Collection DIBICA Classique
Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.Finaz, Marc
Né à Saint-Chamond, dans le département de la Loire le 9 février 1815, Marc Finaz fit ses études à Fribourg en Suisse et entra au noviciat de la Compagnie de Jésus à Avignon le 17 septembre 1835.
Ses années de formation religieuse achevées, ses supérieurs l’envoient à l’orphelinat de Ben-Aknoun, en Algérie; mais il rêve, lui, de mission lointaine de la Chine. En novembre 1845, il a la joie d’apprendre qu’il a été désigné pour Madagascar.
Il s’embarque à Toulon, en compagnie du P. Jouen, en mars 1846, et arrive à Saint Denis de la Réunion le 4 juin suivant. Le 17 juillet 1846 nous le retrouvons à Tafondro, dans l’îIe de Nosy Be. Mais déjà l’ardeur de son zèle le pousse à parcourir l’île, et il visite les différentes chrétientés existantes: Fasena, Ampirena, etc. Il lui arrive même d’étendre ses randonnées jusqu’à Nosy Faly, où il est le premier prêtre catholique à s’y rendre.
Le 22 décembre 1850, Pie IX le nomme, en remplacement du P. Joseph Webber, préfet apostolique des “Petites Iles,” comme l’on disait alors, à savoir Sainte-Marie, Nosy Be, les Comores.
Mais en avril 1855, alors qu’il est de passage à Bourbon (La Réunion), une occasion inattendue lui est offerte d’aller à Tananarive. Un traitant de Maurice M. Lambert a reçu de Ranavalona I l’autorisation de venir lui rendre visite. Se cachant sous le nom de sa mère, Hervier, le P. Finaz se joindra à lui et pourra s’entretenir avec le Prince Rakoto qui déjà est en relation épistolaire avec les Jésuites de Bourbon.
Très rapidement une amitié, qui ne devait jamais se démentir, lia le P. Finaz et le futur Radama II. C’est ainsi que, pour répondre au désir exprimé par ce dernier d’assister à la prière des catholiques, le Père célébra dans le plus grand secret, le dimanche 8 juillet 1855, la première messe à Tananarive.
M. M. Hervier joignait à des connaissances techniques encore peu répandues à cette époque, une ingéniosité et une habileté manuelle peu communes. Elles lui permirent, avec les matériaux qu’il trouva sur place, de construire un télégraphe Morse et un télégraphe à cadran, des montgolfières et surtout un chemin de fer en modèle réduit, dont la locomotive à vapeur fit l’émerveillement de tous ceux qui la virent marcher … bien que, paraît-il, elle ne put jamais avancer autrement qu’à reculons!
Pourtant, en juillet 1857, à la suite d’un complot ourdi contre Ranavalona II il dût quitter Tananarive, ainsi que les huit Européens alors présents dans la ville.
Il reprend sa charge de Préfet Apostolique des Petites Iles, mais cette fonction lui pèse. Une maladie des yeux lui rend pénible la lecture et la correspondance. De plus, il est davantage l’homme des relations cordiales, “en état de rester toute une journée à écouter les autres parler sans paraître s’ennuyer,” que l’organisateur prévoyant et méthodique. Or, lorsqu’en octobre-novembre 1861 à la suite de l’autorisation qu’il a officiellement donnée de prêcher le christianisme dans son royaume, Radama II voit arriver les missionnaires, il s’étonne de ne pas retrouver son ami M. Hervier. Le Père Finaz est remplacé dans ses fonctions de Préfet Apostolique des Petites Iles, et arrive à Tananarive en mai 1862.
Le roi lui facilite l’acquisition d’un terrain situé dans le quartier d’Ambohimitsimbina, le plus élevé de la ville, où il vient lui-même d’ériger ce qu’il appelle le Palais de l’Académie. La seconde église catholique de Tananarive y est construite, et le P. Finaz en est le premier titulaire.
Mais il n’est pas homme à se confiner, sédentaire, dans un poste, surtout dans un poste d’ où la vue s’étend sur un vaste panorama qui invite à aller de découverte en découverte. Le Père Finaz part, lui, de fondation en fondation. “L’ordinaire conquérant des nouveaux postes, a écrit le P. Suau (La France à Madagascar, p. 143), était le P. Finaz qu’aucune lenteur ne lassait, qu’aucune rouerie ne trompait.”
Après l’Imerina, le Betsileo s’ouvre au catholicisme. Celui qui avait été le premier prêtre venu à Tananarive, fut aussi le premier à connaître Fianarantsoa. Il y arrive le 5 octobre 1871 et célèbre la première messe en public le dimanche suivant, le 8 octobre. Dès qu’il eut reçu l’aide de compagnons, il reprit ses randonnées dans les campagnes, et au cours de l’année 1872 il fondait les postes d’Ikanjasoa, Alakamisi-Ambohimaha, Fanjakana et Ambohimandroso.
En 1874, ses supérieurs le nomment à Ambohimanga, la ville sainte de l’Imerina, où il reste trois ans, puis à Imerinandroso en 1878 et l’année suivante à Ambohidratrimo. Mais tant de voyages et de courses l’ont usé avant l’âge. Il meurt à Tananarive le 22 décembre 1880, après avoir passé les derniers mois de sa vie dans une chambre d’infirmerie.
Fidèle à consigner ses souvenirs par écrit, souvent au jour le jour, il a laissé de nombreuses notes qui sont un recueil d’anecdotes particulièrement intéressantes pour connaître l’atmosphère de l’époque dans laquelle il a vécu. Plusieurs ont été publiés dans les Lettres de Vals et Les Missions Catholiques des années 1870-1880.
Bernard Blot
Bibliographie
Adrien Boudou, Les Jésuites à Madagascar au XIXe siècle; La Mission de Tananarive; Les Lettres de Vals; Les Missions Catholiques.
Cet article, réimprîmé ici avec permission, est tiré d’Hommes et Destins: Dictionnaire biographique d’Outre-Mer, tome 3, publié en 1977 par l’Académie des Sciences d’Outre-Mer (15, rue la Pérouse, 75116 Paris, France). Tous droits réservés.