Collection DIBICA Classique
Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.Ralaimamoa
Ralaimamoa, qui porta d’abord le nom de Ramarofahitra, en souvenir de son grand-père Rafahitra, est né en 1858, sans doute à Ambohitseheno; il était le troisième fils d’une famille de cinq enfants issus de Rainizafitompo et de son épouse Rasoahago.
Son père, Rainizafitompo était lui-même originaire du groupe Tsimiamboholahy de la région d’Ilafy. Sa mère appartenait également à une famille bourgeoise dont faisaient partie Rainimamonjisoa, fonctionnaire royal, et Randriamanamijao, directeur d’école.
Après avoir appris les premiers rudiments scolaires à Ambohitseheno, le jeune Ramarofahitra fut envoyé à l’âge de huit ans à l’École F.F.M.A. d’Ambohijatovo-Sud que venait de fonder le Révérend Sewell. Il y étudiera pendant six ans avec fruit, puis retournera dans son village natal d’Ambohitseheno pour y enseigner jusqu’à l’âge de vingt ans.
Il entre ensuite au Collège de Faravohitra (qui fut ensuite le Palais de Justice) et y étudie jusqu’en 1882. C’est là qu’on lui donne le nom de Ralaimamoa, en raison des succès fructueux qu’il récolte. Le directeur de cette institution (installée d’abord à Ambohimanoa en 1876) était alors M. Toy, puis M. Sharman. On y apprenait la grammaire malgache, la géographie, l’astronomie, l’anglais, les mathématiques, la logique, la physiologie, les sciences naturelles, la morale, l’histoire biblique et religieuse, la théologie, ainsi que des notions médicales. A l’issue de la première année, les bons étudiants étaient gardés pour étudier trois ans.
Ralaimamoa glana pendant sa scolarité de nombreux prix offerts par la Mission, la reine et le Premier Ministre. A la fin des études il rédigea sur l’Imérina le meilleur mémoire de fin d’études de sa promotion: ce qui lui valut une récompense du Premier Ministre.
Le gouvernement le pressentit pour devenir komandy dans une région côtière, mais il préféra suivre sa vocation religieuse et fut nommé évangéliste le 3 avril 1883.
Avant son départ pour le terrain missionnaire, il se maria, sur les conseils de sa famille, avec Mademoiselle Raketamanga (24 janvier 1883). Leur union fut bénie par le Révérend Cousins. Raketamanga, ancienne élève de l’École L.M.S. d’Andohalo, comptait d’importants personnages dans sa famille, dont Rainiketabao, qui fut gouverneur de Fianarantsoa.
Ralaimamoa et son épouse eurent plusieurs enfants, mais deux garçons seulement survécurent: Rafidimanana et Rafidison qui firent tous les deux des études médicales.
A son arrivée dans la région d’Ambatomena, Ralaimamoa avait pour tâche de transformer spirituellement et matériellement une contrée encore peu développée. Les habitants étaient des émigrés, d’origines très diverses parlant un dialecte local assez différent de la langue de Tananarive. On s’habillait généralement de rabane (jiafotsy). Les coutumes religieuses ancestrales et les sampy étaient courants et beaucoup fumaient le chanvre (rongony).
Andriamanatsiety avait effectué un défrichage religieux préliminaire et il fut ensuite envoyé dans le pays bezanozano.
La biographie de Ralaimamoa indique qu’il porta de sept à onze le nombre de temples de sa circonscription missionnaire. Il s’agit sans doute d’une erreur de son biographe, car son travail fut sûrement bien plus considérable. Le Filazana ny amin’y L.M.S. de 1895 indique qu’à cette époque le district missionnaire de Soavina dont le responsable était le Révérend P. G. Peake, comprenait cinq pasteurs où évangélistes, dont Ralaimamoa résidant à Ambatomena. Celui-ci exerçait alors son contrôle sur quatorze temples dont nous donnons la liste, plus un quinzième en 1896, Ambohitrony. Or, avant 1883, seuls six temples existent. Il faut donc porter à son crédit la création des neuf autres entre 1883 et 1895. L’œuvre d’ailleurs se poursuit après l’épisode des Menalamba. Lors de l’insurrection il joua un rôle d’apaisement avec le Gouverneur Rainilambo et le Pasteur Kruger. Les fahavalo lui en tinrent rigueur et brûlèrent sa maison et sa bibliothèque.
Pendant la guerre 1914-1918 il souscrit aux œuvres de guerre et sur ses conseils son fils le docteur Rafidimanana s’engage comme volontaire.
Le 1er janvier 1918, il fut nommé pasteur. Cependant la cérémonie religieuse dirigée par le Révérend E. C. Baker n’eut lieu qu’en décembre 1922.
En mars 1933, il prenait sa retraite après cinquante ans d’activité.
Le demi-siècle qu’il a consacré à l’évangélisation de la région d’Ambatomena a été complété aussi par une œuvre d’enseignement et même d’infirmier.
Outre son action religieuse et politique, il est intéressant de constater que Ralaimamoa contribua efficacement au progrès matériel de la région. Il met en valeur ses rizières, ses terrains et fait de l’élevage. Il plante en cinq endroits distincts environ un millier d’arbres afin, selon ses propres termes, “de servir de modèle aux habitants arriérés.” L’existence de Ralaimamoa est assez représentative parmi celles des bons pasteurs, si nombreux à Madagascar qu’il faudrait un énorme dictionnaire biographique pour les recenser tous.
Pierre Vérin
Sources:
Ny tantaran’Itompokolahy Ralaimamoa, mpitandrina tao Ambatomena (Manana) (1858-1935). Imprimerie du Malagasy, Analakely, Tananarive, sans date.
Filazana ny amin’ ny London Missionary Society eto Madagascar 1895. Tananarive, L.M.S. 1895.
Filazana ny amin’ ny L.M.S. Collège Antananarivo Imarivolanitra (Jona 1880 jona 1881) 1881 indique les programmes d’études.
Renseignements obtenus auprès d’amis et de membres de la famille.
Cet article, réimprîmé ici avec permission, est tiré d’Hommes et Destins: Dictionnaire biographique d’Outre-Mer, tome 3, publié en 1977 par l’Académie des Sciences d’Outre-Mer (15, rue la Pérouse, 75116 Paris, France). Tous droits réservés.