Collection DIBICA Classique
Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.Chazal, Maxime
Né le 12 août 1894 à Chaptes, paroisse de Beauregard Veudon (P.d.D.) en Auvergne (il se glorifiait d’être auvergnat et se disait “consul d’Auvergne”) Maxime Chazal fut baptisé le 15 août et voué par ses parents à la Vierge Marie. Ceci explique sa fidèle dévotion à Marie et la fondation du pèlerinage à Notre-Dame-de-l’Assomption à Cotiakou au Nord Bénin.
Entré tout jeune dans la Société des missions africaines, il fait ses études secondaires à Codier en Keer en Holland où deux de ses sœurs étaient religieuses. La déclaration de guerre de 1914 le trouve au noviciat des Missions africaines à Chanly en Belgique. Mobilisé, il fait la guerre des tranchées, devient officier et de sa conduite courageuse il rapporte trois citations élogieuses et des poumons abîmés par les gaz.
“A montré, pendant toute la période critique du combat du 2 au 7 août 1916 les plus belles qualités de sang-froid et de courage; s’est efforcé à tout moment de maintenir le moral de ses hommes; a assuré avec une régularité parfaite le ravitaillement de sa compagnie “Excellent chef de section…à l’attaque du 14 septembre 1918 a brillamment enlevé sa section à l’assaut des positions ennemies…a su maintenir très élevé le moral de ses hommes”…le 14 août 1918 a fait partie d’une audacieuse embuscade…A montré de belles qualités de courage et de sang-froid en sautant le premier sur l’un des Allemands qui furent faits prisonniers.”
Démobilisé, il continue ses études au grand séminaire des Missions africaines à Lyon. Membre de la société en 1920, il est ordonné prêtre le 29 juin 1923.
Dans le Vicariat apostolique du Togo, il faut du personnel pour remplacer les pères du Verbe divin, Maxime Chazal y est nommé et affecté à Anécho où il restera jusqu’en 1936. “O mon Afrique, écrit-il, me voici désormais tout à toi, rien qu’à toi”.
Anécho en pays Mina est un terroir privilégie pour un jeune missionnaire au tempérament optimiste comme Maxime Chazal. Avec sérieux il se penche sur l’organisation religieuse des collectivités. Il axe son évangélisation sur la famille: “La famille chrétienne voilà le pivot de l’œuvre de la régénération de l’Afrique”. Il a confiance dans l’avenir et dans les valeurs traditionnelles de ses gens. Il aime a participer à leurs fêtes. “Vous ne soupçonnez pas, écrit-il, le charme des fêtes nocturnes au pays du soleil: le tam-tam et la pleine lune, voilà de grands amis”.
En 1935, le père Chazel devient le bras droit de Mgr Cessou comme pro-vicaire. Le père continue à résider à Anécho, se rendant seulement deux jours par semaine à Lomé pour administrer les affaires courantes en l’absence du vicaire apostolique. En 1936, il est volontaire pour la fondation de Mango au Nord-Togo. De la lagune il passe à la savane, d’une mission bien organisée à une autre où tout est à faire. A Mango, il ne jette que les premiers fondements de la nouvelle mission car le 8 décembre 1936 le voilà plus au nord encore, au Niger et cette fois dans le vicariat apostolique du Dahomey avec mission de fonder Fada N’Gourma. Là aussi tout est à faire et le père Chazal fait bien toute chose si bien que Fada est aujourd’hui un diocèse florissant. Devançant la plupart de ses confrères, dès décembre 1946, il laisse sa mission de Fada N’Gourma aux pères rédemptoristes et va fonder Tanguieta au Nord-Dahomey. Le père Chazal ne s’est jamais “installé”, en vrai missionnaire il est toujours prêt à aller plus loin et à tout recommencer à zéro.
Le père Chazal fut un promoteur constructeur; il le fut sans scandale mais non point sans originalité. Il a créé et bâti mais toujours avec mesure. Il ne voulait pas de bâtiments trop lourds à porter et à entretenir. Il a visé l’utilité, l’efficacité, et non la grandeur. Cette mesure était significative de son esprit de pauvreté. Il aimait la vie de simplicité, avec lui on ne manquait pas du nécessaire mais il avait en horreur le superflu et surtout le gaspillage.
Ce qui faisait sursauter le père Chazal c’était tout ce qui avait l’apparence de l’injustice. Lui, homme de cœur, parlait alors sans indulgence avec une grande liberté de langage même et peut-être surtout contre les autorités ecclésiastiques.
Exigeant pour lui-même, il l’était aussi pour les autres en particulier pour les plus anciens chrétiens (ceux du Sud). “Je veux des chrétiens propres”, disait-il.
Jeune missionnaire en 1923 en un territoire sous tutelle de la Société des Nations, il se trouve aussi à l’aise en 1960 dans l’euphorie des Indépendances. Il parle quand il faut et comme il le juge utile aussi bien aux chefs africains qu’aux administrateurs français. Ce qui compte pour lui, c’est son devoir à l’humanisation du travail, pour des exemptions d’impôts, pour l’aide aux prisonniers. Il organisera une vraie campagne contre l’alcoolisme et fera changer les marchés des quatre jours en marchés hebdomadaires pour le bien des villageois.
Le père Chazal se montra un homme intelligent pour discerner la vraie promotion africaine cherchant avant tout la formation de tout homme. En 1930, à l’époque où le Togo était sous “tutelle” lui parle dans un article des élites qui commencent à se former, nos “égales” de demain.
Missionnaire parmi les pauvres, il éprouva bien des fois la patience de ses supérieurs. Mais tous ont témoigné que le père Chazal ne cherchait, en homme de Dieu, que le bien et le salut de ses gens. “Vous avez des soucis, dites-vous, écrivait-il à son préfet apostolique, vous devriez en avoir davantage quand vous voyez ce petit nombre de chrétiens dans le Nord Dahomey”.
En dépit de ses allures bourrues qu’il prenait consciemment, le père Chazal était profondément aimé et estimé de ses confrères et particulièrement des braves et simples gens dont il partageait la vie.
A Tanguiéta le père construisit de ses mains église et presbytère ou mieux car il est désormais le “pape de l’Atacora” son palais apostolique, le “château Saint-Ange” et “Castel Gandolfo”. C’était un vrai plaisir de lui rendre visite selon un “rituel” digne de la curie romaine mais toujours dans une vraie joie fraternelle.
Le 1er janvier 1958, faisant place aux jeunes, le père Chazal se retire sur la montagne de Cotiakou pour y construire de ses mains encore, un “sanctuaire” dédié à l’Assomption de la Vierge Marie. Il veut en faire un haut lieu de prière, un centre de pèlerinage et de retraites. En douze ans, il sut gagner tous les gens des environs. Sa fidélité à la prière, à la messe et au chapelet fut un témoignage qui, plus que les discours, attira les vieux, les vieilles, les enfants: chaque soir la cloche de l’angélus les rassemble autour de leur père pour réciter ce chapelet que tous connaissent par cœur.
A Cotiakou, il y a une case pour les hôtes de passage, toujours les bienvenus, qui trouvent un lit déjà préparé mais surtout les conseils judicieux d’un ancien et une aide généreuse pour des œuvres ou constructions.
C’est le 8 février 1970 que le père Chazal rendit son âme à son Seigneur. Depuis des mois il se savait condamné, il s’était préparé dans la plus grande paix.
Pauvre parmi les pauvres, il avait demandé d’être enseveli comme un vieux du village roulé dans un pagne et une natte et porté en terre par ses amis selon la coutume yoabou. Ses funérailles après la messe concélébrée furent impressionnantes. Elles montrèrent ce que le père était devenu pour les gens. “Quelqu’un du pays, de la race…car de telles funérailles ne se feraient pas pour un étranger”.
Bibliographie
Dictionnaire Français-Gourma. Etudes dahoméennes, I.F.A.N., 1951.
Livre de lecture en Gengbé du P. Stangier, S.V.D., réédition et mise à jour. Lomé, 1930.
Katekismovi Katoliko, Lomé, 1949.
Livre de chants et de prières du père Wolff S.V.D., réédition avec mise à jour, Rome, 1937.
Nombreux articles dans Echo des missions africaines, Lyon, en particulier pour les plus importants:
Théologie des lagunes, Echo, septembre 1924.
L’Afrique vue du large, Echo, décembre 1923.
Une tournée apostolique, Echo, octobre 1925.
Le christianisme et les Noirs, Echo, mai, juin, août et octobre 1926.
Etudes sur les Minas, Echo, avril, juin, août et octobre 1926.
Mêmes articles dans Missions catholiques, 1926, p. 96, 119, 142, 164, 191.
Chez les Gourmas, Echo, 1937, p. 84 sq. et Echo 1939, p. 95 sq.
Peines et joies d’un missionnaire constructeur, Echo, 1952, p. 20 sq.
Articles dans les Missions catholiques.
Des Ecoles et des catéchistes au Togo, Miss. cath., 1926, p. 152, 162.
Cet article, réimprîmé ici avec permission, est tiré d’Hommes et Destins: Dictionnaire biographique d’Outre-Mer, tome 9, publié en 1977 par l’Académie des Sciences d’Outre-Mer (15, rue la Pérouse, 75116 Paris, France). Tous droits réservés.