Collection DIBICA Classique
Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.Dlamini, Bonaventure
Le premier évêque catholique noir en Afrique du Sud.
Bonaventure Dlamini est né à la mission de Mariathal, et c’est aussi là qu’il a été éduqué. Apparemment, la date exacte de sa naissance est inconnue. [1] Il était descendant du chef Namagaga, qui avait vécu sur les rives de la rivière appelée Umzinyathi au Zoulouland en 1812, et qui a quitté la région d’Umzimkulu pendant le règne de Shaka. [2]
Le contexte historique
A la fin de la deuxième guerre mondiale, une nouvelle situation se créait en Asie et en Afrique, là où les pouvoirs colonialistes avaient régné pendant un siècle. Plusieurs événements ont contribué à ce changement. D’abord, les pouvoirs colonisateurs avaient été affaiblis sur le plan économique par la guerre. Ensuite, les attitudes vis-à-vis du colonialisme avaient commencé à changer suivant la création des Nations Unies. Suivant l’exemple donné par l’Inde en 1947, les pays africains ont commencé à établir leur indépendance politique, se séparant de leurs anciens maîtres colonialistes. Le premier pays à obtenir l’indépendance était le Ghana, en 1957, et les pays de l’Afrique de l’est et de l’ouest ont suivi en 1963. Vers le milieu des années 1960, la plupart des pays africains étaient gouvernés par leurs propres leaders indigènes. [3]
Dans l’église catholique romaine, les années 1950 ont marqué le point tournant par rapport à “l’indigènisation.” La croissance des vocations indigènes dans l’église catholique avait commencé en 1898 quand le premier prêtre noir, Edward Mnganga, a été ordonné à Rome. L’ordination de Mnganga a vite été suivie par celle de trois autres prêtres zoulous. Le nombre de prêtres a continué à s’accroître, et en 1957, on pouvait compter trente-huit prêtres ordonnés. La plupart de ceux-ci ont été formés aux séminaires de Ste. Marie et de St. Pierre, et sont devenus diocésains africains, mais parmi ce nombre on trouvait aussi douze prêtres franciscains de St. Joseph (FFJ) et un prêtre pallotin. Les premiers prêtres diocésains noirs étaient Henry Damon (1940) [4] et Romuald Booysen (1947), tous deux ayant été formé par les pallotins à Swellendam, et ayant travaillé dans le diocèse d’Oudtshoorn. [5]
Par rapport aux questions épiscopales, l’église catholique en Afrique avançait rapidement aussi, et une série d’ordinations épiscopales dans les années 1950 en ont résulté. Au Tanganyika, deux évêques avaient été consacrés - le premier en 1951, et le deuxième en 1956 - un évêque a été consacré au Ruanda en 1952 (le Rwanda présent), un autre au Basutoland (le Lesotho présent), et un autre au Nigéria en 1953. Il y a aussi eu des consécrations en Afrique du Sud en 1954, et encore au Nyasaland et au Kenya en 1956, chacun de ces derniers pays ayant aussi reçu un évêque. Comme l’observe Walbert Bühlmann : “Les pays africains latins ont quelque peu hésité, mais, dans les quatre dépendances françaises, quatre évêques ont été consacrés en 1955-1956, et un au Congo Belge en 1956. L’évêque Dud, du Soudan, consacré en 1955, était aussi africain.” [6]
Après les années 1970, l’ordination des évêques africains est devenue plus fréquente. Ce qu’il faut noter d’un œil critique, c’est le fait qu’au vingtième siècle, l’église a mis quelque quarante ans à consacrer un évêque africain. On peut citer plusieurs raisons pour cela, la moins faible n’étant sûrement pas le fait que l’église locale avait eu du mal à s’implanter en Afrique. Une fois de plus, citons Bühlmann : “L’implantation réelle de l’église n’avait pas encore eu lieu en Afrique. Nous ne sommes pas encore une église ‘locale’…Nous sommes réprimés par la présence écrasante des missionnaires. Nous sommes toujours une colonie de l’église.” [7]
La création du diocèse d’Umzimkulu
En 1952, l’archevêque Celestino Damiano, qui était basé à Pretoria, a été nommé délégué apostolique pour l’Afrique du Sud. Avant d’avoir été nommé à ce poste, il avait travaillé pour la Congrégation pour la propagation de la foi et avait visité l’Afrique du Sud en 1950. Brain en dit plus : “Etant donné la politique du Vatican par rapport à l’africanisation de l’église…il était sous entendu que l’archevêque Damiano avait l’intention de nommer un évêque noir en Afrique du Sud - et, vu le fait que le diocèse de Mariannhill comptait le plus grand nombre de catholiques noirs ainsi que le plus de clergé noir du pays entier, il était probable que le nouveau diocèse soit établi là.” [8]
L’évêque Streit de Mariannhill, et le père Reginald Weinmann, qui était supérieur général, ont suggéré qu’il serait plus convenable de créer un diocèse auxiliare, au lieu d’un diocèse normal. Damiano, par contre, était bien décidé à créer un nouveau diocèse avec un évêque africain. Dès le début, plusieurs prêtres de Mariannhill [9] étaient contre la création du diocèse d’Umzimkulu, mais Celestino Damiano, qui était d’origine italo-américaine, savait insister, et finissait toujours par gagner. Selon un entretien avec Oswin Magrath en 1996 : “Ensuite Damiano est arrivé avec l’ordre d’établir un évêque noir dans la république. Il n’y avait qu’un évêque noir au Lesotho, ‘Mabathoana. Damiano a fait de son mieux et a crée Umzimkulu à partir de Mariannhill. Mariannhill a mal vécu cela.” [10]
Le diocèse de Mariannhill avait des raisons d’être contre la création d’un nouveau diocèse, et le processus a beaucoup attristé les prêtres de Mariannhill. En fait, Damiano n’avait pratiquement pas consulté les autorités de Mariannhill, et les événements ont eu lieu très vite.
Les missionnaires de Mariannhill avaient bâti leur œuvre missionnaire au Natal depuis plus de soixante-dix ans, et avaient construit plusieurs hôpitaux et plusieurs écoles. Brain explique davantage : “Mariannhill avait servi de figure de proue dans le champ de mission catholique, et avait fait venir au pays plusieurs prêtres et plusieurs centaines de frères très compétents ; ils avaient développé des stations missionnaires et des écoles, avaient établi leurs fermes avec des fonds qu’ils avaient levés eux-mêmes, avaient ouvert des hôpitaux et avaient même installé une imprimerie.” [11]
En raison de tout cela, le sentiment général parmi le clergé de Mariannhill était qu’ils méritaient un meilleur traitement et peut-être même la possibilité de faire connaître leur point de vue et d’être pris au sérieux. Lors de la création du diocèse d’Umzimkulu, “il y avait des doutes dès le début sur la pertinence de ce nouveau diocèse et encore plus de doutes par rapport à ses chances de réussite.” [12] La situation a été aggravée quand on a accordé au diocèse d’Umzimkulu les stations missionnaires de Lourdes, de Centocow et d’Emaus - toutes trois des stations très prisées et de grande importance historique.
Même si Damiano était trop assuré, il est aussi possible que la création du diocèse d’Umzimkulu ait eu lieu pour des raisons d’avantage personnel. S’il créait plus de diocèses, Rome applaudirait son travail. Comme l’a observé l’archevêque Hurley, c’était “…surtout le travail du délégué apostolique, Damiano. Il voulait montrer qu’il avait eu beaucoup de succès comme délégué, et à l’époque, la création d’un diocèse local serait bien vue à Rome. Le délégué aurait une bonne renommée à Rome - c’est l’impression que nous avions. Je n’ai vu ni papiers ni documents, [mais] il est clair que Damiano était très ambitieux.” [13]
Le diocèse d’Umzimkulu a donc été crée. Lourdes, “la plus ancienne station missionnaire de Mariannhill, qui avait été une fois la plus grande propriété missionnaire au Natal et qui était devenue en soixante ans une grande communauté chrétienne d’environ 12.000 catholiques,” [14] devait en être le centre. Le nouveau diocèse faisait le tiers du diocèse de Mariannhill, et avait comme frontière naturelle vers l’est la rivière Umzimkulu. Elle comprenait les districts civils d’Umzimkulu et de Port Shepstone, ainsi que celui de Margate à la côte, et celui de harding vers l’intérieur. Il y avait à l’époque 30.000 catholiques dans le diocèse, dont Lourdes - qui, avec ses nombreuses stations auxiliaires - comptait quelque 13.000 âmes. [15]
Même après la création du diocèse d’Umzimkulu, les plus grandes stations missionnaires étaient toujours dirigées et gérées par les prêtres de Mariannhill. Par exemple, “Le père Xavier Brunner était recteur à Lourdes, le père Siegfried Schultis dirigeait Centocow, le père Aurelius Boschert dirigeait Harding, le père Gabriel Bader dirigeait Emaus, et le père Raphael Boehmer était à la tête de Port Shepstone. Certaines autres stations missionnaires étaient dirigées par le clergé africain.” [16]
L’évêque Bonaventure Dlamini
Dlamini était un des premiers étudiants au séminaire junior quand Mariathal a ouvert les portes en 1925. [17] Il a terminé ses études au séminaire senior de Ste. Marie et par la suite a rejoint les frères franciscains de St. Joseph (FFJ). L’ordination de Dlamini par l’évêque Fleischer, le deuxième prêtre FFJ à être ordonné après Elias Mkwane, a eu lieu le 28 novembre, 1937, [18] quand Dlamini avait à peu près trente ans.
Suite à son ordination, Dlamini a travaillé dans plusieurs stations missionnaires : Kevelaer, Ste. Madeleine, St. Adalbero, et d’autres à la côte sud de Natal. Il était aussi consultant diocésain pour les deux premiers évêques de Mariannhill - Fleischer et Streit. La nomination de Bonaventure Dlamini, FFJ, comme premier évêque noir de l’Afrique du Sud, le 21 février, 1954, [19] a marqué le début de l’africanisation de l’épiscopat en Afrique du Sud. A l’époque de sa nomination, Dlamini dirigeait la mission de Ste. Madeleine, ancienne station auxiliaire de Mariannhill. Il est intéressant de constater que “Le père Dlamini, [qui] avait été décrit comme ‘un homme de normes morales et de conduite dans la prêtrise très élevée’ était un brave homme, doux et gentil, mais sans expérience ni dans les affaires, ni dans l’administration, ni dans les questions de rapports avec le personnel difficile. Suite à sa consécration comme évêque, on l’a jeté aux requins…- il a dû se demander parfois pourquoi il avait accepté le poste.” [20]
La consécration de Dlamini par le délégué apostolique, l’archevêque Celestino Damiano, a eu lieu à Lourdes, le siège épiscopal du nouveau diocèse, le 26 avril, 1954. Il a été assisté par l’évêque Streit de Mariannhill et l’évêque ‘Mabathoana de Leribe. [21] La cathédrale de Lourdes, une des plus grandes églises au Natal, était trop petite pour l’occasion, alors un autel de plein air a été érigé par le collège technique de Mariannhill, et des haut-parleurs ont été installés au lycée de Lourdes. C’est le terrain de jeux de l’école qui a servi à accueillir tous ceux qui sont venus pour la célébration : “La consécration a compté trois archevêques, dix-sept évêques et monsignori. On comptait aussi une centaine de prêtres, qui étaient venus d’aussi loin que Cape Town, Basutoland, et de la Rhodésie.” [22]
Suite à la consécration, il était apparent que la mission de Mariannhill ne soutenait pas Dlamini. Oswin Magrath, qui était ancien recteur du séminaire senior de St. Pierre à Pevensey et à Hamanskraal, a pu dire : “Ils [Mariannhill] ne le soutenaient pas du tout, Dlamini. Il y avait toujours le fait que Mariannhill ne l’avait pas approuvé…alors le pauvre Dlamini est vraiment mal parti. Cependant, il a fait de son mieux.” [23]
L’encadrement du nouveau diocèse
John Baptist Sauter était le premier vicaire général de Dlamini, et il a aussi servi de secrétaire et de procurateur. Sauter a probablement été nommé parce qu’il avait fondé la People’s Bank (Banque du peuple) de Mariannhill, et cette banque avait bien marché. Elle était établie selon la philosophie du syndicat catholique de l’union, de Bernard Huss. Plus tard, Sauter a acheté des fermes pour la banque et les a revendues avec un bénéfice. Il avait un bon nombre de compétences financières. Hermann Mennekes est devenu un des conseillers de Dlamini, et Xavier Brunner est devenu le prêtre de paroisse à Lourdes. Brunner était administrateur compétent d’une très grande mission, mais plus tard, il est tombé en défaveur avec les prêtres noirs du diocèse. Quand il a quitté la mission, il a été remplacé comme prêtre de paroisse par Mennekes. Mennekes aussi, est parti, et a été remplacé par Laurence Schleissinger.
Pendant ce temps, Dlamini avait fait appel à l’aide extérieure. En réponse, un prêtre rédemptoriste, le père Wrangham, est devenu vicaire-général, et John Sauter s’est retiré à la mission de Jericho. Par la suite, Centocow a été incorporé, mais ne faisait pas partie du diocèse d’Umzimkulu à l’origine. Plus le temps passait, plus les prêtres de l’Assemblée à Mariannhill étaient complètement exclus de l’administration du diocèse d’Umzimkulu.
L’expérience d’Umzimkulu
A l’époque de la consécration de Dlamini, plus de cinquante prêtres noirs diocésains du séminaire de St. Pierre avaient été ordonnés. Il y avait aussi des prêtres noirs des frères franciscains de St. Joseph (FFJ), ainsi que les tout premiers prêtres oblats, tout juste ordonnés, [25] Dominic Khumalo et Jerome Mavundla. Comme Rome l’avait souhaité, les prêtres noirs auraient pu aider à gouverner le diocèse. Cependant, en raison des difficultés qui ont existé à l’origine, Dlamini a nommé un administrateur blanc, John Baptist Sauter, comme premier vicaire général du diocèse.
Certaines choses qui sont arrivées dans le diocèse d’Umzimkulu qui ont contribué à la retraite prématurée de Dlamini pourraient s’expliquer par le recul de Mariannhill, par le racisme, et par le manque d’expérience de Dlamini lui-même. Ces explications sont ternies par les perceptions populaires et orales des prêtres et des évêques, ainsi que par l’analyse de l’auteur présent.
Le recul de Mariannhill
A l’origine, ceux qui venaient de Mariannhill, et qui étaient aussi connu comme la Congrégation des Missionnaires de Mariannhill (CMM) n’avaient pas été exclus de l’administration du nouveau diocèse. Plutôt, selon un entretien avec David Moetabele en 1997, ils ont commencé “ …à se retirer, et ils savaient très bien que tout tomberait à l’eau s’ils s’en allaient, parce qu’ils étaient comme les piliers financiers, et savaient gérer les fermes, mais les prêtres noirs n’avaient jamais été formés pour la gestion de telles choses.” [26]
Par exemple, ayant acheté des terres dans la paroisse de Lourdes, les Trappistes ont commencé à cultiver la région. Ceux qui voulaient devenir catholiques venaient habiter dans les villages de ceux qui avaient été évangélisés. Ils ont bâti des écoles et ont établi des installations pour les chrétiens. Mais l’évêque avait besoin de quelqu’un qui savait obtenir des ressources et qui savait comment faire fonctionner l’ensemble. Quand Dlamini a pris le diocèse en main, il ne savait pas où trouver les fonds nécessaires a son fonctionnement. La plupart des prêtres noirs n’étaient pas compétents pour l’agriculture, l’administration et la gestion financière. Comme le dit David Moetapele, “Dès le début, tout a dégringolé.” [27]
Quand ceux de Mariannhill sont partis, les fermes et les autres projets dans le diocèse d’Umzimkulu qui avaient servi à créer une abondance de produits agriculturels ont été abandonnés. On voyait l’évêque lui-même faire ses courses dans la ville d’Umzimkulu parce qu’il était incapable de déléguer. [28]
Une question de racisme
Magrath attribue l’échec du diocèse à la ségrégation dans l’église, parce que les prêtres noirs n’étaient pas traités comme les égaux des blancs. Il y avait des tensions raciales parmi les prêtres eux-mêmes. Par exemple, la personne qui tenait le poste de délégué apostolique juste avant la nomination de Dlamini était, de toute apparence, très autocrate. Ayant eu des problèmes avec quelques prêtres noirs, il a conseillé aux évêques d’installer tous les prêtres noirs comme assistants aux prêtres blancs. Selon Magrath : “C’était censé être secret, mais c’est tout de même sorti. Il s’appelait Martin Lucas SVD, et c’était un personnage puissant. Il avait l’habitude de dire aux évêques ce qu’ils avaient à faire. Dlamini aussi, a été mis sous quelqu’un.” [29]
De plus, dès que Dlamini avait été nommé au poste, les blancs se sont tout de suite écriés, disant que la nomination était inopportune. Stuart Bate en dit plus:
Les catholiques blancs de Margate ont protesté “avec véhémence contre le fait que quelqu’un qui n’était pas européen soit évêque des européens.” Ils étaient incapables d’imaginer qu’un homme noir puisse diriger des blancs, ni même faire partie de leur église - alors la campagne pour “garder son église blanche” a été commencée. Si les catholiques de Margate sont mentionnés dans la littérature, ce n’est pas pour autant qu’il faut penser qu’ils étaient encore plus racistes que les autres blancs à l’époque. Leurs actions sont représentatives de la mentalité commune qui existait au sein de la communauté des colons à l’époque. [30]
Un administrateur sans expérience
Quand la CMM s’est retirée, l’effet de choc s’est fait ressentir dans la plupart des paroisses d’Umzimkulu. Comme dit Hermann : “ Les missions de Lourdes et de Centocow, qui étaient bien établies, sont vite tombées en ruines sur le plan financier et économique. Leur administration et leur gestion étaient au-delà des compétences et des forces du nouveau régime. Il était normal que ceux de Mariannhill ressentent vivement l’échec de cette première tentative ‘d’indigènisation’ dans le territoire de leur mission.” [31]
Lorsqu’il était question d’administrer le diocèse, Dlamini avait de gros problèmes. Il est possible que sa formation ne l’a pas muni des compétences nécessaires. Nicholas Lamla pensait que Dlamini avait été le mauvais choix ; pour lui, la personne qui aurait dû être consacrée évêque, c’était Fidelis Ngobese. Cependant, comme le dit Lamla, Dlamini “était un pasteur, un bon prédicateur, une personne très dévote, très sympathique - mais c’est à peu près tout. Il n’avait pas un pourcent des qualités nécessaires pour être évêque.” [32]
Sur ce point, il y a confirmation dans les entretiens tenus avec certains prêtres selon qui, lors des cours sur le droit canonique au séminaire, les conférenciers disaient, “Nous allons passer sur cette partie concernant les prêtres de paroisse et aller directement à la section sur les prêtres assistants.” [33] Apparemment, il est possible que la plupart des prêtres noirs aient été éduqués ainsi - autrement dit, pour être prêtres assistants - et c’étain prendre un pas de géant que d’aller de prêtre assistant au statut d’évêque. Les prêtres de la CMM ont vigoureusement contesté cela, et disent que la formation avait été conduite justement, et que les prêtres avaient été formés à être les futurs leaders de l’église catholique en Afrique du Sud.
Selon les encycliques Donum Fidei (1957), Maximum Illud (1919), et Rerum Ecclesiaie (1926), la formation du clergé local devait être approfondie, complète, et du même niveau que celle du clergé missionnaire blanc. Apparemment, dans le cas de Dlamini, la formation qu’il aurait reçue, surtout dans l’administration et les finances, était très douteuse. On pourrait conclure que le séminaire ne donnait pas de formation adéquate aux prêtres qui devaient être les futurs leaders de l’église.
L’archevêque Hurley avait remarqué l’administration faible quand il avait travaillé au séminaire comme administrateur. Il a servi pendant dix-sept ans jusqu’à ce qu’il y ait un nouvel évêque, et il ne pouvait pas faire grand-chose. Après tout, il n’était pas l’évêque de la région. Comme Hurley était archevêque de Durban et administrateur apostolique d’Unzimkulu, il a essayé de régulariser les finances du diocèse, de mettre au clair les rapports, de mettre les dossiers au bon endroit, de trouver les actes notariés et de les mettre en ordre. Comme il le dira plus tard, “Je manquais de creativité ; ce n’est pas une qualité, normalement, d’administrateur apostolique. Ils ont fini par choisir l’évêque Gerald Ndlvodu, et lui aussi, il a trouvé cela difficile !” [34]
Hurley dit aussi qu’une des choses qui ont causé des problèmes pour Dlamini, c’est que… “Il n’avait pas le don de l’administration. Un évêque peut être saint et beaucoup prier, mais il a besoin d’être bon administrateur pour garder l’ordre. Il avait des difficultés de ce côté-là, mais c’était un brave homme. Pendant que j’étais là, je me suis rendu compte qu’il manquait sérieusement de prêtres.” [35]
Les questions de népotisme et de finances
Selon l’évêque Dominic Khumalo, quand la CMM - qui formait, en pratique, la structure financière du diocèse - s’est retirée, il n’y avait pratiquement plus d’argent. Dlamini était simplement incapable de gérer les fonds. Il était clair, aussi, que le népotisme marchait bon train dans le diocèse d’Umzimkulu. David Moetapele voyait que Dlamini gérait le diocèse comme s’il s’agissait de sa famille. Cela allait sûrement causer des problèmes. [36] Dès le début, le diocèse d’Umzimkulu n’avait jamais eu de succès. Lamla a noté que la personne qui aura le plus fait chuter Dlamini était un homme qui s’appelait Benjamin Dlamini.
Quand Dlamini est devenu évêque, Benjamin a décidé de quitter les missionnaires oblats de Marie immaculée (OMI) [37] et de rejoindre le diocèse d’Umzimkulu parce qu’il était “Dlamini.” C’est ainsi que Benjamin est devenu l’assistant de Dlamini. Il est important de noter que Benjamin n’était même pas de la famille proche de l’évêque. [38] Cependant, comme c’était un homme éduqué, intelligent, doué et capable, il a vite été accepté. Selon Brain, “quand ils allaient outre-mer, ils y allaient ensemble.” [39] Le diocèse d’Umzimkulu était semblable au diocèse de Leribe dans le sens que tous deux dépendaient du soutien financier occidental pour leur survie. Ainsi, l’évêque et son assistant allaient souvent en voyage pour susciter des fonds. Bien qu’il aie rejoint le diocèse sans transfert correct, Dlamini l’a nommé vicaire général, une nomination qui, du point de vue canonique, était incorrecte. Les prêtres locaux ont commencé à croire que l’évêque était corrompu, et qu’étant Dlamini, il s’occupait des siens. En attendant, alors qu’il était à Umzimkulu, les affaires ont bien marché pour Benjamin. Il avait une boucherie, plusieurs magasins, une ferme, et une grande poulaillerie. [40]
Une fois, Benjamin Dlamini avait été envoyé en Allemagne pour trouver des fonds, mais il trouvait qu’il était difficile de faire la distinction entre les fonds du diocèse et son argent à lui. Quand Benjamin est rentré en Afrique du Sud, il avait une belle Mercedes et un tracteur - selon lui, les deux véhicules étaient des cadeaux de la part d’amis en Allemagne. Dlamini n’a pas pu accepter cela, parce qu’il avait envoyé Benjamin dans le but de trouver des fonds pour le diocèse et non pour lui-même. [41]
Il semblerait donc que la plupart du personnel dans le nouveau diocèse n’était pas prêt à assumer les responsabilités de celle-ci, et qu’ils ont peut-être été poussés à accepter des postes pour lesquels ils n’étaient pas compétents.
La démission de Dlamini
Peu après le retrait de la CMM, les missions bien établies de Lourdes et de Centocow ont vite vécu des problèmes économiques et financiers sévères. Les nouveaux administrateurs étaient incapables de gérer et de développer cette mission énorme. La situation dégringolait rapidement, et ce fait, à son tour, a atteint la CMM.
Dlamini a dirigé le diocèse pendant quatorze ans. En 1968, pour raison de pressions du travail et de mauvaise santé, il a donné sa démission et est devenu un évêque auxiliaire De Mariannhill. Après sa démission, il est rentré au monastère de Kwa St. Joseph, la maison mère, et a travaillé dans le diocèse de mariannhill. En attendant, le 8 janvier, 1968, monseigneur Peter Butelezi a été nommé administrateur apostolique du diocèse d’Umzimkulu. Il est parti quatre ans plus tard quand il a été consacré évêque auxiliaire de Johannesburg.
Dans les années qui ont suivi sa démission, la santé de Dlamini s’est détériorée de plus en plus, et il est finalement entré à l’hôpital d’Assissi, près de Port Shepstone. Il est mort le 13 septembre, 1981, et a été enterré parmi ses membres frères de la FFJ, au cimetière de Kwa St. Joseph, à Emabheleni. [42]
Le 11 septembre, 1972, l’archevêque de Durban, Denis Hurley, a été nommé administrateur apostolique du diocèse d’Umzimkulu, avec comme vicaire, Aurelius Boschert, de la Congrégation des Missionnaires de Mariannhill (CMM). Hurley a aidé le diocèse jusqu’à ce que l’évêque Sithunywa Ndlovu soit consacré en 1987. Cependant, à cause des problèmes qui existaient déjà dans le diocèse, l’évêque Ndlovu a donné sa démission en 1994. C’est l’archevêque Wilfred Napier qui a ensuite pris l’administration du diocèse en main. [43]
George Sombe Mukuka
Notes:
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Joy Brain, A New Beginning? The Umzimkulu Diocese Fifty Years Later, Un nouveau début? Le diocèse d’Umzimkulu cinquante ans plus tard (Mariannhill: Mariannhill Press, 2004), 54.
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UmAfrika, (8 mai, 1954).
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Brain, 52.
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“Ein Mischling wird Priester,” dans Vergissmeinnicht, 63, (1945), 90; voir aussi, Pallotines: Society of the Catholic Apostolate, 32-33. Les FFJs ont été fondés par le premier évêque de Mariannhill-Fleischer, en 1923. Cette assemblée recevait les vocations de la communauté africaine.
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D’autres prêtres noirs ont été formés à St. Pierre. Les deux premiers prêtres ont été formés pour le diocèse de De Aar : Joseph J. Alacaster (1962) et Cecil J. Wienard (1962).
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Walbert Bühlmann, The Missions on Trial. Addis Ababa 1980: A Moral for the Future from the Archives of Today, [Les missions au tribunal. Addis Ababa 1980. Une morale pour l’avenir qui vient des archives d’aujourd’hui] (Traduit de l’allemand par A. P. Dolan, assisté de B. Krokosz), (Slough: St. Paul Publications, 1978), 83-85.
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Bühlmannl, 49, 51.
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Brain, 53-54.
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Voir le New Catholic Dictionary: “En 1882 le rév. Francis Pfanner, qui était alors prieur du monastère trappiste (cistercienne réformée) de Mariastern (Bosnie), a proposé, en bénévole, d’établir un monastère à Cape Colony, afin d’essayer d’adapter la règle de l’ordre à la vie missionnaire. Il s’est installé dans un endroit qu’il a appelé Dunbrody en 1880, mais a été obligé de quitter ce site en 1882, et il a installé sa communauté à Mariannhill, Natal. En 1885, Mariannhill est devenu une abbaye, et le père Pfanner était le premier abbé. Au cours des quelques années suivantes, le père Pfanner a fondé sept stations missionnaires au Natal pour pourvoir aux besoins des indigènes. Entre 1894 et 1900, neuf stations ont été établies au Natal et à Cape Colony, ainsi que deux maisons en afrique de l’est allemande. Plus tard, une station a été érigée en Rhodésie, et encore deux autres au Natal. En 1909, la Congrégation des Réguliers a publié un décret selon lequel Mariannhill serait séparé de l’ordre des cisterciens réformés, formant ainsi la ‘Congregation of the Mariannhill Missionaries.’” (CMM), site internet http://saints.sqpn.com/ (visionné le 30 janvier, 2009).
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Oswin Magrath, entretien avec l’auteur, 19 juillet 1996, Cedara, Pietermaritzburg, enregistrement.
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Brain, 55.
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Brain,
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Denis, Hurley, entretien avec l’auteur, 28 juillet 1999, Cathedral, Durban, enregistrement.
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UmAfrika, (8 mai, 1954).
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Hermann, History of the Congregation of the Missionaries of Mariannhill [Histoire de la CMM], 120.
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ibid.
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Southern Cross, (29 décembre, 1937). Il n’y a pas d’archives pour le diocèse d’Umzimkulu. Certaines lettres privées ainsi que certains actes notariés et autres papiers financiers ont été transmises aux archives de Mariannhill. Elles ont éventuellement été transmises à Rome, au généralat de la CMM. Cependant, avec le temps, il y aura accès aux ressources dans les archives qui sont gardées à Rome à la SCPF.
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UmAfrika, (13 mars, 1954); voir aussi, Sieber, “Religious life,”[Vie religieuse] 69, 126, 127.
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UmAfrika, (13 mars, 1954; 3 avril, 1954; 8 mai, 1954; 1 janvier, 1955); Southern Cross, (avril, 1954); voir aussi, Hermann, ci-dessus, 120.
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Brain, 54.
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UmAfrika, (8 mai, 1954); voir aussi, Hermann, ci-dessus, 120.
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UmAfrika, (8 mai, 1954).
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Magrath, “Entretien 1.” Entretien avec l’auteur, 19 juillet, 1996, Cedara, Pietermaritzburg. Enregistrement.
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La “Congregation of the Most Holy Redeemer” [congrégation du saint rédempteur], est souvent appelée Rédemptoriste et indiquée par l’acronyme latin “CSSR,” est une communauté religieuse de prêtres catholiques et de frères qui a été fondée par Saint Alphonsus Liguori à Naples en 1732 pour prêcher aux démunis.
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Les “Missionary Oblates of Mary Immaculate” (OMI) [oblats missionnaires de Marie immaculée] sont un ordre religieux de l’église catholique, fondé le 25 janvier, 1816, par Saint Eugène de Mazenod, un prêtre français de Marseille. L’ordre a d’abord été reconnu par le pape Leo XII le 17 février, 1826. Etabli à l’origine pour ranimer l’église après la destruction de la révolution française, l’ordre religieux sert à présent dans divers pays autour du monde. Au début, ils travaillaient surtout avec les pauvres, mais ils sont aussi connus comme ordre missionnaire et enseignant. En 1938, le pape Pie XI les a appelés, “spécialistes pour les missions difficiles.”
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David Moetapele, entretien avec l’auteur, 24 octobre, 1996, Pretoria, enregistrement.
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Moetapele, “Interview 1.”
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Paul Mngoma, entretien avec l’auteur, 13 janvier, 1999, Mariannhill, enregistrement.
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Magrath, “Interview 1.”
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Stuart C. Bate, “The Church under Apartheid,” [L’église sous l’apartheid] dans The Catholic Church in Contemporary Southern Africa, [L’église catholique dans l’Afrique du Sud contemporaine] Joy Brain et Philippe Denis, (Pietermaritzburg: Cluster Publications, 1999), 153.
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Hermann, 120.
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Nicholas Lamla, “Interview 1,” par George Mukuka, enregistrement, Umtata, 29 octobre, 1997.
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Lamla, “Interview 1.”
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Voir aussi, Brain, 61.
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Hurley, “Interview 1.”
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Moetapele, “Interview 1.”
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Brain, 60.
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Khumalo, “Interview 1”; voir aussi Brain, 61-62.
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Brain, 60.
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Khumalo, “Interview 1.”
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Khumalo, “Interview 1.”
- Archives de la Vice-Province de St. Joseph, Afrique du Sud, “ L’évêque Bonaventure, Pius Dlamini, notice nécrologique” 1.
- Brain, 87-130.
Bibliographie
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Mngoma, Paul. Entretien avec l’auteur, 13 janvier, 1999, Mariannhill. Enregistrement.
Ce récit, reçu en 2009, a été rédigé et recherché par le dr. George Sombe Mukuka, chargé de la gestion des recherches à l’université de Johannesburg, Afrique du Sud, et récipiendaire de la Bourse du Projet Luc du DIBICA pour 2008-2009.