Collection DIBICA Classique

Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.

Boucheix, Noël

1900-1985
Église Catholique
Bénin

C’est le jour de Noël 1900 que naquit Noël Boucheix dans une famille profondément chrétienne à Romagnat dans le Puy-de-Dôme, fils de Jean et d’Augustine Deschamps.

Après ses années de scolarité et son village natal, il fit de brillantes études secondaires au collège clérical de Courpière, couronnées par le Baccalauréat.

Il fit ses études philosophiques et théologiques au Grand Séminaire de Clermont-Ferrand où il entre le 1er octobre 1917. Ces études seront interrompues par les deux années de service militaire accomplies au 64e bataillon des tirailleurs marocains. C’est de ce premier contact avec la terre d’Afrique que date sa vocation missionnaire chez les Noirs d’Afrique. Mais un méchant paludisme qu’il rapporta de son séjour au Maroc et la volonté de son évêque ne lui permit pas de réaliser de suite cette vocation.

Ordonné prêtre le 29 juin 1924, l’abbé Boucheix devient Maître d’études au collège de Courpière puis l’année suivante vicaire à Saint-Genès de Thiers. Après de longues et dures tractations avec son évêque, Mgr Marnas, la ténacité de l’abbé Boucheix finit par l’emporter et en octobre 1930, il quitte le diocèse de Clermont pour la Société des Missions Africaines. Il accomplit son noviciat comme professeur au Séminaire des vocations tardives à Saint-Priest dans l’Isère et le 10 octobre 1931 il est reçu membre de la Société. En décembre 1931, le Père Boucheix débarque au Dahomey et est nommé vicaire en la grande paroisse de Porto-Novo. Il va y accomplir pendant six années un travail magnifique. Comme à Thiers sa bonté s’exerce dans tous les domaines. Il se penche sur toutes les détresses spirituelles et matérielles. Il est la providence des pauvres et des petits. En 1936, il devient Supérieur de la

Mgr Parisot qu’il remplace pendant le temps qu’il passe en France pour son ordination épiscopale. Toute sa vie, Mgr Boucheix restera profondément attaché à cette mission de Porto-Novo.

En 1937, le Père Boucheix est élu délégué des confrères pour les Assemblées Provinciale et Générale et il se retrouve Vice-Provincial à Lyon. Il acceptera avec dévouement et toujours surnaturellement les divers postes qui comportent souvent l’éloignement de la chère terre africaine.

En septembre 1939, comme tant d’autres confrères, le P. Boucheix est mobilisé. Il demande et obtient d’être affecté aux troupes coloniales. Il est affecté au 44e régiment des tirailleurs sénégalais où sa connaissance des Africains va lui permettre de rendre les plus utiles services. En juin 1940, dans la Somme, son unité est décimée mais le courage du sergent Boucheix lui vaut d’être cité à l’ordre de la division (Croix de Guerre avec étoile blanche). Fait prisonnier en Allemagne, il ne peut rester inactif et organise une filière d’évasion dont beaucoup profitent. Celle-ci découverte, le Père Boucheix fait connaissance avec plusieurs camps de représailles en particulier celui de Rawa-Ruska en Ukraine. En raison de l’influence qu’il exerce sur ses compagnons de captivité, le commandant du camp ne trouve pas de meilleur moyen de se débarrasser de lui qu’en le renvoyant “dans ses foyers.” De retour à Lyon, le P. Boucheix reprend sa place de Vice-Provincial. Bien qu’étroitement surveillé par la Gestapo, il continue à travailler avec la résistance et jouera un rôle important pour la libération des prisonniers du Fort Montluc (650 hommes et 300 femmes) le 24 août 1944.

En décembre 1945 au décès du Père Aupiais il lui succède comme Provincial. Les Assemblées Provinciales de 1946 à 1952 lui renouvelleront la confiance des confrères à la tête de la Province.

L’année 1953 marque un grand tournant dans la vie du P. Boucheix. Lui qui n’était guère orienté vers l’Egypte, si ce n’est d’avoir visité ses confrères en tant que Provincial, le voilà nommé le 11 mars 1953 Vicaire Apostolique d’Héliopolis avec le titre d’Evêque titulaire de Bagai. Il accepte et prend pour devise Major est Caritas, “ L’Amour est plus grand que tout.” Le 10 juin 1953 il reçoit à Fourvières l’ordination épiscopale des mains du Cardinal Gerlier assisté de Mgr Parisot, Vicaire Apostolique de Kumasi du Ghana.

En Egypte, la situation est délicate mais les qualités de cœur et d’esprit de Mgr Boucheix l’aident à surmonter les difficultés propres à cette région. Mgr Boucheix va vivre les premières années de la République Egyptienne, les événements du Canal de Suez et ses conséquences, etc. Il va avoir à défendre les écoles où un décret du gouvernement impose l’enseignement du Coran; il y aura tous les problèmes des mariages et des tribunaux musulmans sans parler du statut personnel des confrères…Mgr Boucheix goûtera même la prison et restera bien des mois un libéré sous caution.

En face de tous ces problèmes Mgr Boucheix se montrera un apôtre infatigable de la paix et de l’unité.

En 1958, nouveau grand virage pour Mgr Boucheix. Le diocèse de Porto-Novo au Dahomey est sans titulaire depuis quatre ans. Là aussi les problèmes sont délicats. Le Saint-Siège fait appel à l’ancien missionnaire de Porto-Novo en le nommant au siège résidentiel de cette ville le 6 juillet 1958.

Certains affirment que Mgr Boucheix a été expulsé d’Egypte. Il répond simplement: “Bien que mon cœur soit très attaché à la terre dahoméenne c’est par obéissance que je suis venu à Porto-Novo.” Et il insiste: “Rien de sérieux ne peut se construire sans l’union de tous dans la confiance mutuelle.” En ce diocèse Mgr Boucheix va faire de son mieux se dépensant avec une vaillance toujours jeune au milieu d’une population qu’il aime beaucoup comptant d’ailleurs parmi ses auxiliaires son frère, le Père Germain Boucheix. Mais les années s’accumulent et la fatigue se fait lourde car les soucis ne manquent pas. Le 8 décembre 1968 il présente sa démission au Pape Paul VI. Il dit à ses diocésains: “J’ai estimé en conscience qu’après dix années passées au milieu de vous il était temps de déposer ma charge pour qu’elle soit confiée à un confrère africain plus jeune et plus dynamique.”

Le Saint Père accepte la démission de Mgr Boucheix le 1er janvier 1969. Ce fut alors le temps des honneurs: Chevalier de la Légion d’honneur; officier de l’ordre national du Dahomey. En 1971 il sera Commandeur de l’Ordre National “en raison d’éminents services rendus à la nation dahoméenne.”

Mgr Boucheix tint à célébrer une dernière fois les fêtes pascales au milieu de ses diocésains et il revint en France avec le titre d’évêque titulaire de baanna, titre auquel il renonça en 1976 pour redevenir simplement ancien évêque de Porto-Novo.

Il aurait pu désirer prendre un repos bien gagné mais il se mit à la disposition de la Société. De 1971 à 1974 il fut le responsable de la maison de repos à Croix-Valmer où il resta ensuite comme infirmier, s’occupant avec charité et dévouement de ses confrères. De Croix-Valmer il passa avec ses confrères à la nouvelle maison de repos à Montferrier-sur-Lez près de Montpellier. Il y mourut le 7 mai 1985. La maladie avait miné son corps et perturbé ses facultés mais de tout son être il resta un grand serviteur de la S.M.A. et de l’Eglise Africaine, un homme de paix et d’unité, réalisant chaque jour sa devise Major est Caritas.

En juin 1974, au jour de son Jubilé d’Or sacerdotal, le Cardinal Gantin lui disait: “Vous êtes de la race de ceux qui font la paix, de la race des rassembleurs d’âmes, des consolateurs des pauvres, des petits, des malades.”

Je crois que ces quelques mots expriment bien ce que fut la vie de Mgr Boucheix, ancien évêque de Porto-Novo.

Noël Douau S.M.A.


Travaux:

Mandements de Carême spécialement en tant que Vicaire Apostolique de Héliopolis. Nombreux articles dans les revues de la Société des Missions Africaines.


Cet article, réimprîmé ici avec permission, est tiré d’Hommes et Destins: Dictionnaire biographique d’Outre-Mer, tome 9, publié en 1977 par l’Académie des Sciences d’Outre-Mer (15, rue la Pérouse, 75116 Paris, France). Tous droits réservés.