Collection DIBICA Classique

Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.

Yira, Jokébed

1920
Église du Christ au Congo (Ceca)
République Démocratique du Congo

Yira naquit en 1920 de Monsieur Aluma et de la maman Mandru, tous les deux païens. La mère de Yira était la troisième femme de Monsieur Aluma. Le nom Yira lui fut donné par sa mère car les gens parlaient beaucoup d’elle. Lorsqu’elle commettait une petite faute dans la vie sociale les gens dramatisaient toujours la chose dans le but de la dénigrer. Ce nom tire son origine de l’expression Yidra Kulia en langue kikakwa, qui veut dire littéralement “revenir encore et encore sur une chose déjà passée.”

Yira avait un frère et trois sœurs. Elle grandit à Adi pendant le système de Zeriba. Selon ce système les missionnaires occidentaux à la station missionnaire d’African Inland Mission à Adi avaient organisé une sorte d’internat pour héberger et encadrer moralement et spirituellement les jeunes filles du milieu jusqu’à ce qu’elles trouvent un mari.

Yira ne fit que trois ans d’école primaire. Elle parle couramment le kiswahili, le kikakwa, le kilugbara, et le lingala.

Yira crut en Jésus-Christ quand elle était dans le Zeriba. Elle fut baptisée à Adi en 1934 à l’âge de quatorze ans. A l’occasion du baptême elle choisit le nom Jokébed, se rappelant la mère de Moise dans Exode 6 v. 20.

Yira épousa monsieur Yosefa Yuga lorsqu’elle eut dix-huit ans et ils eurent un garçon. Yosefa était un chrétien fervent de l’église protestante créée par African Inland Mission. Malheureusement la foudre le tua en 1942. La famille décida de remarier Yira à monsieur Aliga, cousin de son défunt mari. Celui-ci était un païen et un grand soûlard. Avec son deuxième mari, Yira donna le jour à une fille et quatre garçons.

Malgré la méconduite de son mari, Yira était très fervente dans les activités de l’église. Elle devint diaconesse et servit le Seigneur jusqu’en 1965. En 1966, elle et toute sa famille s’enfuirent en Ouganda car la rébellion muléliste menaçait la population au Congo. Ils s’installèrent à Gwara/Karuma sur la route de Gulu (Ouganda) où Yira et ses quatre enfants commencèrent une cellule de prière dans leur maison. Petit à petit, celle-ci devint une chapelle appelée Awu qui adhéra bientôt à l’Église Anglicane de l’Ouganda. Le mari de Yira n’était toujours pas baptisé, bien que participant activement aux activités de l’église. La chapelle Awu devint une sous-paroisse et Yira fut désignée comme responsable, autrement dit, son évangéliste. Elle dirigea la sous-paroisse jusqu’en 1976 quand la paroisse de Kryandongo, dont la sous-paroisse Awu faisait partie, envoya un nouvel évangéliste et désigna Yira comme conseillère.

En 1980, Yira et sa famille rentrèrent dans leur pays d’origine, la République Démocratique du Congo.

Bien que courbée par l’age, Yira continue à travailler au champ et à faire certains travaux domestiques. Elle continue également à utiliser son don de chanteuse dans l’église. Elle fait membre du groupe “Saba-Saba,” un groupe qui chante par cœur les cantiques religieux en langue kikakwa lors de grandes manifestations religieuses dans la région (2005).

Pendant toute sa vie Yira a toujours aimé la Bible, la prière, et surtout les chants. Beaucoup de chrétiens actuels témoignent qu’ils furent convertis par elle. C’est le cas par exemple de Révérend Tabani Yosia de la Communauté Évangélique au Centre de l’Afrique, section Adi. Yira continue également à être une bonne conseillère de femmes récemment mariées.

Yossa Way


Sources:

Jesse Leeku, fils de Yira, interview du 2 janvier 2005 à Aru.

Yira Yokabedi, interview.


Cet article, reçu en 2005, est le produit des recherches du Révérend Yossa Way. Celui-ci est professeur de théologie à l’Institut Supérieur Théologique Anglican (Bunia/Aru, Rép. Dém. du Congo) et récipiendaire de la bourse du Projet Luc.