Collection DIBICA Classique
Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.Cowan, William Dean
William Deans Cowan n’a fait qu’un seul séjour comme missionnaire de la London Missionary Society (LMS) (Société missionnaire protestante de Londres) à Madagascar. Pourtant, soixante-dix ans plus tard, un des jeunes Malgaches qu’il avait eu comme pensionnaire et qui était devenu chef de sa région, se souvenait de lui avec gratitude et un siècle plus tard, il y eut un regain d’intérêt pour ses recherches scientifiques.
La variété de ses fonctions, remplies avec une totale abnégation, qu’on les qualifiât de “religieuses” ou de “laïques”, bien que lui-même ne fit pas de telles différences, et l’intensité de son dévouement pour Madagascar et les Malgaches, donnent un bon exemple de ce qu’était la vie de beaucoup de missionnaires protestants durant le dernier quart du XIXè siècle, quelle qu’ait été la société à laquelle ils appartenaient.
Né près d’Édimbourg en Écosse le 21 juin 1844, Cowan fit ses études au Western College de Bristol et fut envoyé par la LMS à Fianarantsoa où il arriva en 1874. Son travail de missionnaire pendant les sept années suivantes peut se ramener à de grandes rubriques: en premier lieu, église et district, selon l’usage de la LMS de l’époque. Cowan avait la responsabilité d’une église-mère dans un grand centre, en même temps que celle de toutes les autres églises et écoles du “district” afférent. Il avait, quant à lui, la charge de deux grosses paroisses de Fianarantsoa: Ivohidahy et Antranobiriky; et les districts du Lalangina et de l’Isandra, soit une cinquantaine d’églises et à peu près autant d’écoles. Il avait évidemment des collègues malgaches solides comme auxiliaires, même s’ils n’étaient pas encore parfaitement formés. En second lieu, il devait diriger la construction de certains bâtiments importants. En troisième lieu, il devait veiller à la formation des futurs dirigeants malgaches. Il eut été prématuré de fonder une véritable école de théologie, mais il organisa un cours pour des groupes d’hommes, connus sous le nom de “prédicateurs”, dont l’importance fut grande après le mouvement de masse vers l’Église que provoqua la conversion de la reine de Tananarive, Ranavalona II, en 1869. Ayant en vue le progrès dans les provinces voisines, Cowan invita à son pensionnat les fils des chefs de ces zones, en escomptant qu’ensuite, retournés chez eux, ils auraient une bonne influence sur leur entourage. De son côté, Mme Cowan apprenait la couture aux filles.
En 1877, Cowan fonda une “Union chrétienne de Jeunes Gens” (YMCA), semblable à celle existant déjà à la capitale, dont les objectifs étaient l’évangélisation avec tout ce que cela pouvait à l’époque impliquer d’enseignement, d’instruction et de transformation du genre de vie. Il s’agissait aussi d’intéresser les jeunes gens aux sciences naturelles et à la géologie élémentaire, enseignées sur le terrain. Du matériel de laboratoire pour la chimie, un microscope (envoyé d’Angleterre) étaient mis à leur disposition. Cowan commença à constituer une bibliothèque en anglais et en malgache. Les membres de l’Union avaient une réunion chaque samedi matin et l’on y lisait des exposés sur des sujets variés, de préférence ayant un rapport avec ce qui les touchait de près: produits du Betsiléo, l’histoire, le folklore, etc. Enfin, Cowan avait aussi un travail médical, car, après le départ pour la capitale du Dr G. W. Parker, médecin de la LMS, il fut responsable du dispensaire, au début avec l’aide de deux, puis de six jeunes Malgaches, infirmiers en cours d’études. En cinq ans, ils donnèrent des soins à 12 000 patients.
Les occupations quotidiennes du missionnaire comportaient par exemple: à 7 h du matin, enseignement aux prédicateurs, trois jours par semaine; à 8 h, enseignement au quartier du Gouverneur; de 9h à 11h ou 12h, dispensaire, puis visite des malades à domicile, avec souvent de longues conversations, ce qui le rendit familier à de nombreuses personnes de la région de Fianarantsoa. L’après-midi, il faisait d’autres cours; pendant les fins de semaine, il visitait les églises. Un emploi du temps aussi chargé ne doit pas être considéré comme le désir de tout faire par soi-même ou presque, mais c’était pour répondre à des besoins urgents de l’Église. A travers toute cette activité, Cowan voulait mettre en pratique une orientation qu’il est important de souligner: au sujet de ses collègues malgaches chargés de paroisses il écrivait: “Nous pensons que plus on fait confiance à ces hommes pour leur ministère, mieux leur travail est fait, ma règle étant de ne rien faire que mes pasteurs ou mes diacres puissent faire eux-mêmes.” Voici aussi un conseil qu’il aimait à donner: “Rappelez-vous que je suis ici seulement pour vous aider à faire ce que vous ne pouvez faire par vous-mêmes. Réfléchissez-y et dites-moi ce que vous avez décidé.”
Il écrivait de même au sujet des Unionistes: “Les jeunes gens doivent rechercher et se battre pour des idées qui leurs soient propres, indépendamment de la Mission et de ses publications, plutôt qu’en être de simples échos.”
En tant que missionnaire, Cowan voyagea beaucoup. Ses déplacements les plus importants le conduisirent, entre autres, à Ambohimanga du Sud, en compagnie de son collègue Rowlands, à Ihosy, sur la côte sud-est où il vit le fameux “éléphant de pierre, vatolambo”, et dans une région au sud-est de Fianarantsoa où des chefs l’avaient invité comme médiateur.
En 1881, Cowan retourna en Angleterre en congé et démissionna de la LMS l’année suivante. Il retourna pourtant à Madagascar pendant environ deux ans, associé semble-t-il, à d’autres Britanniques pour une affaire commerciale qui tourna court. De retour en Angleterre, il devint anglican et poursuivit son activité ecclésiastique jusqu’à sa mort en 1923.
Il continua à s’intéresser aux Missions, à Madagascar et ailleurs, et fut l’un des responsables à ce titre de la Society for the Propagation of the Gospel (SPG) (Société missionnaire de l’Eglise anglicane).
Par les conditions de son travail et surtout par ses grands voyages, Cowan eut l’occasion de manifester son esprit scientifique et il a publié de nombreuses notes sur la géographie, sur des groupes ethniques importants comme les Tanala et les Bara; également sur les oiseaux, les fougères et les lépidoptères. Ce qui lui valut d’être membre de la Royal Geographical Society. Ses collections de papillons sont conservées à Édimbourg et à Londres.
J. T. Hardyman, L. Molet
Publications:
“The Stone Elephant at Ambohisary”. Antananarivo Annual, 1878.
“On Lepidoptera”. Annals and Magazine of Natural History, 1878, 1880. The Bara Land, 1881.
The Tanala Country and People, 1881.
List of Madagascar Birds … 1881.
List of Ferns and other Cryptogams. 1881.
“Geographical Excursions”. Proceedings of the Royal Geographical Society, 1882.
Cet article, réimprîmé ici avec permission, est tiré d’Hommes et Destins: Dictionnaire biographique d’Outre-Mer, tome 3, publié en 1977 par l’Académie des Sciences d’Outre-Mer (15, rue la Pérouse, 75116 Paris, France). Tous droits réservés.