fait avec elle à l’étranger pendant sa carrière. Il a voyagé en Argentine en avril 1983 pour affirmer la foi et l’identité des chrétiens camerounais. Il a toujours témoigné que chaque voyage l’avait enrichi et stimulé à plus de créativité pour l’émancipation de l’EELC. En juillet et août 1984, il conduisit pour la deuxième fois la délégation de l’EELC à l’Assemblée Générale de la FLM. Celle-ci, qui eut lieu à Budapest, en Hongrie, était la septième Assemblée Générale. A ce moment-là Darman avait acquis la maturité de leadership et jouissait du respect de ses pairs dirigeants d’églises, et des responsables des missions et des organisations. Sur place au Cameroun, les missionnaires de la jeune génération accouraient pour des conseils, à l’exception des insubordonnés qui ne manquent pas dans toute association.

Darman fut membre fondateur du Ministère Chrétien Commun en Afrique Occidentale (MICCAO) établi vers 1980 pour servir et faciliter l’évangélisation des Peuls clairsemés dans cette région. Il a été reconnu comme un des piliers de cette ouvre pendant tout son ministère puisqu’il vivait au milieu de ce peuple qu’il comprenait. De ce fait, la présidence de l’organisation lui avait été échue. Il est resté président de cet organisme jusqu’à sa démission en 1996 quand les forces commençaient à lui manquer et il ne supportait plus les longs voyages. Il avait une passion pour nouer des relations avec des Peuls et pour leur venir en aide tout en partageant sa foi. Il demandait toujours s’il y a avait quelque chose qu’il pouvait faire pour eux. Il avait de bonnes histoires de ses relations avec les Peuls sédentaires et nomades.

Lorsque Darman fut élu président de l’EELC en 1977, le paysage politique du Cameroun était entaché de violations flagrantes de la liberté religieuse des chrétiens dans la province du nord. Pour asseoir leur hégémonie et soutenir le président de la République, Ahmadou Ahidjo, originaire de cette région et musulman comme eux, les administrateurs musulmans islamisaient et persécutaient les chrétiens de plusieurs façons. Ils exerçaient une pression sociale pour leur promotion dans le but de convertir les chrétiens à l’Islam. Ils avaient déclaré des restrictions sur les permis de concession et de construction des édifices chrétiens, et sur l’autorisation de tenir des campagnes d’évangélisation. Pire, ils s’étaient engagés à détruire des édifices construits en dur et à brûler ceux en matériaux locaux. Bon nombre des catéchistes étaient battus et emprisonnés par des chefs locaux représentants du grand lamido [2] Baba Rey. Beaucoup de chrétiens étaient menacés de déportation parce que ce territoire ne leur appartenaient pas et leurs biens étaient confisqués. Ces exactions étaient répétées dans l’actuel département du Mayo-Rey où, depuis la bénédiction des pouvoirs coloniaux, le royaume et l’administration républicaine représentent deux modes de gouvernement parallèles, parfois en contradiction l’un avec l’autre. De part et d’autre, on abusait des droits fondamentaux de la Charte des Nations Unies sans nulle crainte.

Darman fit une tournée dans cette région et documenta toutes les exactions, transmettant ces informations ensuite aux missions partenaires et à la FEMEC. Des protestations s’élevèrent et le président Ahidjo finit par garantir la liberté religieuse aux chrétiens à égalité avec les musulmans. En bon berger Darman avait ainsi lutté pour l’épanouissement de la vie spirituelle et civique de ses brebis. A cette époque c’était un grand risque que de critiquer la politique du président de la république ou du lamido Baba Rey. Quiconque se hasardait à le faire risquait le pire. Darman se sacrifia sachant qu’il tirait sa vie du Seigneur maître de toute vie.

Darman avait aussi orienté son ouvre sur la maturation des églises locales par le biais de la formation de ses responsables. L’EELC ne pouvait grandir que si les responsables étaient bien éduqués-au delà du niveau limité que les missionnaires leur avaient donné. Il a toujours regretté de ne plus être jeune pour chercher à s’éduquer. Il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour viabiliser les instituts de formation biblique et théologique afin d’assurer une bonne formation des pasteurs, catéchistes, et laïcs. Il a privilégié la disposition du personnel missionnaire dans ces institutions et les subventions pour la bourse aux étudiants. Il pleurait en lui de voir les jeunes de son église être formés comme ceux du sud ou des autres pays africains–parce que leur génération avait connu du retard dû à la politique missionnaire de former des domestiques obéissants qui ne posent aucune question. Lui ne voulait plus de ce genre d’éducation pour les jeunes.

Darman a accéléré le développement socio-économique et culturel des peuples où l’EELC travaille, soutenant vigoureusement les projets de bien-être. Il s’est battu à maintenir les écoles sans les transférer à l’état. L’expansion du collège protestant a eu lieu à cette époque ainsi que la croissance de subventions de l’état. L’hôpital de Ngaoundéré a été agrandi avec plusieurs services et l’ouvre de santé a connu une extension. Il a poussé Njikam Jonas et Yadji Matthieu à devenir les premiers médecins camerounais en soutenant leurs dossiers. L’ouvre agricole a connu son apogée à cette période en opérant la transformation des mentalités, des modes de vie des chrétiens, et des autres tout en améliorant leur pouvoir d’achat. Cette poussée économique a permis aux paysans de mieux manger, de se vêtir, de payer leurs frais médicaux, de soutenir leurs enfants à l’école, d’améliorer l’habitat, et de payer régulièrement leurs impôts.

C’est à cette période que des chapelles construites en pierre rouge ont poussé dans les villages Gbaya comme des champignons. Le visiteur averti pourrait immédiatement penser au paysage de l’Europe médiévale où l’église ou la cathédrale dominent la vie publique. Ces bâtisses ont été construites grâce à la traduction de la Bible en langues locales qui a pris un grand essor. La valorisation de la culture locale dans la liturgie à travers les instruments, gestes, danses, et joie africaine ont été incorporées. Darman esquissait souvent le premier pas de danse pour encourager les réticents. Il prenait même les plateaux de nourriture et les portait pour motiver les femmes. Par ces pratiques les chrétiens ont approprié le message globalement dans leur environnement. La vie et la joie communiquées par la présence du Seigneur dans les vies humaines a poussé les chrétiens à soutenir financièrement les églises locales ainsi que les synodes locales et régionales. C’est à cette époque que les offrandes et les dons de récolte ont pris leur vitalité pour atteindre des centaines de milliers de francs CFA et même le million ailleurs.

Darman a pesé de tout son poids pour soutenir le développement des mouvements de base qui traduisent la vie de l’église locale. Il a favorisé la dynamisation et l’expansion des Femmes Pour Christ, de la Jeunesse de l’EELC, et de l’école du dimanche. Des séminaires de formation des responsables ont été organisés dans toutes les structures de l’EELC pour imprégner toutes les couches de chrétiens. Pour mieux les gérer, les directions de ces mouvements étaient organisées et centralisées au siège à Ngaoundéré. Les responsables ont été bien formés et ont bénéficié de voyages d’échange nationaux et internationaux.

Darman, ancien évangéliste de terrain, a gardé comme son appel d’apporter la Bonne Nouvelle aux non chrétiens tant dans les zones rurales qu’urbaines. Il a soutenu ce travail d’évangélisation et des campagnes ont été menées dans la plaine Peere à Gadjiwan, chez les Doayo et Koma à Poli. Il a toujours poussé son propre peuple à aller dans les recoins du pays Gbaya chercher les derniers à venir à Christ. C’est lui qui a amorcé le ministère urbain à Yaoundé et à Bertoua. Il a tout déployé pour soutenir l’aumônerie universitaire à Ngaoundéré.

L’homme de Dieu en société

Paul Darman, natif de Mboula, n’a pas exercé ses responsabilités sociales dans cette localité. Péripaticien comme son patronyme Paul, il s’est beaucoup sacrifié pour la cause de l’Evangile. Lui et sa première épouse ont perdu leur premier enfant quand Darman était à l’école biblique de Baboua. L’enfant mourut entre les mains de sa mère seule dans un véhicule quelques kilomètres après Beka sur la direction de Garoua-Boulai, alors que Darman était à Baboua. Après cet enfant ils ont eu Jean-Marc Darman, le seul survivant de ce premier mariage. Quelques années après, sa femme mourut aussi et Darman se remaria à Adama Jacqueline, une princesse de Meiganga, soeur des deux défunts lamibe. Musulmane d’origine, elle s’est convertie à Jésus-Christ par amour pour son mari. Dieu les a bénis avec huit enfants-quatre garçons et quatre filles: Amina Corinne, Adjimi Catherine, Mama, Théodore, Betsy, Luther, Moussa et Toué. La mort a ravi Théodore, Betsy et Mama du vivant de Darman. Mais c’était un homme patient et humble qui s’est remis au Seigneur. Malgré tous ces coups durs, il a gardé son calme et sa joie, remerciant le Seigneur de tout ce qui lui arrivait. Toué est mort en août 2007, laissant ainsi quatre survivants à la lignée de son père.

Darman était un visionnaire dans la gestion de sa propre vie. Il s’est taillé très tôt un lopin de terre à la frange ouest de la station de Meiganga qui pouvait accommoder toute sa famille. C’est là qu’il s’était construit une maison imposante avec ses honoraires de l’enseignement du Sango aux Etats-Unis. Il s’est aussi acquis plusieurs hectares de terre fertile au bord de la rivière Gbakoungue derrière le Lycée classique. Il y a cultivé du manioc, de la patate, des arachides, des légumes, des pommes de terre, du maïs, et des bananiers. Il a partagé ses produits avec les passants et les connaissances. Il a ramené de nouvelles variétés de bananiers de ses différents voyages. De l’Argentine, il ramena une variété de maïs rouge dont il donnait un épi à tout bon cultivateur qui lui rendait visite pour l’encourager à améliorer la qualité de sa production. Malgré la pauvreté et les pressions, il n’a jamais voulu vendre un recoin de son terrain. Pendant la pose des lignes électriques après 1990, ce terrain fut tellement endommagé par les travaux que l’on conseilla à Darman de poursuivre le gouvernement en justice–ce qu’il fit avec hâte, espérant gagner les retombées aussitôt. Malheureusement, la compensation n’a été payée que quelques mois après sa mort en avril 2001. La somme versée est supposée valoir plus de 20.000 euros. Il se repose en paix ayant eu plus que cette somme de son Sauveur.

Darman, membre des premières élites Gbaya, n’a jamais cherché une position politique. En 1989, il fut honoré en reconnaissance de sa contribution au développement par le gouvernement avec la médaille “Le Mérite Camerounais.”

Impact de sa foi

Darman a confessé Jésus-Christ le fils de Dieu comme son Sauveur et Seigneur. Il a trouvé en lui le roc sur qui il fondait son existence. Le Saint-Esprit l’a renouvelé et doté de dons spirituels pour accomplir un ministère digne d’un serviteur de Dieu. Mais d’une manière fervente, il est resté à l’écoute de Dieu dans sa prière et lecture journalières de la Bible. De cette activité constante, il puisait de la substance spirituelle pour partager son expérience et encourager les autres. Cette appropriation personnelle du salut imbu de l’appel de prêcher l’amour de Dieu en Jésus-Christ l’a emmené à se désolidariser des coûtumes anti-évangéliques de son peuple ainsi que de leurs influences.

Beaucoup des membres de sa famille sont morts avant lui : sa première épouse et ses cinq enfants qu’il a enterrés lui-même. Il trouvait tout son réconfort en Jésus à l’instar des autres qui accouraient aux fétiches et à la tradition. Devant l’adversité des menaces de ses concitoyens de l’église de Meiganga, il n’a pas fléchi ses genoux dans les pratiques occultes. Il n’y a pas eu d’accusations fondées de pratiques fétichistes ou magiques contre lui comme cela a été le cas quelques années après lui avec certains dirigeants.

Humble et honnête, Darman a mené une vie de service. Il a voulu emmener tout le monde à la connaissance de Jésus-Christ qui transforme la vie et les moeurs. Pour lui servir, c’était rassembler dans l’église tous ceux qui avaient connu Jésus-Christ. Ce faisant, il inculquait la réalité de la nouvelle communauté de ceux qui communiquent la Bonne Nouvelle et approfondissent l’étude de ce message. C’était un grand éducateur des consciences par ses paroles et par sa vie.

Darman a mené une vie modeste du point de vue matériel. Par cette discipline propre, il a protégé les biens acquis de l’EELC. Cette modestie traduisait sa morale pour sa foi, son ministère, et sa collaboration. Honnête et vertueux, il refusait toute tentation d’agir par cupidité en sa faveur, pour sa famille ou pour son peuple Gbaya. Il a choisi la pauvreté évangélique à l’exemple des apôtres. Ses détracteurs ont utilisé ce fait comme argument principal contre l’amendement de la constitution de l’EELC pour sa réélection à un troisième mandat en 1985 à Tchollire en disant que Darman empêchait la prospérité de son peuple. Mais ceux, au contraire, qui “se servent” ainsi ont ouvert la porte à la malhonnêteté, le népotisme, le tribalisme, l’immoralité sexuelle et l’ivrognerie-vices qui ne figuraient pas jadis dans le qualificatif de l’EELC. Malheureusement, ce sont aujourd’hui des maux incontournables quand on évoque la vie de l’église quelques années après sa retraite et sa mort.

Darman était un homme de Dieu réfléchi et sage avec un cour plein d’amour et de pardon. Il s’est sacrifié pour planter des dizaines d’églises qui aujourd’hui regorgent de plusieurs milliers de membres. Il a eu un impact spirituel dont personne ne peut douter même si la pratique de sa “pauvreté évangélique” est moins suivie. Comme Moïse il a été une voix qui rappelait à son peuple la responsabilité de la grâce de Dieu. Très peu de dirigeants veulent suivre son exemple et servir comme prophète dans leur patrie. Au contraire, plusieurs se retournent pour instiguer le tribalisme et le régionalisme contre des frères et soeurs qui sont envoyés par le Seigneur.

Darman a aussi légué son héritage spirituel à des enfants dans la foi comme l’auteur de cet article et d’autres qui porteront très haut ce flambeau à jamais sans risque de le trahir. Le sacrifice pour l’ouvre de Dieu portera toujours des fruits pour l’amour de tous dans l’honnêteté.

Robert Adamou Pindzié


Notes:

  1. Christiansen, p.230. Traduction et paraphrase par l’auteur.

  2. Terme adopté dans le français camerounais qui signifie “chef.” Le pluriel est lamibe.

  3. Photo du livre de Lode. Photograph: John Olav Dankel.

Bibliographie

Kare Lode, Appelés à la liberté, Histoire de l’Eglise Evangélique Luthérienne du Cameroun (Amstelveen : Improcep éditions, 1990).

Erik Larsen, Kamerun Norsk Misjon Gjonnom 50 Ar (Stavanger: Nomi Forlag, 1973).

Ruth Christiansen, For the Heart of Africa (Minneapolis: Augsburg Publishing House, 1956).

Jap Van Slageren, Histoire de l’Eglise au Cameroun (Yaoundé: Editions Clé, 1972).

Ingrid Trobisch, En route avec joie (Baden-Baden: Editions Trobisch, 1977).

Eldrige Mohammadou, Traditions historiques des peuples du Cameroun Central, Vol. 1, Mbere et Mboum Tikar (Japon : ILCAA, 1990).

Thomas Christensen, La symbolique du salut à travers l’arbre Sore chez les Gbaya: pour l’inculturation de l’Evangile en milieu africain (Yaoundé, Editions CLE, 1998).

Darman, Paul, source orale, pour l’avoir connu comme père spirituel depuis 1982-1999.

Darman, Jacqueline, source orale, maman spirituelle jusqu’aujourd’hui.

Yalla André, source orale–je l’ai connu comme évangéliste travaillant dans la région Mbere et le district de Meiganga, jusqu’en 1985.

Zaoro Pierre et son épouse, Gbaé Pauline, instituteur de l’École Privée Protestante Meiganga 1967-1969 et 1979-1984, interviews en janvier 2004 et juillet 2006.

Les archives de l’EELC.

Les rapports et documents de la FLM.


Cet article, reçu en 2008, est le produit des recherches du Révérend Robert Adamou Pindzié. Celui-ci est professeur à la Faculté de Théologie Evangélique du Cameroun à Yaoundé et récipiendaire de la bourse du Projet Luc en 2007-2008.