Collection DIBICA Classique

Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.

Dalmond, Pierre

1800?-1847
Église Catholique
Madagascar , Mayotte

Né à Cambieu, près de Villefranche (Tarn) il fit ses études secondaires à la Fage et entra au grand séminaire de Montpellier. Ordonné prêtre à Albi en 1824.

Après avoir été vicaire à Gaillac et un an curé à Marnaves, il part en 1826 pour la Guadeloupe où il passe quatre ans. Mais le climat l’oblige à revenir en France.

Une rencontre avec l’abbé Henri de Solages, originaire lui aussi du diocèse d’Albi, et qui vient d’être nommé Préfet Apostolique de Bourbon (La Réunion), Madagascar et des îles de l’Océan Indien, le décide à partir porter l’Évangile dans ces terres lointaines. Il arrive à Bourbon en janvier 1831.

D’abord vicaire à Saint-Paul, puis à Saint Denis, il est nommé Vice-Préfet Apostolique pendant que M. de Solages tente de pénétrer à Madagascar.

Après l’échec de ce dernier qui meurt de misère à Andevoranto, sur la côte est malgache, le 8 décembre 1832, M. Dalmond se sent appelé à aller, à son tour, évangéliser Madagascar. Il apprend la langue malgache et, en 1837, se rend à l’île Sainte Marie, à proximité de la côte est de Madagascar, qui, depuis le 30 juillet 1750, relève de la France. Il en repart le 5 octobre suivant, après y avoir conféré 180 baptêmes, “dont un tiers d’adultes,” a-t-il précisé. Il refit deux nouveaux séjours à Sainte Marie, l’un de six mois en 1838, l’autre de huit mois en 1839. A son départ, il laisse dans les 1 500 baptisés.

En 1840 nous le retrouvons à Nosy Be, île près de la côte nord ouest de Madagascar, où la principale reine de l’île, Tsiomeko, alors âgée d’une quinzaine d’années, le prie de se fixer dans son village. Il y ouvre une école, et la reine prend place parmi ses élèves pour apprendre à lire et à écrire. Après un séjour de huit mois, il retourne à Bourbon (octobre 1840), laissant “environ une cinquantaine d’adultes disposés pour le baptême.”

A Bourbon, où il doit remplir à nouveau les fonctions de Vice-Préfet Apostolique pendant un voyage en France du titulaire de la charge, M. Poncelet, il compose en malgache un livre de prières, un catéchisme, un recueil de cantiques et un Abrégé d’Histoire Sainte, de l’Ancien et du Nouveau Testament. Dans les années qui suivent, il fera paraître, en 1842, un Vocabulaire et grammaire pour les langues malgaches Sakalave et Betsimisara (sic), et en 1844 un Vocabulaire malgache-français pour les langues Sakalave et Betsimisaraka.

En décembre 1841, il apprend que Rome a fait de Madagascar une préfecture apostolique détachée de Bourbon, et qu’il en est le premier titulaire.

L’année suivante, après un rapide passage à Nosy Be, il débarque à la baie de Saint-Augustin, sur la côte sud-est de Madagascar. Mais il ne fait que prendre un premier contact avec les habitants de la “Grande Ile,” et repart le 13 novembre pour Nosy Mitsio, au large de la côte nord-ouest. “Je baptisai douze personnes, a-t-il noté; il y avait environ cent cinquante adultes disposés au baptême, mais étant seul et devant faire un voyage en France pour chercher des missionnaires je n’osai les baptiser.”

En effet, il est à Rome en mai 1844. Après avoir pu exposer la situation de la mission dont il a la responsabilité à Grégoire XVI, il s’adresse au Père Roothaan, Général de la Compagnie de Jésus, qui lui promet des aides. A Paris, le Père Libermann, fondateur de la Société du Saint Cœur de Marie, lui donne les mêmes assurances.

Le 24 décembre 1844, il est de retour à Bourbon avec deux missionnaires du Saint Cœur de Marie, MM. Webber et Richard, et six Jésuites: quatre Pères et deux Frères Coadjuteurs. Les premiers sont destinés au nord de Madagascar et aux îles voisines; les seconds au sud.

Sans retard M. Dalmond exécute ce plan qui annonce la réalisation de ses plus chers désirs. Mais Mayotte, dans l’archipel des Comores, vient d’être choisie comme siège de l’administration française des “Petites Iles.” M. Dalmond en fait le centre de la mission confiée aux missionnaires du Saint Cœur de Marie, et dès janvier 1845, il y conduit MM. Richard et Webber. A peine revenu à Bourbon, il s’embarque avec les Jésuites pour la baie de Saint Augustin (embouchure de l’Onilahy) où ils arrivent le 17 juin. L’accueil chaleureux de la population tourne à l’hostilité après l’arrivée sur les lieux d’un baleinier dont le capitaine se dit américain. Les missionnaires ne peuvent rester et profitent du passage d’un navire français pour rejoindre Bourbon (9 novembre). Ils y retrouvent M. Webber dont la santé a été fortement éprouvée par le climat de Mayotte.

Abattu par ces difficultés, M. Dalmond traverse alors une période de découragement. Il suggère à la Congrégation de la Propagande de confier la mission de Madagascar aux seuls Jésuites, et demande à entrer lui-même dans la Compagnie de Jésus. S’adressant au provincial des Jésuites de Lyon, il écrit: “Depuis vingt ans que je suis dans les colonies, mes forces physiques n’ont pas diminué … mais les forces morales sont très affaiblies.” Il signe sa lettre: “Préfet apostolique de force, Jésuite de cœur.”

Ses désirs ne sont pas exaucés. Il continuera à porter le poids de ses responsabilités. Le 25 décembre 1845, il repart pour Nosy Be, de là à Mayotte où M. Richard est “dans un état désespéré.” De retour à Nosy Be, il y installe la mission d’une façon stable, et quand il en repart dans les derniers jours de 1846, il laisse dans l’île trois chapelles, deux écoles et “une soixantaine de personnes sachant la prière,” dont vingt-cinq baptisées.

Mais ses forces déclinent. Il remet pratiquement sa charge entre les mains du Père Jouen arrivé dans la mission le 4 juin 1846, en le nommant Vice- Préfet Apostolique.

Pourtant les néophytes de Sainte Marie–son premier champ d’apostolat–n’ont pas revu de prêtres depuis 1839. Trois Sœurs de Saint Joseph de Cluny résident dans l’île depuis le 1er novembre 1846, privées de tout secours religieux. Il y repart en janvier 1847. Un nouveau voyage le conduit à Mayotte dans les premiers jours de juillet. Il est de retour à Bourbon le 14 août. Il paraît épuisé. Son état alarme son entourage. Il estime qu’il est de son devoir de retourner à Sainte Marie.

Sur ces entrefaites, Pie IX a érigé la Préfecture Apostolique de Madagascar en Vicariat et l’a désigné pour en être le premier Préfet Apostolique. Mais celui qui fut le fondateur de la mission catholique à Madagascar, et dont la prudence et le sens de l’organisation ne semblent pas avoir été toujours à la mesure du zèle qui le dévorait, mourra sans avoir appris cette nomination. Il rendit le dernier soupir, loin de tous ses confrères, assisté par le frère Mazars et trois Sœurs de Saint Joseph de Cluny, le 22 septembre 1847.

Bernard Blot


Bibliographie

“Madagascar et son premier vicaire apostolique,” Notice sur Mgr Dalmond, Versailles Beau jeune, 1862.

Mgr Maupoint, Notice sur Mgr Dalmond, dans l’Almanach religieux de l’Ile Bourbon, 1863.

P. de la Vaissière, Madagascar ses habitants et ses missionnaires, 1884, .t. I.

A. Boudou, Les Jésuites à Madagascar au XIXe siècle, t. I.


Cet article, réimprîmé ici avec permission, est tiré d’Hommes et Destins: Dictionnaire biographique d’Outre-Mer, tome 3, publié en 1977 par l’Académie des Sciences d’Outre-Mer (15, rue la Pérouse, 75116 Paris, France). Tous droits réservés.