Collection DIBICA Classique
Tous les articles créés ou soumis au cours des vingt premières années du projet, de 1995 à 2015.Matshedisho, Andrew
Andrew Matshedisho eut son premier contact avec l’Église du Nazaréen pendant une campagne d’évangélisation sous tente dans la commune de Moroka (à Sowéto, Johannesburg) en 1952. Il entra dans la tente suivi de ses compagnons bruyants. C’était un homme de grande taille. Le thème du message ce soir-là était “Jésus répondit, ‘Je suis le chemin, la vérité et la vie, nul ne vient au Père que par moi’” (Jean 14 v.6). Pour perturber le culte Matshedisho et ses amis faisaient exprès de faire du bruit avec leurs pieds sur le sol et criaient à intervals réguliers, “Afrika! Mayebuye!” (Un slogan pour la liberté politique qui signifie “Que l’Afrique revienne!”). Au comble de la frustration, le pasteur arrêta le culte. Mais Matshedisho partit, tenaillé par un sentiment de culpabilité et ne put trouver le sommeil cette nuit-là.
Le soir suivant, son fils David le supplia d’aller avec lui à la tente mais Matshedisho refusa, prétextant qu’il était fatigué. Son fils insistait et pleurait tant et si bien que le père, attendri par les pleurs de l’enfant, céda à sa demande. Il se demandait ce que son fils y trouvait de si intéressant. Ils y allèrent donc. Les versets de Galates 5 v.19-21 qui énuméraient ses propres péchés troublèrent profondément Matshedisho au point qu’il commença à en trembler de peur. Ensuite l’invitation en Matthieu 11 v. 28-30 le toucha: “Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos. Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions, car je suis doux et humble de cœur; et vous trouverez du repos pour vos âmes. Car mon joug est doux et mon fardeau léger.” Il avança en trébuchant jusqu’au banc rudimentaire qui servait d’autel. Décrivant la scène plus tard il dit, “J’ai vu mes péchés et j’ai pleuré. J’ai confessé mes péchés et je les ai nommés. Dieu m’a pardonné. J’ai beaucoup remercié Dieu d’avoir utilisé un enfant pour me donner le salut et faire de moi un enfant de Dieu. Alléluia! Dieu soit loué!” Il se releva un homme transformé. La jalousie et la haine avaient disparu de son coeur. Comme il en témoigna plus tard, il avait le sentiment qu’il pouvait aimer le monde entier. [1]
Le lendemain, il rapporta un sac rempli d’objets volés à son lieu de travail. La réponse du gérant était, “C’est merveilleux! Je ne connais rien à cette affaire de Jésus, mais amène tous mes employés à ta tente car mon entreprise est sur le point de faire faillite à cause des vols.”
Matshedisho commença à tenir des réunions de prière tous les soirs dans sa petite maison de la commune de Jabavu. Sa femme s’appelait Angelina (1918-1982). Ses voisins, qui n’étaient guère sympathiques, payèrent un guérisseur pour faire cesser tout le bruit. On enterra le plus puissant sortilège devant le portail de la maison de Matshedisho, mais cela ne lui fit aucun mal. Furieux, les voisins demandèrent au sorcier de leur rendre leur argent, mais il leur répétait que son sortilège ne tarderait pas à faire effet.
Matshedisho abandonna son activisme politique. Il répondit à l’appel de Dieu et partit étudier la théologie dans un institut biblique. Après avoir terminé sa formation, il revint travailler dans sa région natale et devint le pasteur de l’église de Moroka. C’était le premier pasteur à Soweto après le Pasteur Salome Khumalo du eswatini qui avait commencé à célébrer des cultes à Jabavu en 1950. Matshedisho fut ordonné en 1961 par le Surintendant Général G. B. Williamson. L’une des expressions favorites de Matshedisho était “Modimo ke Modimo!” (Dieu est Dieu !) Il eut beaucoup d’occasions pour le prouver.
Une nuit, pendant qu’il rentrait chez lui après avoir travaillé à la construction d’une église, il fut battu par des tsotsis (gangsters). Ils lui volèrent son salaire de la semaine et le laissèrent là, inconscient, mais par miracle, encore vivant. Il reprit conscience et regagna sa maison non sans peine. Habituellement, ces gangsters dépouillaient leurs victimes de tous leurs biens avant de les tuer pour qu’on ne puisse pas les dénoncer à la police.
Un autre soir, comme il rentrait chez lui à vélo, il arriva à l’angle des pompes funèbres de la “Self-helping Hand” (“la main qui s’aide elle-même”) de Maroka. Il reçut un coup sur la tête et tomba par terre, inconscient. Comme ses agresseurs se penchaient sur lui pour le fouiller, la torche qu’il avait dans sa main changea de position et illumina leurs visages. Pensant qu’il était encore conscient et prêt à les attaquer, ils prirent la fuite. Un pasteur qui passait par là se précipita pour l’aider et reconnut son ami. “Oh Matshedisho! Dieu est sûrement avec toi! Ces bandits ne laissent jamais leurs victimes en vie! “ s’écria-t-il.
En 1960, la tente pour la campagne d’évangélisation fut montée sur le site où la mission projetait de construire une église. Les nazaréens avaient fait beaucoup de visites dans la région et la tente, qui mesurait seize mètres de largeur sur trente mètres de longueur, était bondée chaque soir. Beaucoup de gens se donnaient au Seigneur. Mais soudain un groupe de révolutionnaires déclara une grève générale et cela provoqua une grande flambée de violence dans toute la région. A Zola, ils volèrent au missionnaire Rév. Georges R. HAYSE le livre de paie de cinq équipes d’ouvriers.
Matshedisho continua les campagnes d’évangélisation. Il disait toujours : “ Dieu est Dieu.” Le matériel commença à disparaître des sites de construction. Comme le frère Hayse se préparait à emporter le materiel pour le ranger, un prédicateur arriva tout agité pour leur raconter ce qui s’était passé à Moletsane le soir précédent. Tôt dans la soirée, pendant que Matshedisho priait à genoux dans la tente, trois hommes étaient entrés dans la tente, le bousculèrent, lui ordonnèrent de se relever, et lui demandèrent ce qui se passait. Il leur expliqua que la tente était la maison de Dieu et qu’il était là pour parler aux gens du Dieu qui pouvait changer leurs vies. Ils prirent le microphone et exigèrent qu’il incite la population à se rassembler contre leur ennemi, le gouvernement. Matshedisho arracha le micro des mains du chef et lui répondit qu’il était un messager de Dieu. Il déclara que Dieu aimait tous les hommes et voulait les sauver. Il ne pouvait pas utiliser ce microphone pour répandre la haine comme ils le voulaient.
À ces paroles, le chef devint furieux et sortit un grand couteau. Matshedisho esquiva le coup de couteau qui trancha le fil du micro. Le chef renversa les lampes d’un coup de pied et fracassa l’amplificateur. Puis il se jeta sur Matshedisho avec son couteau et lança avec colère : “ Oui, nous savons que tu es un ennemi du peuple et digne de mort. Je vais te tuer ! “ Il couvrit la bouche de Matshedisho de sa main, tira la tête de Matshedisho vers l’arrière et mit le couteau sur sa gorge. L’un de ses compagnons intervint en arrêtant sa main et lui dit de ne pas tuer le prédicateur parce que des gens les avaient vus entrer dans la tente. Ils seraient vraiment dans de beaux draps si on savait qu’ils tuaient les gens et on les dénoncerait à la police.
Alors ils dirent à Matshedisho qu’ils allaient chercher un conteneur de pétrole : “ Si à notre retour, tu refuses toujours de coopérer, nous te tuerons et brûlerons cette tente. Comme ça, cela aura l’air d’un accident. “ Peu après, ils étaient revenus et trouvèrent encore Matshedisho avec ses assistants en train de prier devant l’autel. Les yeux levés vers le ciel, les larmes ruisselant sur son visage, Matshedisho continuait de prier que Dieu préserve la tente, protège leurs vies, et qu’il ait pitié de ces hommes méchants. Les hommes restèrent figés sur place pendant quelques instants avec leurs conteneurs de pétrole, marmonnant entre eux. Puis, sans un mot, ils se retirèrent lentement de la tente et s’évanouirent dans l’obscurité.
George Hayse suggéra vivement qu’ils démontent la tente et reprennent plus tard quand le calme serait revenu. Matshedisho répliqua: “ Dieu est-il ou n’est-il pas Dieu ? N’est-il pas capable de protéger cette tente? N’est-il pas capable de protéger ma vie? N’est-il pas capable de s’occuper de ces gens-là? “ La campagne d’évangélisation continua et la paix revint finalement dans cette grande ville. Les gens venaient de plus en plus nombreux et bientôt on vit s’établir une église dynamique à Moletsane.[2]
Douze prédicateurs et leurs épouses venaient de la congrégation de Matshedisho à Moletsane. L’un de ses premiers convertis était M. July Ndhlovu, autrefois secrétaire d’une remarquable organisation révolutionnaire mais aussi, immigrant clandestin en Afrique centrale. Plus tard, Ndhlovu retourna au Zimbabwe pour soutenir l’implantation d’une église dans son pays natal.
Angelina, la femme de Matshedisho, mourut le 11 octobre 1982 alors qu’il était pasteur à Meadowlands East. Un jour, alors qu’il rendait visite à sa femme à l’hôpital, sa voiture fut volée.[3] Il souffrit du diabète durant ses dernières années. Matshedisho était un homme de prière qui avait une grande ferveur pour l’évangélisation. Il encourageait toujours les chrétiens et particulièrement les jeunes prédicateurs qui commençaient leurs ministères. [4]
Paul S. Dayhoff
Notes:
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A. Matshedisho, “Testimony,” Montsoša-Bošego,(l’Héraut), magazine pedi/sotho de l’Eglise du Nazaréen en Afrique du Sud, Afrique, (Florida, Transvaal, Afrique du Sud: Nazarene Publishing House, Mars-Avril 1960), 5.
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G. Hayse, The Other Side of the Shield, (Kansas City, MO: Nazarene Publishing House, 1966), 65ff, 78.
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Trans African, (Florida, Transvaal, Afrique du Sud: Africa Nazarene Publications, Novembre-Décembre 1982), 2.
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Trans African, (Septembre-Octobre 1990), 14.
Cet article est reproduit, avec la permission de l’auteur de Living Stones in Africa: Pionneer of the Church of the Nazarene, édition révisée, copyright © 1999, de Paul S. Dayhoff. Tous droits réservés.
Cet article a été traduit de l’anglais par l’évangéliste Milly IBANDA MILINGANYO de la République Démocratique du Congo, église du Nazaréen, District du Nord-Kivu / Afrique.