Collection DIBICA Classique

Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.

Mondain, Gustave Stéphane

1872-1954
Protestant
Madagascar

Celui que les Malgaches appelèrent le “fils unique de la France” Gustave Mondain, qui passa près de soixante ans de sa vie à servir Dieu à Madagascar, avait bien failli partir au Zambèze.

Gustave Mondain était né le 18 mai 1872 à Paris. Protestant, membre de la paroisse des Batignoles où il fut moniteur à l’École du dimanche, il avait été un brillant élève du Lycée Condorcet. Son esprit était ouvert à toutes les disciplines. Il a été présenté au concours général des Lycées dans plusieurs branches (Anglais, Histoire, Physique et Chimie, Mathématiques), et a été deux fois lauréat. Il entra à l’École normale supérieure en juillet 1892 dans la section “sciences” et “cultivait la science avec passion,” obtenant la licence de Mathématiques et celle de Physique et Chimie. En 1896, il avait été nommé Professeur de physique au Lycée de Toulon quand il entendit l’appel de Coillard demandant des missionnaires pour le Zambèze. Voulant donner un sens et un but à sa vie, il s’offrit à la Société des Missions Evangéliques de Paris (dite Mission Protestante Française ou MPF). Mais une lettre de Lauga à la direction de cette société réclamait d’urgence l’envoi des scolaires français à Madagascar pour montrer que “qui dit protestant peut dire français.” Gustave Mondain partit donc dans ce pays “pour rétablir l’enseignement protestant conformément aux méthodes françaises,” et y fit un premier séjour de 1897 à 1903.

Revenu en France et ayant compris le rôle qu’il aurait à jouer, Gustave Mondain fit des études de théologie à Paris et reçut la consécration pastorale le 3 juillet 1904 aux Batignoles, son église d’origine. Il repartit alors dans son champ de travail et, en cinq autres séjours, il y exerça un ministère bien rempli. Il fut placé tout d’abord à Tananarive, puis à Ambatomanga (station située à 20 km plus à l’est). A la capitale, il fut Directeur des Écoles de la Mission. Retourné ensuite à Ambatomanga, il y fut Directeur (et enseignant) à l’École Pastorale de la MPF. Après avoir dirigé le district de Mahazoarivo en Imerina, il eut quelque temps celui de Marovoay, à 100 km de Majunga sur la côte ouest. Élu par ses collègues aux fonctions de Président avec résidence à Tananarive, il dirigea la MPF pendant toute la première guerre mondiale (un de ses fils, René, fut tué en 1918 à Verdun).

En 1915, il eut à défendre son collègue malgache Ravelojaona injustement soupçonné d’appartenir à une société secrète séditieuse, la V.V.S.

Mondain fut maintenu dans ces fonctions et responsabilités jusqu’á ce qu’il ait atteint la limite d’âge (soixante-trois ans). Il avait eu à traiter des affaires protestantes avec les Gouverneurs Généraux successifs de la Colonie. Dans ces rapports très officiels, son rôle dépassait de beaucoup celui de directeur de la seule Mission française car il se trouvait être naturellement le porte-parole des missions protestantes étrangères (Britannique, Norvégienne, Américaine) et c’est à cause de son autorité incontestée qu’il fut appelé, bien qu’en position de retraite depuis 1935, à reprendre les responsabilités de Président pour, à Tananarive, préserver et défendre l’œuvre protestante toute entière pendant la délicate période du gouvernement de Vichy.

Gustave Mondain ne parlait d’ailleurs pas seulement aux autorités coloniales comme représentant des Missions protestantes. Élu Président de l’Isan’Enim-Bolan’Imerina (la Semestrielle d’Imerina) qui regroupait les 900 communautés protestantes du nord de l’ile, il exprimait aussi comme mandataire autorisé la voix des églises protestantes malgaches. Intransigeant mais habile négociateur, il sut maintenir l’indépendance et l’intégrité des églises au nom desquelles il parlait. Son activité s’exerçait également au-dedans et il fut le fondateur et ardent propagandiste de la “Croix bleue malgache,” ligue antialcoolique que soutinrent puissamment les cadres des églises protestantes.

Le rayonnement intellectuel de Mondain, dont nous avons des témoignages dans les très nombreux ouvrages qu’il publia et qui font encore autorité, était tel que, dès avril 1902, lors de sa deuxième séance, l’Académie Malgache l’élisait comme membre parce que, déjà, “il avait une expérience incomparable des hommes et des choses d’ici.” Par la suite, il fut pendant des années vice-président de cette brillante société savante, à laquelle il se dévoua pendant sa longue retraite passée à Antsirabe, où sa femme mourut le 28 janvier 1949. En reconnaissance de ses travaux et de ses services, Monsieur G. Mondain a été décoré de la Légion d’Honneur et nommé Officier d’Académie en 1949.

Gustave Mondain vint finir ses jours à Pau (Pyrénées Atlantiques) le 9 août 1954.

Louis Molet


Bibliographie

1897 - Conseils pour l’enseignement du français à l’usage des instituteurs malgaches. Tananarive, 63 p.

1898 - Éléments de malgache (traduction et adaptation de la méthode de Richardson). Tananarive, 100 p.

1904 - Cours de thèmes [malgache-français] 5e éd. Tananarive, 68 p.

Ce que les Missions protestantes ont fait pour l’instruction publique à Madagascar. Paris, 29 p.

Des idées religieuses des Hovas avant l’introduction du christianisme. Cahors, 175 p.

1905 - Exercices de langage et de lecture française. Paris, 48 p.

1910 - L’histoire des tribus de l’Imoro au XVIIe siècle, d’après un manuscrit historique arabico-malgache. Paris 300 p.

1911 - Les Musulmans du nord-ouest de Madagascar [en anglais] Le Caire, The Moslem World [le monde Musulman].

1912 - “Les Malgaches et les faits miraculeux” Paris, Revue de Théologie.

“Les Malgaches et l’Église primitive.” Ibid.

1918 - Gramera malagasy vaovao [nouvelle grammaire malgache] Tananarive, 36 p.

1920 - Un siècle de Missions protestantes à Madagascar. Paris, 375 p. (réédité en 1948).

Nos Indigènes mobilisés. Paris, 148 p.

1925 - Rôle religieux de la femme malgache. Paris, 64p.

Raketaka, tableau des mœurs féminines malgaches […] Paris, 135 p.

Consciences malgaches, Paris, 76 p.

1926 - Angoisses et délivrances (courte histoire du christianisme à Madagascar) Paris, 295 p.

1928 - Documents historiques malgaches - “Des Malgaches chez Louis-Philippe” – “Des soldats français chez Ranavalona III” Tananarive, Mémoires de l’Académie Malgache VII, 101 p.

1929 - Rafaravavy Marie (1808-1848). Une martyre malgache sous Ranavalona I. Tananarive, 164 p.

1930 - “L’œuvre des Missions protestantes à Madagascar” Paris, Gazette coloniale.

1931 - “Famille malgache, ses assises, ses tendances, son avenir” Paris, Rev. D’économie sociale et rurale.

1937 - (en collaboration avec G. S. Chapus) L’action protestante à Madagascar. Tananarive, 63 p.

1947 - “La crise des missions protestantes à Madagascar en 1896” Paris, Le Monde non-chrétien.

1953 - (en collaboration avec G. S. Chapus) Rainilaiarivony. Un homme d’état malgache. Paris, 442 p.

36 Communications à l’Académie Malgache (dont 4 en collaboration avec G. S. Chapus) publiées dans le Bulletin de cette Académie traitant d’histoire, de linguistique, d’ethnographie et d’histoire des religions.

D’autres articles encore dans L’Anthropologie (Paris), Bull. Internat. Com. Histoire Sciences, etc. (voir jusqu’en 1933: Grandidier, A. et G. - Bibliographie de Madagascar, II, 1904-1933.) Paris, 1935.

Et de très nombreux petits articles en malgache dans les périodiques locaux et surtout: Ny Mpamafy [Le semeur], Tananarive.


Cet article, réimprîmé ici avec permission, est tiré d’Hommes et Destins: Dictionnaire biographique d’Outre-Mer, tome 3, publié en 1977 par l’Académie des Sciences d’Outre-Mer (15, rue la Pérouse, 75116 Paris, France). Tous droits réservés.