Collection DIBICA Classique

Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.

Ravelomanana, Hermann

1913-1991
Église Réformée de Jésus-Christ À Madagascar (FJKM)
Madagascar

Ravelomanana Hermann Ravelomanana était une des grandes figures protestantes malgaches, tant au sein de l’église que dans la nation. Il a contribué à l’édification du pays après son indépendance en octobre 1958.

Ses parents étaient originaires d’Antananarivo : son père, pasteur Ravelomanana, venait de Nahamalemy, un village situé à l’ouest de Mantasoa (district de Manjankandriana), et sa mère, Marthe Ravaovelo, d’Ampanarivo, un village situé à l’est d’Ambatotelomirahavavy, près d’Ambatomanga (dans le même district).

En 1911, ses parents entrèrent au Collège Pastoral de la Mission Protestante Française (MPF) [1] à Ambatomanga. Ils avaient déjà eu deux garçons. Leur troisième fils naquit à Ambatomanga, le 28 février 1913, et on lui donna le nom de Hermann Ravelomanana. Sa mère, enceinte de lui, avait choisi ce prénom après avoir lu dans une revue l’histoire d’un missionnaire allemand en Afrique du Sud dont elle admirait le zèle. Plus tard sa sœur cadette, Ruth, vint au monde.

Les parents de Hermann continuèrent à servir la mission MPF, son père en tant que pasteur-évangéliste et sa mère en tant qu’enseignante à l’école de la même mission. Le désir de sa mère était que ses enfants fassent tous de grandes études. Elle-même, élevée par Mme. Forget, missionnaire à la station MPF à Ambatomanga,[2], aimait bien l’étude. Elle avait fait ses études à l’Ecole Normale des filles à Ambatobevanja afin de passer le Certificat d’Aptitude pour l’Enseignement (CAE) et avait été parmi les cinq premières candidates présentées par la mission MPF. Malheureusement leurs candidatures furent refusées par le général Victor Augagneur, gouverneur de la Grande Île qui, en 1905, avait proclamé que les femmes n’étaient pas autorisées à avoir des diplômes. Elle en fut très peinée. Mlle. Rousseau, missionnaire directrice de l’école d’Ambatomanga, l’appela pour enseigner dans son école.

Sa mère mourut de la fièvre à Vatolaivy, localité où les parents de Hermann furent affectés après Ambatomanga, à l’âge de vingt-huit ans, quand ses enfants étaient encore en bas âge. Son père fut alors affecté de nouveau à la station missionnaire MPF à Ambohibeloma, toujours dans la province d’Antananarivo, et ses enfants l’accompagnèrent. Quelques années plus tard, sous les conseils influents des doyens de sa paroisse, il se décida de se remarier. Il choisit une femme du nom de Razafindrahasy, pleine de dévouement et qui aimait les quatre petits orphelins comme ses propres enfants.

Elevé dans un milieu chrétien et instruit, Hermann Ravelomanana prit goût aux études car c’était un garçon intelligent. Après ses études primaires auprès de ses parents, on l’envoya en pension continuer ses études à l’Ecole Normale des garçons à d’Ambavahadimitafo [3] en 1926. Il y passa avec succès l’examen du Certificat d’Etude du Second Degré (CESD). [4] Comme il avait à peine seize ans en l’année 1928, il fut obligé de redoubler sa classe afin de pouvoir passer l’examen du Certificat d’Aptitude pour l’Enseignement (CAP). Malgré cela, le moment venu, il fallut encore demander une autorisation spéciale pour que lui et son camarade de classe Ranaivoson puissent passer cet examen en 1929 à cause de la limite d’âge.

Trop jeunes pour enseigner, on les envoya tous les deux continuer leurs études en 1930 à l’École protestante Paul Minault [5] à Ambohijatovo Nord, qui n’était pas trop éloignée de l’internat des garçons d’Ambavahadimitafo où ils étaient encore. On avait ouvert spécialement pour eux “la section préparatoire.” Hermann était content de pouvoir continuer ses études mais fut attristé de ne pas être mis dans la “section secondaire” qui était déjà en place depuis 1929 dans l’établissement, et qui était destinée à ceux qui passaient l’examen du baccalauréat. L’École Paul Minault avait aussi une “section médicale” pour ceux qui s’orientaient vers la médecine. Son frère Guy y poursuivait ses études. Mais celui-ci mourut jeune quand il était encore à l’École de médecine d’Ankadinandriana.

À l’examen d’entrée pour les trois sections, Hermann et son ami Ranaivoson furent classés parmi les deux premiers des élèves reçus, ce qui raviva encore sa peine de ne pas être admis dans la section secondaire.

La méthode d’enseignement à l’École Paul Minault était différente de ce qu’ils avaient eu auparavant. Le missionnaire Etienne Krüger était le directeur [6]. Au début de l’année, on affichait le programme ainsi que la liste des devoirs écrits à rendre aux professeurs pour la correction. C’étaient seulement pour les matières littéraires comme le malgache et l’anglais qu’on avait des professeurs. Pour les autres matières, les élèves étudiaient eux-mêmes dans les livres. Les professeurs venaient d’habitude dans la matinée et les élèves pouvaient les consulter suivant leur besoin. Etienne Krüger dirigeait lui-même, le lundi matin après le culte commun, une conférence donnée par un des élèves, suivie de débats.

Les professeurs qui enseignaient à l’École Paul Minault étaient des gens de renom au sein de la mission MPF. Le pasteur Gustave Mondain, président de la MPF, sortant de l’Ecole Normale Supérieure de Paris, et qui était parmi les premiers missionnaires envoyés à Madagascar en 1897, leur enseignait la chimie. Le pasteur Ravelojaona, un pasteur de renom encore appelé ny lahimatoan’i Madagasikara ou “le fils aîné de Madagascar” à cause de son patriotisme, sa sagesse, et son intelligence, enseignait l’algèbre et le malgache.

Trop absorbé par ses études, ce n’était que plus tard que Ravelomanana entra dans le scoutisme par l’intermédiaire de ses amis, sous le conseil indirect du chef Lucien [7] qui dirigeait la dixième section du scoutisme à Ambavahadimitafo. Ravelomanana s’engagea alors comme éclaireur de deuxième classe puis passa à la première classe après de laborieux efforts pour apprendre les techniques du scoutisme, telles que la reconnaissance des constellations, nécessaire pour l’orientation, ou encore les cent mètres de natation dans la rivière de l’Ikopa.

Il était parmi les cinq scouts protestants [8] choisis pour faire parti de la délégation malgache composée de soixante membres pour représenter Madagascar à l’Exposition Coloniale [9] organisée à Paris. Entre temps, il fut consacré membre de la Sainte Cène au mois de mars 1931 à Ambatomanga avec son ami Georges Razafimaharavo du Collège Paul Minault.

Les soixante représentants s’embarquèrent à Tamatave, dans le bateau Leconte de Lisle, pour la France. Ils arrivèrent à Marseille après vingt-et-un jours de traversée en mer, puis prirent le train pour Paris. L’exposition qui se tenait au bois de Vincennes dura six mois. Tout se passa bien et le site de Madagascar était parmi les plus visités.

Ravelomanana et son ami Prosper Rajaobelina, préoccupés par le fait que leurs études avaient été interrompues au beau milieu de l’année scolaire, obtinrent la permission du responsable de la délégation malgache de la foire pour continuer leurs études. Ravelomanana en profita pour s’inscrire à l’examen du Brevet Élémentaire (BE), examen dont l’obtention à Madagascar, était réservée uniquement aux élèves, citoyens français, du Lycée Jules Ferry (pour les filles) et du lycée Galliéni (pour les garçons). Il fut aidé par le missionnaire M. Jean Dautheville, un ancien missionnaire qui travaillait avec son père à Ambatomanga et aussi par quelques amis pour obtenir les livres nécessaires. Il réussit cet examen à la deuxième session du mois d’octobre 1931. Quant à son ami Rajaobelina, il suivait des cours par correspondance pour la préparation de l’examen du baccalauréat.

Ayant appris sa réussite à l’examen, la MPF à Madagascar et la Société des Missions Evangéliques de Paris (SMEP) acceptèrent qu’il continue pendant une année ses études en France, pour obtenir le Brevet Supérieur (BS). Il fut donc envoyé à Bordeaux et placé sous la tutelle de M. Jean Beigbeder [10], qui dirigeait le centre “Foyer pour tous” (UCJG) à Bordeaux où il fut mis en pension. Un jeune malgache, Alfred Andriamasy, y logeait aussi avec lui. Il y passa une année puis habita ensuite chez la famille Beigbeder.

Il désirait préparer à la fois, le Brevet Supérieur et le baccalauréat, mais le missionnaire Jean Dautheville lui conseilla de ne pas poursuivre “deux lièvres à la fois.” Il se contenta alors du BS et entra à l’école primaire supérieure qui n’était qu’à dix minutes à pied du foyer où il habitait.

Il devint membre de “la troupe des Pins” dont J. Beigbeder était le chef scout. Celui-ci le prit ensuite comme adjoint. Le scoutisme développa sa personnalité et lui permit de côtoyer des gens de renom et des jeunes comme lui. Il participait à des camps annuels du scoutisme qui lui permirent de visiter la France–entre autres, le camp Lakano dans le département de la Gironde, le grand camp du Blanc dans le Massif Central, tous des camps techniques. Mais il était aussi présent au camp de retraite en Corse, spécialement conçu comme un camp de découverte et de tourisme, pour chefs et cheftaines, dirigé par le pasteur Jean Jousselin– l’auteur du livre Scoutisme éveilleur de l’âme–qui leur expliqua l’impact du scoutisme dans l’éducation.

Au début de l’année 1934, Jean Beigbeder fut envoyé par la SMEP à Madagascar pour diriger le foyer chrétien des jeunes gens et confia à Ravelomanana la direction de la troupe de Pins, tâche qu’il accomplit bien avec l’aide des chefs des quatre sections de la troupe.

Le mois de juillet 1934, il passa avec succès l’examen du Brevet Supérieur dès la première session. Il obtint le prix du français de sa classe et on lui offrit comme prix trois livres de Gustave Flaubert [11] remis par le directeur lui-même car il ne pouvait assister à la cérémonie de clôture, vu son retour imminent à Madagascar. Les mots écrits dans les livres éveillèrent de nouveau son désir de continuer ses études, mais il n’avait pas le choix–il était obligé de retourner au pays. Son père lui avait déjà mentionné dans sa lettre que la conférence de la MPF tenue au mois d’avril 1934 à Tananarive, l’avait désigné pour enseigner à l’Ecole régionale de Miarinarivo. Il s’y résigna et s’embarqua avec Henri Peyrot et sa famille dans le bateau Ville de Rouen qui les ramena à Madagascar.

Ravelomanana partit pour son premier poste d’enseignant à l’École régionale de la MPF à Miarinarivo (1935-1944) accompagné de sa sœur Ruth Rabodoarivelona, enseignante elle aussi. Il fut nommé responsable de la classe du Certificat d’Etudes du Second Degré (CESD). Malgré son jeune âge, ses élèves le respectaient et il avait de bonnes relations avec les autres enseignants. Le résultat de la première année fut un échec du point de vue du CESD, mais les années suivantes, c’était presque toujours l’École régionale de Miarinarivo qui remportait le meilleur résultat dans le classement et dans le nombre des élèves reçus. Ceci redonna du souffle à l’école, encouragea le corps enseignant et les églises du district. La renommée de l’école se répandit et les parents s’empressaient d’y envoyer leurs enfants. Il fallait construire de nouveaux internats pour les filles et les garçons. Ravelomanana donnait aussi de l’importance aux jeux et aux sports : pendant les récréations, il encourageait les élèves à jouer et y participait lui aussi. Il commença un groupe scoute et encouragea les garçons à en faire partie.

Deux ans plus tard, il décida de se marier et prit comme épouse, Florence Razaoarivelo, fille d’Andriamanga, un enseignant de la Friends Mission Association (ou FFMA, connu sous le nom de Quakers), et de Razanajay. Florence Razaoarivelo était la secrétaire de Madame Quétin et avait été enseignante auparavant. Elle préparait l’examen du Brevet Élémentaire (BE). La mère de Florence avait été élevée par Florence Ramsey, missionnaire à Soavinandriana, d’où sa fille tenait le prénom. La missionnaire avait eu l’intention d’emmener Florence Razaoarivelo avec elle en Angleterre, mais le sort en fut autre pour elle.

Après leur mariage civil le 17 novembre 1937 à Ambatomanga, ils célébrèrent le mariage religieux le lundi 19 décembre 1937 à la paroisse de Lohomby, béni par le missionnaire Henry Peyrot. A la demande express de Ravelomanana, Florence et sa mère étant d’accord, la mariée s’habilla à la malgache plutôt qu’à l’européenne, non pas avec une longue voile, comme on en avait déjà l’habitude en ce temps-là mais avec une longue robe blanche accompagné d’un lamba (châle) blanc.

A l’école, Ravelomanana était préoccupé pour l’avenir de ses élèves et des jeunes malgaches en général, dont la plus grande partie venait de milieux ruraux. Le diplôme de la CESD les conduisait où ? A l’école, l’enseignement général leur donnait seulement accès à la bureaucratie. Il pensait à un enseignement plus équilibré où, depuis l’école, on leur apprenait déjà à aimer tous les emplois, surtout les travaux manuels, la culture, et l’élevage–des emplois qu’ils pourraient pratiquer ultérieurement. Il publia un article intitulé : “Ny fampianarana mampisaraka amin’ny tany” (“l’enseignement qui sépare de la terre”) dans la périodique de la mission, Ny Mpandinika (“l’Observateur”) du 20 septembre 1940, pour éveiller l’opinion du public.

Ses collègues, convaincus par son idée, acceptèrent de la mettre en pratique dans l’école. Comme la station était dans un milieu presque aride, non propice à la culture, on opta pour l’élevage des poules. L’application fut limitée au début, à titre d’expérience, à une seule classe. On expliqua l’idée aux élèves puis on leur distribua de l’argent pour acheter des poules. Vers la fin du trimestre, ils devaient chacun faire un rapport de leur expérience de l’élevage. Ravelomanana n’eut pas l’occasion de voir le résultat car, en plein milieu de l’année scolaire (mars 1944), il reçut une affectation urgente pour l’École régionale MPF de Mangarivotra à Majunga (où il resta jusqu’en 1948).

Avant son affectation, l’École régionale de la MPF à Majunga faisait face à de nombreuses difficultés. D’abord, la deuxième guerre mondiale avait encore un grand impact dans la vie des malgaches. A Majunga, la santé des habitants était précaire dû à l’insuffisance alimentaire et à l’absence de médicaments ; la mortalité infantile était très élevée. Presque tous les jours, on entendait la cloche sonner le glas. L’école confrontait aussi le problème des grandes villes du point de vue de l’éducation des élèves dont le nombre était à la baisse dû aux faibles résultats aux examens, surtout celui du CESD.

Malgré ces inconvénients, Ravelomanana s’efforça de rétablir la situation de l’école. Madame De Visme, femme du missionnaire pasteur De Visme, responsable du district de Majunga, était la directrice de l’École régionale, mais elle donna à Ravelomanana la direction effective de l’établissement. Il prit lui-même en main la classe qui préparait le CESD. Comme à Miarinarivo, la première année fut un échec, mais il ne se découragea pas. Pour améliorer son enseignement, il demanda conseil à deux professeurs assistants, Rakotovao Benjamin et Razananaivo Grégoire, qui enseignaient dans les écoles régionales publiques.

Les années suivantes les résultats s’améliorèrent, entraînant la renommée de l’École régionale de Mangarivotra. Les parents et l’église en étaient fiers. La discipline fut restaurée dans l’établissement et le corps enseignant retrouvait le respect des élèves. Par la suite, avec la croissance annuelle du nombre des élèves et l’augmentation des frais de scolarité venant des nouveaux élèves, le problème financier fut résolu.

Une bonne collaboration se tissa entre l’École régionale de Mangarivotra et les deux seules paroisses protestantes (MPF et Luthérien) à Majunga. Ravelomanana encouragea les élèves à fréquenter l’école de dimanche donnée dans les paroisses et demanda au corps enseignant de prendre part à l’enseignement de l’école de dimanche.

Mais la vie à Majunga s’avéra difficile pour sa famille. Leur maison à deux chambres était trop petite et les enfants étaient souvent malades. Deux de leurs enfants qui naquirent à Majunga moururent à bas âge.

En 1948, à cause de ces problèmes de santé, la mission MPF le transféra de nouveau à l’école régionale d’Ambatolampy, située dans la province de Tananarive, où il travailla trois ans. L’établissement se trouvait en plein centre ville, mais la station où elle se trouvait était grande. Le corps enseignant était au grand complet mais leur problème était la non réussite des élèves à l’examen du CESD depuis l’ouverture de cette classe dans l’établissement–ouverture soutenue par les paroisses du district MPF d’Ambatolampy. Ravelomanana arriva juste trois mois avant l’examen. Il décida de prendre en main la classe de l’examen, désigna Mme. Foltz pour y enseigner le français et donna l’instruction religieuse au pasteur Ravelomanana, son frère qui était pasteur de paroisse à Ambatolampy. Il y avait onze élèves dans sa classe qui allaient tous se présenter à l’examen.

Le 3 novembre 1948, Ravelomanana se rendit avec eux à Antsirabe, centre où se donnait l’examen. Lors de la proclamation du résultat, quelle fut leur joie et celle des enseignants quand ils apprirent que seulement un de ses élèves avait échoué parmi les onze candidats présentés. Cette réussite donna du souffle à l’établissement et entraîna la renommée de l’école qui continua à prospérer chaque année. Les paroisses protestantes du district étaient contentes et ne ménageaient pas leurs efforts pour soutenir la seule école régionale du district.

Mais Ravelomanana s’inquiétait toujours pour l’avenir de ces élèves. Il était vrai que le pays colonisateur avait introduit dans les écoles primaires des travaux de jardinage pour les garçons et des cours de couture pour les filles, mais ce n’était pas suffisant. Quel serait le sort de leurs aînés?

Pour résoudre ce problème, Ravelomanana décida d’ouvrir une section technique dans l’école et appela Rabezezika [12], sortant de l’école technique publique, pour y enseigner les travaux du bois et des cornes de zébu . La première année–et les années suivantes–il n’y avait que deux élèves dans sa classe. Ravelomanana fut convaincu que si le programme officiel lui-même ne changeait pas, il n’y aurait pas de meilleurs résultats. Les parents ne risqueraient pas d’y envoyer leurs enfants tant que ce n’était pas officiel.

Après la fin de la deuxième guerre mondiale, la commission scolaire de la mission MPF voulant améliorer l’enseignement dans ses écoles, proposa d’envoyer tous les deux ou trois ans un pasteur et un enseignant pour continuer leurs études ou approfondir leurs connaissances en France. Cette nouvelle éveilla de nouveau en Ravelomanana le désir de continuer ses études. Il présenta sa demande à la Commission scolaire, son père étant prêt à prendre en charge ses dépenses si la mission refusait. Son entrée à la faculté de la Sorbonne à Paris était assurée car il avait déjà son diplôme de Brevet Supérieur, diplôme requis pour y entrer, selon l’information qu’il avait reçu de son ami le professeur Ratsimamanga [13] qui était en France.

La mission lui agréa une année d’études en France, mais ni son voyage, ni sa femme et ses enfants ne seraient pas pris en charge par la mission.

Il arriva à Paris au mois de décembre 1951. Il fit son inscription à la faculté des lettres à l’Université de Sorbonne, aidé par le pasteur Foltz, un missionnaire qui avait travaillé avec lui à Ambatolampy. Mais–nouvelle mesure, pour avoir accès à la licence–il fallait tout d’abord passer l’année propédeutique. Grâce à l’aide de son ami, le professeur Ratsimamanga, il obtint l’autorisation de préparer un certificat en même temps que la propédeutique. Il avait choisi pour le certificat “l’histoire de la colonisation.” Il se mit aussi à suivre l’étude de la langue malgache à l’école des langues orientales.

L’année scolaire 1951-1952 était une année critique pour lui car il était en retard de trois mois puisque l’année universitaire avait débuté au mois de novembre. Il s’efforça donc de rattraper le temps perdu. Il profita aussi au maximum de son séjour en France en passant l’examen du Certificat d’Aptitude Professionnel (CAP), examen auquel il avait échoué quand il enseignait à Miarinarivo. Il s’y présenta le 18 mars 1952, à l’école boulevard Arago, qui était proche de chez lui car il habitait la Maison de la Mission, 102 boulevard Arago. Il fut reçu avec les félicitations de l’inspecteur car il avait obtenu la meilleure note. L’inspecteur l’invita même à venir enseigner dans la circonscription scolaire qu’il tenait!

Le 31 mai 1952, Charles Foltz et M. E. Kruger lui annoncèrent, l’un après l’autre, que la mission à Madagascar acceptait qu’il poursuive ses études pour la licence s’il réussissait la propédeutique.

En dehors de ses études, étant parmi les aînés au sein des étudiants malgaches en France, il était parmi les quatre responsables. Les trois autres étaient le pasteur Daniel Ralibera (pasteur aumônier des étudiants en France), Lucien Randrianarivelo, Henri Ratsifandriamanana, qui était à la rédaction du journal Fehizoro (“Pilier”) qui paraissait tous les deux mois. Ce n’était pas seulement un bulletin de liaison entre les étudiants malgaches en France, mais il servait aussi de moyen pour faire l’éducation morale et spirituelle des étudiants. Les responsables organisaient à Paris des cultes mensuels pour les malgaches et prenaient part aux réunions organisées par la mission MPF pour les œuvres missionnaires.

Sa licence terminée, il rentra à Madagascar au mois de novembre 1954 et retourna travailler à Ambatolampy comme directeur de l’École régionale. En 1957 il fut désigné directeur des écoles de la MPF puis fut délégué par la MPF au poste de secrétaire général de l’Antenimieran’ny Sekoly Protestanta (ASP) ou Commission Scolaire Intermissionnaire [14] en juin 1958. Il y joua un rôle prépondérant. Sa place lui permettait de mettre ses capacités et connaissances au service de l’enseignement protestant. Il avait comme tâche d’avoir l’œil sur le programme de l’enseignement, de s’occuper des livres et périodiques en langue malgache et surtout de trouver des lignes directives communes pour les écoles. Il évolua dans ce cadre pendant dix-sept ans. C’était un homme de terrain qui savait trouver les moyens pour mener à bien son travail. Etant enseignant, il connaissait le problème du corps enseignant de la mission. Il améliora le niveau de l’enseignement protestant par des recyclages annuels des enseignants ou en les envoyant à des stages de formation à l’extérieur. Il instaura pour les écoles protestantes, l’examen du “Certificat élémentaire du premier cycle” ou CEPE [15] en langue malgache, ce qui n’empêcha pas les écoliers de passer l’examen officiel en langue française. Il fonda la maison d’édition Salohy pour l’édition des livres scolaires en langue malgache et écrivait lui-même des manuels scolaires en malgache.

Il éditait aussi le bulletin de liaison pour les enseignants de la mission protestante, appelé Ny sakaizan’ny Mpampianatra (“l’ami des enseignants”), qui avait pour but de mettre à jour les enseignants par rapport aux programmes scolaires et de leur permettre de se communiquer entre eux leurs expériences. Grâce aux subventions extérieures, Ravelomanana réussit à construire des internats de garçons et de jeunes filles dans les chefs lieux des provinces pour héberger les élèves qui poursuivaient leurs études, loin de leurs parents. Le centre de formation chrétienne, ou FOFIKRI fut construit à Ilafy-Antananarivo, en dehors du centre ville pour accueillir les stages de formations–surtout pour les laïcs–et les retraites pastorales. Ravelomanana était un pragmatiste. Il fit construire des maisons à louer qui constituaient des ressources financières permanentes pour le bon fonctionnement des écoles protestantes.

Il ne resta pas seulement au sein de l’enseignement, mais il joua aussi un rôle non négligeable au niveau de la nation. En 1959 il représenta le Comité Intermissionnaire Protestant au sein du Comité Consultatif Constitutionnel (CCC) [16]. Le plus gros de leur discussion était la mise en place de la langue malgache au sein du sénat et de la nation. Ravelomanana donna une proposition écrite disant que “la langue malgache est la langue nationale et en même temps la langue officielle : dans les textes officiels, on peut utiliser la langue française à côté de la langue malgache.” Sa proposition fut votée. Parmi les délégués malgaches du comité, ils n’étaient que deux à parler le malgache et à la fin il ne restait que lui seul ! En tant que représentant de l’Église protestante, il veillait à ce que les lois de la constitution se conforment à celles de l’église. Il resta au sénat jusqu’en 1969 (treize années). Il a su sauvegarder l’autonomie de l’église protestante et de ses écoles.

À partir de l’année 1954, il était aussi membre du Comité de l’Unification des trois églises protestantes malgaches appelé Komitin’ny Firaisana en malgache. [17] L’Eglise unifiée fut proclamée à Tamatave, sous le nom de Fiangonan’i Jesosy Kristy eto Madagasikara (FJKM) ou l’Eglise de Jésus Christ à Madagascar, lors de son premier synode général en 1968. Ravelomanana en fut nommé vice-président de 1968 à 1988, puis membre du Comité national FJKM jusqu’en 1975. Il était paroissien de l’église FJKM d’Ambohitantely et parmi les doyens de la paroisse jusqu’à sa mort.

Il a vécu heureux auprès de sa femme malgré les différentes intempéries qui ont frappé leur famille. Celle-ci a su le soutenir dans ses efforts. Ses cinq enfants ont tous suivi des études supérieures et il était entouré et aimé par ses petits enfants qu’il adorait.

Ravelomanana était un homme dévoué et un pragmatiste. Il a travaillé pendant cinquante-quatre ans au sein de la mission protestante et a fait face avec foi et courage aux difficultés rencontrées. Il s’est beaucoup donné pour la bonne marche des écoles de la mission, ne ménageant pas sa peine pour aider le corps enseignant. C’était un grand défenseur de la langue malgache même s’il maîtrisait et aimait le français. Il était fier d’être malgache et a laissé un bon exemple à la nation. Il a surtout marqué de son empreinte l’enseignement protestant à Madagascar qui s’est développé sous sa direction.

Il est décédé le 22 mai 1991, à l’âge de soixante-dix-huit ans, quelques mois après avoir terminé son livre autobiographique Ny lalana nombako (“Les chemins que j’ai parcourus”) qui fut édité par la maison d’édition Salohy (“Gerbe”) en mars 1991. Son corps fut inhumé dans son village natal de Nahamalemy.

Berthe Raminosoa Rasoanalimanga


Notes:

  1. Mission Protestante Française (MPF), nom donné spécialement à la Société Evangélique de Paris (SMEP) à Madagascar, pour signaler très clairement qu’en France, il y avait aussi des protestants et non pas seulement des catholiques. Les deux premiers délégués envoyés par le Comité de Paris étaient M. Krüger et M. Lauga en 1896. En effet, au début de la colonisation française, le protestantisme était menacé par les actions des Jésuites. Dans sa lettre du 26 mars 1896, Lauga écrivait ces mots :

Aussi quand, après la conquête, les jésuites et leurs partisans se sont mis à crier tout haut que, pour être Français, il fallait se faire catholique, ces gens ont-ils pris peur. Dans une foule de villages ils n’osaient plus aller à l’église et se demandaient avec angoisse s’il ne faudrait pas aller plus loin et entrer dans l’Église romaine.

De quatre côtés différents–écrit-il le 2 octobre 1896–je pourrais presque dire des quatre points cardinaux, nous est arrivée, cette semaine, la nouvelle que les jésuites avaient fait, simultanément sur ces divers points, des tentatives pour s’emparer des temples protestants afin d’y dire la messe, et des bâtiments scolaires de nos missions pour y placer leurs propres instituteurs. Ils font croire à qui veut les entendre qu’ils sont tout puissants auprès du gouvernement. Nous sommes en présence d’un plan d’attaque savamment combiné, et, pour y faire face, nous sommes obligés à des prodiges d’activités. (Gustave Mondain, Un siècle de Mission à Madagascar, chap. VII, cité: http://www.regard.eu.org/Livres.14/ Un_siecle_de_mission/08.html)

  1. La station MPF d’Ambatomanga était là où se trouvait le collège théologique, une école primaire devenue plus tard école régionale. Ambatomanga se trouve à la périphérie est d’Antananarivo. La mission MPF essaya d’étendre leur œuvre non seulement dans la capitale mais aussi en brousse.

  2. École Normale des garçons à d’Ambavahadimitafo : En ce temps-là, l’enseignement n’était pas encore mixte. La MPF avait dans la capitale d’Antananarivo ses propres écoles normales: l’École Normale des garçons à Ambavahadimitafo et l’École Normale des filles à Ambatobevanja. Plus tard, on a transformé les deux étages supérieurs de l’École Normale des garçons en internat des jeunes filles et le rez-de-chaussée en école primaire. L’auteur elle-même, y a été pensionnaire au temps où Mlle. Marie Homburger était la directrice de l’internat des jeunes filles quand elle poursuivait ses études secondaires à l’École Normale des filles d’Ambatobevanja. C’est là qu’on a rajouté l’école secondaire des filles qui fut appelée École Élise de Pressencé d’Ambatobevanja.

  3. Certificat d’Etudes du Second Degré (CESD) : examen qui sanctionne la fin des études secondaires du premier cycle. L’enseignement publique avait déjà des écoles régionales renommées dans la capitale et en province (Ambatondrazaka, Mantasoa) pour la préparation de cet examen, qui exige des professeurs qualifiés. Les trois missions protestantes à Madagascar (London Missionary Society ou LMS, Friends Foreign Mission Association ou FFMA et Mission Protestante Française ou MPF) avaient aussi les leur à Antananarivo, mais non pas dans les régions. L’ouverture des écoles était difficile car elle exigeait des diplômes appropriés que seulement les missionnaires français possédaient. C’est ainsi que la MPF a décidé après la fin de la deuxième guerre mondiale d’envoyer ses enseignants en formation en France.

  4. École Paul Minault à Ambohijatovo Nord : Cette école portait le nom de Paul Minault, un missionnaire français, assassiné par une bande armée prés du marché d’Ambatondradama à vingt kilomètres du poste de Ramainandro, le 20 mai 1897, avec son ami Benjamin Escande, missionnaire français lui aussi, lorsqu’ils se rendaient au Betsileo, lui en filanjana (chaise porteuse) et son ami à cheval. On enterra leurs corps dans le cimetière de la Mission Anglicane à Ramainandro (G. Mondain, Un siècle de mission à Madagascar). Ultérieurement on changea le nom de l’école en Collège Paul Minault. Plus tard on donna au collège protestant à Ambositra, le nom Benjamin Escande, en souvenir de ce dernier.

  5. Etienne Krüger (1895-1983) était missionnaire à Madagascar de 1923 à 1947 comme directeur du Collège Paul Minault à Tananarive. Bon pédagogue, curieux de tout, notamment de l’histoire et de la culture malgaches, c’était aussi un homme entreprenant qui témoignait d’une grand liberté d’esprit. De 1949 jusqu’à sa retraite en 1971 il était bibliothécaire et archiviste de la Société Evangélique de Paris où il déploya une grande activité intellectuelle. Il était aussi membre de l’Académie d’Outre Mer. Chercheur cultivé et modeste, Etienne Krüger publia de nombreux articles et bibliographies. Il était membre de longue date de la Société des Africanistes. Il décéda le 16 avril 1983 à l’âge de quatre-vingt-huit ans. (S. Horvat, Journal des Africanistes, 53, 1-2, (1983) pp. 173- 179.)

  6. Lucien Peyrot, fils du missionnaire Henri Peyrot qui travaillait à Madagascar sous l’égide de la MPF.

  7. Les cinq scouts protestants qui ont représenté Madagascar à l’Exposition coloniale de 1931 étaient Prosper Rajaobelina, Henri Ravaojanahary, Théophile Ranivoarivony, Charles Ravaojanahary, et Hermann Ravelomanana.

  8. L’ Exposition Coloniale s’ouvre dans le bois de Vincennes à Paris le 6 mai 1931. Cette manifestation marque l’apothéose de la IIIe République qui voulait convaincre l’opinion publique du bien fondé des conquêtes coloniales, en particulier dans une grande partie de l’Afrique noire et de Madagascar, de l’Afrique du Nord, de l’Indochine ainsi qu’en Syrie et au Liban. Des photos des expositions se trouvent à ce site: http://lartnouveau.com/art_deco/ expo_coloniale_1931.htm.

  9. Jean Beigbeder était un des fondateurs du scoutisme unioniste en France qui a aussi été missionnaire à Madagascar où il avait fondé la première troupe d’éclaireurs unionistes locaux vers 1925.

  10. Les trois livres de Gustave Flaubert étaient des exemplaires sur vélin de Hollande, numéroté de 1 à 69, et qui ne se vendait pas en librairie. Sur la première page des livres, le directeur avait écrit les mots suivants : “Prix de français BS 3, offert par M. Ch. Gueslin, délégué cantonal. Décerné à Hermann Ravelomanana avec félicitations du conseil des professeurs. Encouragement à poursuivre ses études en lettres et souvenir à cet élève qui a su mériter notre estime et toute notre sympathie “ Bordeaux le 13 Juillet 1934. [M. Brès.] (Citation de Hermann Ravelomanana, Ny lalana nombako.)

  11. Rabezezika (Van Dussud), était le maître de la sculpture sur corne de zébu qui a suscité l’admiration de tous les amateurs d’art pour la qualité de son travail. Sa renommée dans ce domaine a largement dépassé les frontières de la Grande Île. Il a su élever son savoir faire au rang de l’art et a marqué de son génie artistique un secteur dont certains parlent avec condescendance. Il est mort le 20 mars 2009 à l’âge de 99 ans. (Patrice Rabe Midi Madagascar, journal quotidien, parution du 6 avril 2009).

  12. Albert Rakoto Ratsimamanga était un scientifique malgache, docteur en médecine et en sciences, né le 28 décembre 1907 à Tananarive et décédé le 16 septembre 2001. Son parcours scientifique exemplaire était synonyme d’une brillante réussite avec des titres innombrables et des travaux scientifiques très importants.

  13. La Commission Scolaire Intermissionnaire rassemblait toutes les écoles des champs des missions protestantes travaillant à Madagascar, à savoir la Mission Protestante Française (MPF), la Mission de Londres (LMS), la Mission des Amis ou Quakers (FFMA), la Mission Norvégienne (NMS). Les écoles des missions représentées avaient leur propre structure et méthode dans l’enseignement et la direction de leurs écoles. La Commission Scolaire Intermissionnaire les aidait pour le programme scolaire et le recyclage des enseignants ainsi que pour le support financier des écoles.

  14. Le Certificat d’Études Primaires Élémentaires (CEPE) sanctionne la fin des études primaires élémentaires, actuellement encore en vigueur ; il y avait aussi le CEPE en langue malgache pour les élèves du premier cycle des écoles primaires protestantes, examen instauré par la Commission Scolaire Intermissionnaire.

  15. Le Comité Consultatif Constitutionnel (CCC) a été formé du temps du président de la république malgache, Philibert Tsiranana, pour étudier la constitution malgache, après la proclamation de son indépendance le 14 octobre 1958, même si l’enseignement supérieur et le service de la défense étaient encore entre les mains des Français. Ravelomanana était parmi les trente-sept membres délégués–un groupe de vingt-sept malgaches et dix français. Ce comité deviendra plus tard le sénat.

  16. Le Komitin’ny Firaisana ou Comité de l’unification : Les trois premières missions protestantes travaillant à Madagascar, influencées par le souffle de l’indépendance, à partir de l’année 1958 se transformèrent les unes après les autres en églises malgaches, dirigées par des pasteurs malgaches. Ainsi, la LMS devenait FKM ou Eglise du Christ à Madagascar, la FFMA est devenue FFM ou Eglise Frenjy Malagasy, MPF en FPM ou Eglise protestante à Madagascar. Le travail de l’unification des trois églises (1951-1968) étaient dirigée par le Comité de l’unification. L’église unifiée a été déclarée à Tamatave le 10 août 1968, lors de la réunion du premier synode de l’église unifiée, sous le nom de Fiangonan’i Jesoa Kristy eto Madagasikara ou Église de Jésus Christ à Madagascar (FJKM). C’est une église réformée, organisée de façon presbytérale et synodale.


Bibliographie

Hermann Ravelomanana, Ny lalana nombako [Le chemin que j’ai parcouru], (Antananarivo: Imprimerie de la FJKM/ Edition Salohy, mars 1991).

Archives de la Mission MPF- FPM: les archives du Komitin’ny Firaisana ou Comité de l’Unification de la FJKM aux Centre Nationale des Archives-Bibliothèque de la FJKM- Antananarivo.

Les agendas du pasteur - évangéliste Ravelomanana, compilés par Voahangy Ravelomanana, petite fille de Hermann Ravelomanana dans son blog.

Sources non écrites: témoignage de ses enfants Jean Claude Ravelomanana et Christiane Ravelomanana.


Cet article, reçu en 2009, est le produit des recherches de Madame Berthe Raminosoa Rasoanalimanga, directrice du Centre National des Archives FJKM (1984-2007), récipiendaire de la bourse du Projet Luc en 2008-2009.


Photo Gallery

Ravelomanana

Ravelomanana (Scout)

Ravelomanana et sa femme

Ravelomanana et Famille

Ravelomanana à Salisbury