Collection DIBICA Classique
Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.Nilsen-Lund, Peder
Ce n’est pas comme explorateur ayant échappé à mille dangers que Nilsen-Lund est passé à la postérité, mais plutôt pour avoir composé les airs et les paroles d’une vingtaine de cantiques très populaires du recueil de l’Église luthérienne de Madagascar.
Né à Steigen (Norvège), le 20 octobre 1842, Peder Nilsen-Lund était déjà diplômé d’une école normale lorsqu’il entreprit des études de théologie au Séminaire des Missions Norvégiennes (NMS) à Stavanger (1868-73). Consacré pasteur en 1874, il fut envoyé à Madagascar où il fut chargé de fonder la station d’Ambatofinandrahana dans le Betsiléo et il y fut en poste pendant de longs séjours.
Ayant le contact facile, il réussissait particulièrement bien avec les grands garçons qu’il instruisait chez lui. Beaucoup d’entre eux devinrent des pasteurs ou des catéchistes dévoués. Très musicien, il écrivit des cantiques d’une grande poésie qui entrèrent dans le recueil de l’Église et dont pour certains il composa lui-même les mélodies. On a dit de son enseignement que c’était une école de poètes car plusieurs de ses disciples, à leur tour, ont composé de très beaux cantiques.
Mais outre son travail comme missionnaire “de station,” Nilsen-Lund fut un explorateur intrépide. En 1877, avec A. Valen, il descendait de Fianarantsoa vers la côte-est: Mananjary, puis Vohipeno. Là, les deux hommes se séparèrent et Nilsen-Lund continua à descendre vers le sud: Il aurait voulu pousser jusqu’à Fort-Dauphin mais le gouverneur commandant la garnison mérina s’y opposa. Il rentra alors à Fianarantsoa par le plus court, en passant par Ambalatany et traversant le pays bara.
Dix ans plus tard, il tenta une exploration en tous points plus difficile: Partant de Fianarantsoa, plein ouest, il pénétra dans le territoire de Raihandry, roi des Bara-Imamono qui le reçut bien. Il traversa alors le royaume du nord au sud, puis il pénétra chez des autres roitelets, à l’est de la chaîne de l’Isalo. Il y fut arrêté et gardé captif, menacé de mort. Pour éviter à ses porteurs d’être réduits en esclavage, il les fit s’échapper un à un et fut enfin autorisé à repartir avec le seul homme qui lui restait de son équipe. Continuant vers l’ouest, il traversa la zone occupée par les Tanosy émigrés (vallées de la Taheza et de la Sakondry), puis par le pays mahafaly et l’Androy, il rejoignait enfin Fort-Dauphin sur la côte sud-est non sans avoir eu à affronter des situations très critiques. Il repartit vers le nord, par Manambondro et Vangaindrano et rentra chez lui après quatre mois d’absence. Le résultat de ce périple fut l’installation l’année suivante de nouveaux missionnaires, à Fort-Dauphin, à Manambondro et à Vangaindrano.
En 1890, il fut un nouveau voyage d’Ihosy à Tuléar et c’est à 20 kilomètres de cette dernière ville qu’il lui arriva les ennuis les plus graves. Mais, ayant réussi à faire parvenir un message à son collègue Röstvig, celui-ci put venir le délivrer avec l’assistance d’un chef sakalava. Il rentra chez lui par le pays des Tanosy émigrés, où il installa à Manasoa, le premier missionnaire luthérien américain.
Par la suite, en 1892 et 93, il fit de courts voyages vers l’Ouest. Profitant de l’hiver austral, en juillet 1893, il partit pour un long circuit qui devait le mener à Malaimbandy, Ankavandra et Antsalova. Puis, revenu à Malaimbandy il partit vers l’Ouest jusqu’à Morondava. En cours de route il fut capturé par des brigands qui, selon l’usage, le lièrent à un arbre pour le sagayer, mais, épouvantés par une étoile filante, ceux-ci le délièrent et le laissèrent partir…
En 1894, il retourna par le même chemin à Morondava et il explora le pays entre Morondava et le Mangoky, mais sans incident notable.
En 1897, il rentra en congé en Norvège, mais en si mauvais état de santé qu’il ne put retourner à Madagascar. Il fit des cures à Aix-les-Bains et passa plusieurs hivers dans le midi de la France, surtout à Cannes dont le climat lui convenait. C’est là qu’il mourut le 23 novembre 1914.
O. Chr. Dahl, L. Molet
Bibliographie
Son rapport sur le voyage de 1887 se trouve dans l’Antananarivo Annual de 1888: “Travels and perils among the wild tribes in the south of Madagascar” [Voyages et périls parmi les tribus sauvages dans le Madagascar méridional].
Sa biographie plus détaillée existe en norvégien: Gabriel Nakkestad, Peder Eileert Nilsen-Lund. Stavanger, 1951.
Cet article, réimprîmé ici avec permission, est tiré d’Hommes et Destins: Dictionnaire biographique d’Outre-Mer, tome 3, publié en 1977 par l’Académie des Sciences d’Outre-Mer (15, rue la Pérouse, 75116 Paris, France). Tous droits réservés.